Tizi Ouzou, un jour de semaine. Il fait drôlement chaud en cette fin de mois d'avril. 35 degrés à l'ombre. La ville grouille de monde avec l'habituel va-et-vient chaotique. Rue Lamali-Ahmed, 10h. C'est déjà l'embouteillage. Cette place jouxtant le CHU et le quartier les Genêts est devenue, l'espace de quelques jours, l'endroit idéal pour les trabendistes de tous bords délogés de force par les services de sécurité de M'douha, ils ont jeté leur dévolu sur cette avenue animée qui mène à l'université Mouloud-Mammeri. L'occupation des trottoirs et des lieux de commerce se fait dès 8h pour n'être libérés qu'aux environs de 18h. Tout se vend ici. Les vêtements, les appareils électroménagers, les livres, l'huile d'olive, les bananes… Un véritable souk. De prime abord, on est happé par des jeunes qui s'époumonnent à vanter la marchandise présentée. Plus loin, des gosses accroupis devant un sac en plastique étalent à même le sol des sous-vêtements pour femmes “made in Turkey”. D'autres proposent des postes-cassettes et des ustensiles de cuisine. La rue est toute la journée “pavée” de toutes sortes de marchandises. Les trottoirs sont squattés, parfois il faut jouer des coudes pour se frayer un chemin. “Ils viennent de Boumerdès, de Bouira et d'Alger. Ce ne sont pas de simples trabendistes. Ils se font exploiter par des grossistes moyennant un maigre salaire”, fait remarquer un commerçant. Il ajoutera : “Nous sommes victimes d'une concurrence déloyale du fait de l'activité informelle de ces indus commerçants qui pullulent sur la voie publique au su et au vu des pouvoirs publics qui ne font rien pour les arrêter. Cette situation se répercute sur le chiffre d'affaires de cette corporation. Certains louent à prix fort leurs locaux commerciaux”. L'APC de Tizi Ouzou leur a octroyé un espace au niveau du marché hebdomadaire. Seulement, cette proposition n'est pas du goût des trabendistes “l'endroit n'est pas intéressant, car éloigné de la grande foule et loin du centre-ville”, rétorquent sèchement ces derniers. “Nous n'avons rien, ni travail ni autre ressource pour vivre. Ce n'est pas par plaisir que nous faisons cela dans la rue sans assurance, sans sécurité, sans rien du tout. Nous savons que c'est illégal, que ça nuit aux commerçants légaux mais…”, tempête Rachid, 20 ans, vendeur à la sauvette. Traqués par les services de sécurité, les trabendistes de la rue Lamali sont, depuis leur “incursion” aux Genêts, dans le collimateur du comité de ce quartier populeux. Après plusieurs ultimatums, des groupes de jeunes sont passés à l'action le 23 avril dernier en décidant de les chasser. Les intrus ont fini par plier bagages, mais pour deux jours seulement. Les résidents, eux, menacent de sévir de nouveau. D'autres espaces publics sont squattés. La rue Zidane-Amar, communément appelée rue de la Paix, est envahie par les marchands de bananes. Au centre-ville, devant le marché couvert, c'est une station de taxis qui a été transformée en marché de fruits et légumes. Profitant de la situation générée par les événements de Kabylie, des énergumènes, obnubilés par le gain facile, semblent décidés à imposer leur diktat aux honnêtes commerçants qui voient impuissants, leurs clients détournés. A. T.