Le chef de l'Etat, Abdelmadjid Tebboune a annoncé lors de sa campagne électorale, mais aussi lors de sa prestation de serment, qu'il comptait organiser des élections législatives avant la fin de l'année. Le même engagement sera réédité par M. Tebboune à chaque fois qu'il évoquait le changement de la Constitution. Il a justifié une législative anticipée par la nécessité de mettre au diapason les lois de la République avec la nouvelle loi fondamentale, pour laquelle, pour rappel, une commission d'experts a été mise sur pied. Parmi ces lois, celle sur les élections, entre autres, devra être changée. Ce qui induira un nouveau régime électoral et un nouveau modus operandi lors de chaque joute électorale. Partant de cet engagement et compte-tenu de la réalité politique que vit le pays depuis près d'un an, la future Chambre basse du Parlement devra, en toute logique, refléter cette même réalité. Parmi les engagements pris, également par le nouveau locataire du palais d'El-Mouradia, afin de couronner les changements institutionnels sur lesquels il s'est engagé, figure la prédisposition de l'Etat à ouvrir les institutions élues aux jeunes et aider ces derniers à postuler à des postes politiques. À se fier aux engagements du chef de l'Etat, outre l'ouverture du champ politique, la composante des futures Assemblées, notamment, le Parlement devrait connaître de profonds changements au niveau de sa composante politique. Dans une telle configuration, les futurs élus du peuple viendraient d'horizons politiques autres que ceux de l'actuelle majorité, composée du FLN, du RND, de TAJ et du MPA. Ces partis étant laminés par le soulèvement de la rue, se trouvent presque exclus de la vie politique nationale. Les quatre partis de la majorité vivent, d'ailleurs en hibernation depuis bientôt un an. Hormis le RND qui a tenté de se replacer avec la candidature de son secrétaire général par intérim, Azeddine Mihoubi, à la dernière présidentielle, les partis de l'ex-Alliance présidentielle se retrouvent tous en rade du champ politique. Des appels à la dissolution de ces partis, notamment l'ex-parti unique, le FLN, sont récursifs. Face à cette donne qu'impose le mouvement populaire, le pouvoir qu'incarne actuellement Abdelmadjid Tebboune, acceptera-t-il de jouer la transparence lors des prochaines législatives ? Ou bien se contentera-t-il d'effets d'annonce et de manœuvres pour maintenir une majorité acquise à la feuille de route tracée comme rempart contre le soulèvement de la rue qui exige le démantèlement du système ? La posture souvent anachronique du pouvoir face à la contestation populaire ne saura se départir d'une des constantes du régime, à savoir la manipulation et la manigance. Même si rien pour le moment n'est clair à ce sujet, il est fort à parier que seuls les partis dits d'opposition qui ont de tout temps composé avec le système dans les Assemblées élues, seront "admis" dans l'hémicycle lors des prochaines législatives. Car il y va de la survie du régime que d'éviter une réelle compétition lorsque l'on sait qu'il est dépourvu de soutien populaire et d'instruments de pouvoir comme l'étaient ces partis qui servaient, des années durant, de réservoir d'apparatchiks et d'hommes d'appareils. Si le pouvoir était amené à accepter de jouer la carte de la transparence, la future Assemblée nationale serait calquée sur la rue en ébullition depuis 11 mois. Elle sera, ainsi, un reflet des courants politiques qui animent le mouvement populaire. Dans ce cas précis, il est à se demander si le pouvoir composerait avec une Chambre basse du Parlement à majorité acquise à la rue qui, du reste, continue de réclamer le départ du système. Donc, le pouvoir sera, dans ce cas de configuration, face à une APN source de blocage pour lui et un véritable contre-pouvoir. L'on pourra, ainsi assister à une ultime tentative de dérouter la volonté populaire pour imposer un personnel politique trié sur le volet à partir des partis rejetés par la rue. Le pouvoir puisera, pour ne pas déroger à la règle, dans des formations et autres associations issues d'une certaine "société civile", pour leur ouvrir grandes les portes de l'Assemblée. Ce même nouveau personnel sera présenté comme émanant du mouvement populaire. Le recours à ce procédé sera d'autant plus aisé pour le pouvoir, car son incapacité réside plutôt dans la difficulté de convaincre les vrais animateurs du mouvement de contestation. Sur quel critère devra-t-il s'appuyer pour choisir telle ou telle personne, surtout face à une rue qui s'oppose à toute tentative de sa structuration ? Une mission qui parait plutôt difficile à réaliser.