Les beaux-livres "Tlemcen ou les lieux de l'écriture", photographies et textes de Mohammed Dib ; "Fernand Pouillon et l'Algérie. Bâtir à hauteur d'homme", photographies de Daphné Bengoa et Léo Fabrizio et texte de Kaouther Adimi, et le roman "Un jour idéal pour mourir" de Samir Kacimi (traduit de l'arabe par Lotfi Nia) sont les dernières pépites des éditeurs pour cette fin d'année. L'impact de la crise sanitaire sur le secteur culturel est très lourd, mais cela n'a pas empêché des acteurs culturels de poursuivre leurs activités et d'offrir ainsi un moment d'évasion aux citoyens. Cela est le cas de Selma Hellal et Sofiane Hadjadj des éditions Barzakh, qui tentent "de garder le cap et de continuer à croire qu'il faut, encore, proposer au lecteur algérien des histoires et des images qui disent le réel sans fard mais avec poésie. Et nourrir ainsi notre imaginaire commun". À cet effet, ils viennent de publier trois ouvrages qui "disent, chacun à sa manière, une part d'Algérie : ancienne ou contemporaine, interrogeant l'histoire intime ou l'architecture de nos territoires, racontant avec humour les marges négligées, oubliées de la société". Ces titres qui feront sans conteste le bonheur de plus d'un sont les beaux-livres Tlemcen ou les lieux de l'écriture, composé de photographies et textes de Mohammed Dib ; Fernand Pouillon et l'Algérie. Bâtir à hauteur d'homme, photographies de Daphné Bengoa et Léo Fabrizio et texte de Kaouther Adimi, ainsi que le roman Un jour idéal pour mourir, de Samir Kacimi (traduit de l'arabe par Lotfi Nia). À l'occasion de la parution de ces livres, les éditeurs ont animé une rencontre lundi à la librairie L'Arbre à Dires (Alger), durant laquelle ils sont revenus sur ces nouveautés ainsi que sur les différents problèmes qui touchent la culture en général et l'édition en particulier. Pour Sofiane Hadjadj, éditeurs, libraires et auteurs sont "abandonnés à leur sort" et "doivent se débrouiller avec les moyens du bord, c'est-à-dire presque rien". Cette situation est notamment due à l'absence de communication et d'implication des institutions publiques. Ces dernières qui semblent ne pas se "préoccuper" du devenir de ces acteurs culturels est un fait "démoralisant". "Ils devraient faire quelque chose ! Le moral parfois est plus important que l'aspect financier. Dans le monde entier, il y a des budgets pour la culture, si elle n'est pas soutenue, nous ne pouvons pas exister !", a-t-il martelé. Il a appuyé ses propos en citant pour exemple les répercussions de l'annulation du Salon international du livre d'Alger, l'un des évènements les plus rentables pour les maisons d'édition. "De fin août jusqu'à novembre, il y a près de 200 titres de littérature générale publiés. Cette année, il y a eu seulement une dizaine !", a-t-il informé. Et cette situation est "très grave" car il y a "un assèchement spirituel, intellectuel et culturel pour les citoyens. Nous ne pouvons nous contenter de livres importés ou de lire sur internet". À ce propos, il a souligné que depuis dix ans il y a un réel mouvement éditorial ; de vraies maisons d'édition proposent des auteurs et des romans... "C'est dramatique que cela n'alerte pas les institutions. Certes, il y a une crise économique et sociale, mais il faut aussi de l'argent pour ‘manger' intellectuellement." Des solutions pour sortir du marasme Afin de sortir de cette impasse, Selma et Sofiane ont réfléchi à diverses initiatives, car il faut de la trésorerie pour payer les salaires et rembourser les dettes. Parmi ces solutions, l'organisation d'une braderie de livres dans plusieurs librairies du pays. Cette opération qui s'est tenue en octobre a permis aux férus de lecture d'acquérir des titres à petit prix et aux éditeurs de souffler un peu. À ce sujet, Mme Hellal a indiqué qu'après l'annulation du Sila, ils ont pensé à liquider le stock d'invendus : "Nous nous sommes dit : galvanisons notre énergie et proposons cette opération. L'enthousiasme du libraire Omar Cheikh de Tizi Ouzou a précipité les choses. Nous sommes contents que cela ait été suivi par Apic et Koukou. Au printemps, nous pensons à organiser une autre braderie." Cette manifestation, qui a eu un retour positif, a donné à réfléchir aux initiateurs, car "nous pouvons travailler seuls. Les gens veulent continuer et réaliser des projets, il y a de nombreux projets que nous voudrions réaliser avec les éditeurs", a annoncé Hadjadj. À ce propos, il a proposé un salon dans les librairies où se tiendront des rencontres ou encore un mini salon dans le boulevard sous des chapiteaux "mais il faudrait obtenir des autorisations", l'un des soucis majeurs des acteurs culturels de différents domaines : la bureaucratie. Dib, Pouillon et Kacimi Concernant les ouvrages qui viennent de paraître, celui de Fernand Pouillon et l'Algérie. Bâtir à hauteur d'homme, photographies de Daphné Bengoa et Léo Fabrizio et texte de Kaouther Adimi, sorti depuis un an en France, est une coédition avec la maison franco-suisse Macula. Le retard est dû au "temps de l'importation, puis la pandémie a accentué les choses". Quant à Tlemcen ou les lieux de l'écriture, composé de photographies et de textes de Mohammed Dib, est une coédition Images plurielles (Marseille), il a été édité pour la première fois en 1994. Cet ouvrage présente des photographies prises à Tlemcen en 1946 par Dib à l'âge de 26 ans. Le texte sera rédigé par l'écrivain en 1993, soit 50 ans plus tard. "Ce sont autant d'instantanés d'une modernité saisissante qui présentent – pour la première fois – le regard qu'un jeune Algérien porte sur la réalité de la vie durant la colonisation." Le roman de Samir Kacimi, deuxième livre édité par Barzakh après L'amour au tournant, revient sur Halim Bensadek, un journaliste longtemps au chômage, qui décide à l'âge de 40 ans, par suite d'une déception amoureuse, de se suicider...
Hana M. Fernand Pouillon et l'Algérie. Bâtir à hauteur d'homme, 192 pages, 3 600 DA. Tlemcen ou les lieux de l'écriture, 144 pages, 2 200 DA.Un jour idéal pour mourir, 122 pages, 600 DA.