Le Conseil de l'ordre des avocats d'Alger a décidé le boycott de la nouvelle cour jusqu'à “satisfaction des revendications”, notamment un espace et un parking pour les avocats. Sur le plan du principe, je ne peux qu'être solidaire avec les décisions du conseil. Sur le fond, je constate que les préoccupations de la majorité des avocats ne sont pas clairement formulées par le conseil. Certes, il faut des parkings et des espaces réservés aux avocats à l'intérieur de chaque juridiction. Mais il faut peut-être rappeler que la plupart des avocats, notamment les jeunes, ne possèdent pas de véhicules, et que ces mêmes avocats n'arrivent pas, à cause du “monopole”, à avoir une constitution par mois. À quoi sert d'accentuer la grève sur ces questions ? J'estime que le problème fondamental réside dans le statut de l'avocat qui n'arrive pas à voir le jour à cause des ambitions personnelles. Ce statut doit prévoir l'élection du bâtonnier par l'assemblée générale et pour un seul mandat, et faire de l'avocat un véritable partenaire de la justice, en lui permettant dans les textes et les pratiques de concourir à “l'œuvre de justice, au respect du principe de la primauté du droit et à la garantie de la défense des droits et libertés des citoyens”, comme le stipule l'article 1 du statut actuel. Or, les conditions de garde à vue, de l'instruction, les problèmes d'expertise et le nombre d'affaires enrôlées pour chaque audience (jusqu'à 300 dossiers) ne permettent pas à l'avocat algérien de jouer son rôle pour imposer un procès équitable selon les normes internationales. L'exécution de décisions de justice demeure le problème principal des justiciables. Voici quelques points de réflexion pour asseoir nos revendications futures. L'arrestation d'un confrère au tribunal de Rouiba sur ordre du président d'audience (rapportée par la presse) ne constitue pas seulement de la part de ce magistrat une faute grave qui doit être sanctionnée rapidement par le Conseil supérieur de la magistrature, mais aussi un délit d'arrestation arbitraire prévu et puni par le code pénal. Et ce, dans le cas où notre confrère déciderait de porter plainte. La loi prévoit : “Dans le cas où les injures ou irrévérences envers le juge seraient commises par l'avocat, rapport en est fait immédiatement par le magistrat au ministère de la Justice qui saisira la commission mixte de recours...” Un président d'audience ne peut donc en aucun cas ordonner l'arrestation d'un avocat. Voici un cas très grave de violation de la loi que je dénonce énergiquement. Notre force réside dans notre solidarité et dans l'indépendance du barreau, et non dans les appels répétés au président de la République. Enfin, j'estime que le dialogue entre l'Union des barreaux et le ministère de la Justice demeure le meilleur moyen pour régler les problèmes de la profession. Alger, le 18 juin 2007