Le ministère de l'Education a sanctionné les proviseurs dont les établissements ont obtenu de faibles taux de réussite au baccalauréat 2007. C'est dans la logique de la responsabilité que les chefs de structures soient comptables de leurs résultats. La surprise est dans le caractère inopiné de la sanction. La surprise, en plus de confirmer l'improvisation méthodologique de la tutelle, est révélatrice d'une conception productiviste de la fonction scolaire. Si l'on doit évaluer les écoles, collèges et lycées sur le nombre d'élèves ayant réussi aux examens de sixième, brevet et baccalauréat, il eût fallu que de tels objectifs quantitatifs soient préalablement conçus et qu'ils fussent rapportés aux ressources pédagogiques : structures, supports didactiques et personnel. Sinon, comment demander des comptes sur des résultats à un directeur — et à lui seul — qui n'a pas prise sur la quantité et la qualité de ses ressources matérielles, conceptuelles et humaines ? Le résultat scolaire traduit l'aboutissement d'un processus systémique. Ce contexte d'apprentissage, politiquement conçu, s'impose au directeur. Il n'a alors que le choix de composer avec un fait accompli. À l'examen d'entrée en sixième, où l'on a dû dispenser les élèves du français — chose inconcevable dans un examen “national” —, comment comparer le taux de réussite des écoles qui ne disposaient pas d'instituteurs dans la matière avec ceux des écoles qui bénéficiaient de ces enseignants ? Même question pour le BEM dont on a dû reconsidérer la part dans le passage en secondaire ultérieurement à la clôture de l'année scolaire. Si la part des éléments externes à l'établissement est à ce point déterminante, peut-être faudrait-il préalablement évaluer cette portion de responsabilité de chacun des centres de décision national, régional, local et au niveau de l'unité scolaire dans les résultats scolaires. Un tel système d'évaluation, plus global, serait plus utile puisqu'il dégagerait les forces et les insuffisances de chacun des niveaux d'intervention. Mais au lieu de cela, c'est plutôt dans un esprit d'autoévaluation que le discours politique est produit : “Les résultats seront en hausse”, prévoit-on chaque année ; “la réussite est de tant de %”, clame-t-on après un bac pourtant déprécié par les fuites et les hésitations qui ont marqué les opérations de synthèses des notes. On semble reprocher aux directeurs qui ont “échoué” de ne pas trop contribuer à cette autoglorification statistique. Si l'Ecole devait être évaluée comme une entreprise de production de diplômes, ce serait incohérent qu'elle se les délivre elle-même et qu'elle s'auto-examine alors. Notre Ecole, otage idéologique et politique, enseigne plus de dogmes que de connaissances. Elle n'a même pas pu prémunir tous ses élèves contre le chant des sirènes meurtrières. Elle les a même peut-être fragilisés, facilitant ainsi “l'égarement” de certains d'entre eux. Dans quel bilan mettre ce passif irrécupérable ? Evaluer les directeurs d'établissement dans un système éducatif qui continue ainsi à échouer lamentablement, n'est-ce pas vouloir montrer l'arbre pour cacher la forêt ? Pour ne pas dire… le maquis ? M. H. [email protected]