Pour Pékin, si les Etats-Unis continuent de mener des actions unilatérales, cela finira par affecter les entreprises américaines. L'adoption par la Chine, en juin dernier, d'une loi sur la sécurité nationale à Hong-Kong, entraînant selon ses détracteurs un recul inédit des libertés, ne finit plus d'alimenter les tensions entre Washington et Pékin. Si la crise politique entre les deux géants était surtout contenue dans la sphère diplomatique, un débordement de ces tensions sur le terrain économique et technologique se fait de plus en plus pesant depuis quelques mois. Hier, la Chine a condamné en des termes virulents l'attitude de Washington qui a encore durci sa position face à Pékin en adoptant des sanctions contre 11 dirigeants hongkongais, dont la cheffe de l'exécutif Carrie Lam, parallèlement à des mesures radicales contre les joyaux du numérique chinois TikTok et WeChat. La veille, Washington a annoncé le gel des avoirs de Mme Lam, des secrétaires à la Sécurité et à la Justice ou encore du chef de la police, accusés de chercher à restreindre l'autonomie du territoire et "la liberté d'expression ou de réunion de ses habitants". "Les Etats-Unis soutiennent le peuple de Hong Kong et nous utiliserons nos outils et nos autorités pour cibler ceux qui portent atteinte à son autonomie", a déclaré le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin. Le bureau de représentation du gouvernement chinois à Hong Kong, dont le directeur Luo Huining figure sur la liste des 11 responsables sanctionnés, a condamné hier ces sanctions, les jugeant "barbares et grossières". Le gouvernement hongkongais a qualifié ces sanctions de "honteuses et méprisables". Le secrétaire hongkongais au commerce, Edward Yau, avait auparavant qualifié de "sauvages, disproportionnées et déraisonnables" ces sanctions, avertissant que "si les Etats-Unis mènent unilatéralement ce type d'action déraisonnable, cela finira par affecter les entreprises américaines". Les sanctions américaines sont une réponse à l'adoption par la Chine, en juin, d'une loi sur la sécurité nationale dans l'ancienne colonie britannique qui, selon ses détracteurs, entraîne un recul des libertés inédit depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine par le Royaume-Uni en 1997. En représailles, le président américain, Donald Trump, avait annoncé à la mi-juillet la fin du régime économique préférentiel accordé par les Etats-Unis au territoire autonome, centre financier international majeur, et avait promulgué une loi prévoyant des sanctions contre des responsables hongkongais et chinois. Entre-temps, le climat s'est envenimé entre les deux grandes puissances. Accusant la Chine d'espionnage, Washington a fait fermer son consulat à Houston (Texas), et la Chine a pris possession du consulat des Etats-Unis à Chengdu, dans le sud-ouest de la Chine. Mais c'est dans la sphère technologique que le durcissement est le plus radical. Donald Trump a signé, jeudi dernier, un décret interdisant, d'ici 45 jours, toute transaction "des personnes sous juridiction américaine" avec ByteDance, la maison mère chinoise de TikTok, une application de vidéos légères extrêmement populaire auprès des jeunes. Le président américain a également adopté un décret similaire concernant la plateforme WeChat, qui appartient au géant chinois Tencent et est omniprésente dans la vie des Chinois (messagerie, paiement à distance, réservation...). Le président républicain a invoqué une "urgence nationale", accusant les deux applications d'espionner leurs utilisateurs américains pour le compte de Pékin. "Washington mène une manipulation et une répression politiques arbitraires, ce qui ne pourra déboucher que sur leur propre déclin moral et sur une atteinte à leur image", a affirmé vendredi un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin. TikTok a, de son côté, menacé d'engager des poursuites judiciaires contre la décision américaine, alors que LTencent examinait en détail le décret pour décider de la réaction à apporter.