À la veille des examens officiels, le conflit opposant les syndicats autonomes au ministère de l'Education nationale se corse, après deux ans de trêve sociale où la situation dans ce secteur n'a pas cessé de se dégrader. Le dialogue social semble être dans une impasse. À la veille du sit-in auquel ont appelé plusiseurs syndicts autonomes, le ministère de l'Education nationale hausse le ton et met en garde. Dans un communiqué rendu public, hier, le département de Mohamed Ouadjaout a menacé, en des termes à peine voilés, les organisateurs de cette nouvelle action de protestation, en leur rappelant la législation régissant l'exercice du droit syndical et les obligations professionnelles auxquelles sont soumis les travailleurs de l'éducation nationale. "Au moment où le ministère de l'Education nationale poursuit ses efforts (...) à travers l'organisation d'une série de rencontres bilatérales programmées entre le 17 et le 29 mai, pour prendre en charge les revendications des professionnels du secteur", le ministère de l'Education s'est dit "surpris par les appels émanant de certaines organisations syndicales pour l'organisation d'actions de protestation et le boycott de toutes les activités administratives et des examens officiels", relève le ministère dans son communiqué. Le ministère s'est dit "enregistrer avec regret, étonnement et mécontentement ce genre d'appels, lesquels sont un dépassement flagrant et une violation de tous les cadres juridiques", ajoute le texte, soulignant que le recours à la grève ou à d'autres formes de protestation pouvant perturber le bon fonctionnement de l'enseignement et "hypothéquer" l'avenir des enfants scolarisés sont "en opposition avec les lois de la République". Et d'insister sur le caractère "illégal" de cette action, comme déclaré par la justice qui a ordonné sa suspension, tout en renouvelant la disponibilité du ministère de tutelle à "poursuivre le dialogue" avec les partenaires sociaux. Contacté par téléphone, Meziane Meriane, coordinateur du Syndicat national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Snapest), a dénoncé la réaction du ministère de l'Education à l'appel des syndicats autonomes, daté du 18 mai dernier. "Il ne reste que les menaces", ironise-t-il, allusion au communiqué en question, estimant qu'"au lieu de s'attaquer aux conséquences de la crise, le ministère devrait s'attaquer aux causes". Pour le responsable du Snapest, le recours à la contestation "est une réaction légitime des enseignants, dont les salaires n'ont pas été revalorisés depuis 2012, alors que le pouvoir d'achat ne cesse de s'éroder". Tout en dénonçant "la réaction jusqu'au-boutiste du ministère" de l'Education, qu'il accuse d'être "responsable de ce marasme", Meziane Meriane soutient également qu'"au lieu de ces menaces, il faut aller vers un véritable et sincère dialogue social" avec les différents acteurs du secteur. "Il y a des mesures urgentes pour améliorer le pouvoir d'achat des enseignants", prône-t-il encore, regrettant le fait que les dirigeants du secteur "ne se projettent pas sur le long terme" et préfèrent continuer dans "la fuite en avant", avant de conclure en parlant des responsables du secteur de l'éducation nationale : "Ils ne veulent pas parler de la déconfiture économique. Car, le dire, c'est s'attaquer au pouvoir politique !" Pour sa part, le président du Syndicat autonome des travailleurs de l'éducation et de la formation (Satef), Boualem Amoura, a dénoncé cette politique de la carotte ou du bâton, en parlant du communiqué du ministère qu'il a qualifié de "réaction tardive" par rapport à l'appel au sit-in des syndicats. "C'est un discours menaçant et provocateur alors qu'ils nous parlent de dialogue !", a-t-il qualifié, ajoutant que "ce type de discours est destiné à la consommation médiatique et à tromper l'opinion publique". Selon Boualem Amoura, joint par téléphone, "au moment où nous revendiquons une amélioration du pouvoir d'achat, eux nous parlent du statut particulier qui ne réglera pas l'érosion du pouvoir d'achat". Un point de vue partagé par M. Meriane, qui a manifesté le regret face à des années de travail sur le texte du statut particulier pour qu'à la fin il ne soit pas appliqué. En somme, les syndicats maintiennent leur appel au rassemblement de protestation d'aujourd'hui.