Résumé : L'oncologue lui donne des conseils avant qu'elle ne parte. Latéfa ne se sent pas bien. Est-ce l'effet de la chimio ou le fait de savoir qu'il y a des malades qui ne bénéficient pas de soins ? Pour une raison ou une autre, est-elle devenue plus sensible aux malheurs des autres ? En tout cas, elle projette d'aider son prochain. Sa mère lui apporte un jus de citron. C'est l'occasion pour Latéfa de s'ouvrir à elle, elle parle de la détresse des femmes qui sont livrées à elles-mêmes lorsqu'elles osent dénoncer leurs maris. Lorsqu'elles ne meurent pas sous leurs coups. -Ton père t'aidera à lancer le projet, promet Houria. Créer une association, demande de l'énergie et du temps ! Ce n'est pas le moment que tu gaspilles ton énergie ! Mais si tu y tiens encore après tous tes traitements, on te soutiendra ! Moi, je n'y connais rien, mais ton père a du temps libre ! Cela l'occupera ! -Oui, tu as raison ! Chaque chose en son temps. Et là, en ce moment, je suis fatiguée. Je vais me reposer un peu. Malgré le traitement contre les vomissements, Latéfa vivra mal cette première cure de chimiothérapie. Les bons petits plats sains ne l'aideront pas à récupérer rapidement. Elle passe le plus clair de son temps au lit et ne sort plus dehors. Elle refuse les visites, elle fait peine à voir. Ses frères et leurs petites familles la soutiennent comme ils peuvent, mais comme elle reste dans sa chambre, ils finissent par espacer les visites. Hosni est aussi revenu d'Oran et il est le seul avec qui elle passe du temps. Houria ne comprend pas pourquoi elle est si proche de son demi-frère, elle voudrait qu'elle ait le même lien avec ses fils. Latéfa ne se confiait pas à eux. Ils l'ont bien invitée à sortir, mais elle a refusé, prétextant la fatigue. -Ma chère, tu n'as qu'un choix ; soit tu viens, soit tu viens !, propose-t-il sur un ton sérieux et sans appel, lui arrachant un sourire et un soupir. -Je suis fatiguée... Une autre fois, dit-elle alors qu'il la force à se redresser. Je t'en prie ! -Non, il faut que tu sortes ! L'oncologue n'a pas dit de t'enfermer dans ta chambre ! Je refuse de te voir au lit, vingt-quatre heures sur vingt-quatre ! C'est mauvais pour ton moral ! Et même pour le mien ! Fais-moi plaisir ! -Je suis fatiguée... Je t'en prie ! Mais Hosni refuse de l'écouter. Il ouvre le dressing et choisit un manteau en laine. Il la force à se lever et le pose sur ses épaules. Il ajuste la capuche, sur sa tête avant de prendre sa main. Leurs parents sont surpris de la voir descendre, prête à sortir. Da Ali regrette que Hosni habite si loin. Il est le seul qu'elle écoute. Houria est émue jusqu'aux larmes. Elle voudrait les accompagner. -On ne sait jamais ? Si elle se sent mal, qu'est-ce que tu feras ? -Je la ramènerais à la maison ! Mais ne t'inquiète pas pour elle, dit Hosni. J'en prendrais soin ! -Attends, elle est en pantoufles ! Je vais chercher des mules ! -Pas besoin, répond Hosni. Ne vous inquiétez pas pour nous ! On n'ira pas bien loin ! On va juste à la mer. Latéfa lui demande de l'emmener à une plage où elle n'a pas l'habitude d'aller afin de ne pas rencontrer des connaissances. Ses employées étant habituées à ce qu'elle s'absente pendant des semaines, ne se posent pas de questions. Lila est chargée de tout superviser en attendant son retour. Elle l'appelle tous les jours, mais Latéfa décroche rarement. Lila respecte son besoin d'être seule. Quant à la famille éloignée, ils ignorent qu'elle est malade. Si l'un d'eux avait ébruité sa maladie, les visites et les coups de fil n'auraient pas arrêté. Elle ne supporte pas qu'on lui demande comment elle allait. Cela est visible qu'elle est mal. Hosni achète des fruits et du jus avant de louer un parasol et des chaises longues. Ils s'installent au bord de la mer, le vent ramène des vagues à quelques mètres d'eux. -Quand tu iras mieux, on fera le tour du pays, on s'arrêtera dans chaque wilaya ! On goûtera aux plats traditionnels ! -Inchallah khoya, murmure-t-elle. Cela ne risque pas d'arriver avant un bout de temps. Je n'ai plus d'énergie, plus aucune envie... -L'envie reviendra... Il suffit juste d'écouter ton cœur, la conseille-t-il. Et de demander ! Tes désirs sont des ordres ! -Je n'ai envie de rien... Juste de me retrouver... Elle ne le lui dit pas, mais elle évite de se regarder dans la glace et lorsqu'elle prend sa douche, c'est à peine si elle touche les cicatrices. Elle ne se supporte pas. Quant à montrer ce qui est advenu de sa poitrine, cela n'arrivera jamais de son vivant. Pas même à sa mère ! -Aie la Foi, sœurette ! Un jour, tu redeviendras comme avant... Et si tu le veux, tu réaliseras tous tes projets ! Il te suffit de mettre un pied devant l'autre pour arriver où tu veux ! Fais-le pour toi ! Fais-le pour nous ! Chaque jour est un combat ! Tu le gagneras...Tu as vu, j'ai tout laissé en plan pour être avec toi ! Et cette fois, c'est moi qui t'emmène en chimio ! Avec moi, tu ne baisseras pas les bras !
À SUIVRE [email protected] Vos réactions et vos témoignages sont les bienvenus.