Poursuite à Addis-Abeba des travaux du 38e sommet de l'UA    Des auteurs algériens et européens animent à Alger les 15e Rencontres Euro-Algériennes des écrivains    La délégation parlementaire algérienne rencontre la présidente de l'UIP    Le Salon du e-commerce « ECSEL EXPO » du 22 au 24 février    Au service de l'Afrique…    Justice pour les Africains !    Victoire de l'Erythréen Maekele Milkiyas    Le ministre de la Santé reçoit une délégation du SNPEP    Les dossiers non résolus de l'occupation coloniale    Tlemcen: exploiter les atouts des zones frontalières algériennes pour réaliser le développement et investir dans le patrimoine culturel    38e sommet de l'UA: l'Angola prend la présidence de l'Union pour 2025    Salon International de l'Industrie et de l'Exportation à Oran: signature de 45 accords de partenariat    L'ambassadeure Selma Malika Haddadi élue vice-présidente de la Commission de l'UA    Boudjemaa se réunit avec les présidents et les commissaires d'Etat près les tribunaux administratifs d'appel et administratifs    Annaba : la Médiature de la République organise un séminaire régional dédié à l'amélioration de la relation administration/citoyen    Ramadhan 2025: ouverture de 565 marchés de proximité à travers le pays    Equitation: Faouzi Sahraoui élu à la tête de la Fédération équestre algérienne    Semaine nationale de la prévention: lancement des activités à partir de dimanche    Organisation de la 9e édition du salon international "Plast & Printpack" du 24 au 26 février à Alger    Exposition nationale du livre à Oran : vers la création à l'ANEP d'une plateforme numérique pour les auteurs    Djamaa El Djazair : début des préinscriptions aux cours d'enseignement coranique à partir de ce samedi    Pluies orageuses attendues dimanche sur des wilayas du sud-ouest du pays    Maîtriser la clef de voute du nouvel ordre mondial, les nouvelles technologies de l'information    un cri du cœur pour les Jardins Broty    Croissant-Rouge algérien Lancement à partir de Blida de la campagne de «Solidarité Ramadhan»    La Russie a réduit sa production de 27.000 bpj en janvier    «Il faut une transformation à grande échelle au Sahel »    Al Qods : Des colons juifs prennent d'assaut la mosquée Al-Aqsa    Le roi Charles III reçoit les leaders musulmans et juifs après les «Accords de réconciliation»    Le fair-play a élevé le niveau de la rencontre    Adoption des bilans de l'exercice 2024    Ouverture à Batna de la 9e édition    Ballalou préside un atelier du comité scientifique    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025: victoire de l'Erythréen Maekele Milkiyas    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025: 78 coureurs au départ de Boussaâda    Espagne: l'Europe est appelée à contraindre le Maroc à mettre un terme au trafic de drogue        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



De la difficulté d'être libre et d'accepter la liberté d'autrui
L'AUTRE ALGERIE
Publié dans Liberté le 10 - 02 - 2022


Par : Kamel DAOUD
ECRIVAIN
Il est si difficile de s'exprimer en France en tant qu'Algérien. C'est-à-dire dans les médias. Non tant à cause du verrouillage des thèmes proposés à chaque fois (colonisation, dictatures, islamismes), mais à cause des Algériens de France, d'ailleurs, d'Algérie. Pas tous, certains, virulemment. En France, les médias sont dans leur rôle, leur confort ou leur pente : simplification, curiosité pour un pays fermé (l'Algérie), volonté de comprendre ou de consolider des préjugés, professionnalisme et exploration, erreurs et admiration.
Le souci, c'est l'Algérie : comment en parler en France ? Comment dire ce qui ne se dit pas en général à cause de la censure communautaire ? Comment ne pas jouer aux rôles impartis par l'identité ou l'histoire des siens ? Comment ne pas céder à l'injonction de la représentativité, de la délégation, de la guerre imaginaire ? Sur un plateau télé, au maquillage déjà, on sent son propre visage devenir la pierre de ses inquiétudes, les mots s'enfuir, bifurquer. On se sait épié, attendu. On devine que la réaction sera violente, l'insulte vaste et la "e-meute" électronique féroce. Personne ne sera content car chaque clan a sa guerre à faire et à refaire à la France et veut que vous exprimiez ses positions. Les vôtres ? Non, jamais.
La parole n'est pas libre en Algérie à cause d'un régime qui ne peut le concevoir, et d'une hétéroclite opposition, ravagée par l'entre-soi, l'hyper-urbain algérois et la prise en otage par les suprématistes, les identitaires et les aigris des vieux courants politiques ou de l'idéalisme inquiétant. On n'a jamais été libre et on ne sait pas l'être ni l'accepter et cela se voit dans les manières du régime, dans les us de ceux qui s'opposent à lui, à vous, à moi, à chacun qui ne court pas dans le sens de l'orthodoxie ambiante. Le régime est un parti unique et l'opposition, souvent, aussi.
Le 22 Février 2019 a libéré la parole, mais aussi ceux qui vous la refusent.
C'est dire combien il est difficile de s'exprimer en Algérie à cause des intolérances, des injonctions de ceux qui affirment se battre pour la liberté mais vous refusent la vôtre. À cause d'un régime qui croit au monologue comme expression nationale. Et à cause de l'Histoire : ne pas être libre et être intolérant à la liberté d'autrui sont désormais une culture.
En France, c'est pire : la France d'aujourd'hui est difficilement accessible à la nuance, comme le reste du monde. L'exotisme est une pratique dans le traitement médiatique du "Sud" (dictateur méchant, peuple victime et opposant martyr : le triptyque du journalisme off-shore). Mais aussi le reste : les Français d'origine algérienne ont leurs convictions et leur douleur et leurs erreurs ; les Algériens de France ; les Algériens d'Algérie. Les morts, les exilés, les revenus, les refoulés, les convertis à l'Arabie et à la Turquie, les hirakistes numériques, les libérateurs de la Palestine virtuelle et les voleurs de l'amazighité, ou de l'islamité ou de de la Guerre de libération, les obsédés du remake de la décolonisation et les silencieux qui n'ont qu'une télécommande et une mosquée pour voyager dans le monde et au-delà. Comment concilier tous ces peuples ? En étant soi-même : exprimer ses opinions, dire ce que l'on craint et ce que l'on pense, avancer sans s'abaisser et dire sans reculer.
La liberté, la libération, commence par soi-même. À contre-sens. Sans moyen autre que soi-même, sans attendre le selfie ni l'éloge, l'immédiat partage ou la compassion. La liberté est une inquiétude, un pari, une façon de voir et d'y tenir.
Quid des interprétations, des procureurs des réseaux sociaux ? De ceux qui retiennent une phrase de toute la vie d'autrui ? De la grossièreté et de la diffamation ? Rien. L'Algérie d'aujourd'hui est piégée entre un régime qui ne sait pas se renouveler et se cramponne à la mystique refroidie de la sécurité et de la stabilité, et une opposition piégée par des activistes, qui a choisi les écrans aux villages de l'Algérie, qui a la fois se réclame du victimaire à l'international mais qui vous accuse d'être binational. Entre l'injonction de l'autorité, ses excès, ses prisons et ses incompétences, et ceux qui disent s'opposer mais qui ne sont qu'une forme du pouvoir sans le pouvoir pour le moment, qui cherchent une vengeance et pas à bâtir, qui veulent régler une rancune pas aller vers demain, qui mentent dans les médias pour croire lutter contre les mensonges du régime, etc.
Algérie qui se tait, prudente et réaliste, humble et méfiante envers le vide et les idéalismes, qui ne croit pas le "pouvoir" ni ceux qui disent s'y opposer et qui attend qu'on vienne la visiter village par village et gagner sa confiance.
Voilà. Après la libération, la liberté n'est pas encore une culture. Ni chez les uns ni chez les autres. Elle fait encore peur et provoque la prison chez le régime et la diffamation et l'insulte chez beaucoup de ceux qui disent s'opposer à lui. Mais elle est à défendre. En soi d'abord. Et beaucoup, dans l'Algérie muette, résistent et construisent au lieu de juger, moquer ou pleurnicher. Avancent sans se prendre en photo. Jaugent de la terre à chaque pas. Travaillent.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.