Le secteur de la justice traverse une zone de turbulences dans l'antique Cirta. C'est un véritable feuilleton qui vient de commencer. Ainsi, dans un premier registre, une trentaine de magistrats affiliés à la cour de Constantine dont des procureurs, des juges d'instruction et des présidents de chambre ont brisé, vendredi dernier, le mur du silence à travers un communiqué-pétition dans lequel ils dénoncent aussi bien la situation dans laquelle ils exercent leur métier à Constantine que les conditions générales de l'exercice de la fonction de magistrat dans le pays. Les magistrats, au nombre de trente-cinq, dénoncent plus particulièrement les conditions de leur notation et évaluation par leur hiérarchie. Ils posent aussi le problème de certains avantages telles les prises en charge lors des sessions criminelles et la distribution des “bons d'essence” qui, selon eux, n'obéissent pas à des règles d'équité. Dans leur missive, ces magistrats de Constantine reviennent à la charge en dénonçant la réactivation du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) dans sa composante actuelle. Ils lancent un appel à leurs collègues les invitant à ne pas répondre aux convocations émanant du Conseil supérieur de la magistrature tout en appelant leurs confrères siégeant dans cette institution à se retirer tant qu'il est encore temps pour sauver... “leur honneur”. Ce sont les mêmes revendications portées par le Syndicat national de la magistrature dont l'assemblée générale à Constantine, l'année dernière a été l'un des moments forts de son existence. Dans un deuxième registre, un collectif d'avocats près la cour de Constantine, observe, depuis plus d'un mois, un véritable boycott des séances du tribunal de Ziadia, dépendant de la cour de Constantine, lors des affaires traitées par l'un des magistrats comme riposte à certains agissements de ce dernier. Enfin et dans un troisième registre, l'histoire de la légitimité de l'actuel bâtonnat de la région de Constantine fait l'actualité locale. Ce week-end, une information a circulé dans les rédactions locales selon laquelle une décision du Conseil d'Etat venait de rendre caduques les dernières élections qui ont reconduit l'actuel bâtonnier dans son poste. Le Conseil d'Etat vient de prononcer la nullité des dernières élections qui ont reconduit Me Lenouar à la présidence du bâtonnat de la région de Constantine qui regroupe les quatre plus importantes wilayas de la région est du pays, à savoir Constantine, Mila, Skikda et Jijel. L'opération de renouvellement du bâtonnat de Constantine, qui s'est déroulée en deux tours, a été houleuse et a fait couler beaucoup d'encre. Aux dernières nouvelles, cette information a été récusée par les proches de Me Lenouar qui s'étonnent d'une telle “rumeur” en rappelant que le Conseil d'Etat siège et délibère selon une procédure qui n'a jamais été engagée à ce jour. Ils concluent : “Si une requête a été déposée par certaines personnes contre l'actuel bureau du bâtonnat, aucun membre de ce dernier n'a été entendu devant une quelconque chambre de ce Conseil”. Montrés du doigt, les magistrats n'ont jamais cessé d'être accusés de tous les maux. Le simple citoyen découvre chaque jour, et à ses dépens, qu'une grande partie de ces faits ne sont pas de simples ragots mais des vérités. Le grand coup de balaie, effectué par Ouyahia il y a deux ans, a certes débusqué beaucoup de brebis galeuses comme il s'en trouve dans toutes les professions, seulement, et comme dans tout protocole de traitement, des effets secondaires sont apparus. Il est question, aujourd'hui, de mener à terme la thérapie en traitant dans la sérénité et la transparence (y compris médiatique) les recours des magistrats suspendus et licenciés pour éviter qu'il y ait des boucs émissaires et que des corrompus profitent du statu quo et crient à la hogra pour devenir des victimes. Il est plus que jamais admis que si les réformes doivent être longuement réfléchies, elles doivent être exécutées avec célérité. Le cas contraire, c'est le retour de manivelle et ce sont d'éventuels assainissements, pas forcément dans le secteur de la justice, qui sont d'avance discrédités auprès de l'opinion publique. M. K.