Pour les spéculateurs, et à la faveur d'une mercuriale aussi lucrative, l'attaque du mildiou n'aura été que le prétexte supplémentaire. Sur le marché du détail, Dame Pomme de terre n'ose pas encore descendre en deçà des 30 DA/kg. La pomme de terre ne descendra pas en deçà des 30 DA le kilogramme ! Faites un détour par la localité de Bouguirat et vous découvrirez les fondements d'une telle affirmation ! Vous y constaterez de visu, la sinistre spéculation dont fait l'objet ce produit agricole de large consommation. L'Etat sensé et censé mettre le holà aux dépassements et à l'anarchie sur la voie publique, brille par son absence. Du coup, c'est une horde d'intermédiaires et d'énergumènes de tout acabit, qui, depuis quelques semaines, a investi rues et ruelles de l'agglomération, pour vendre à d'autres intermédiaires des sacs de pomme de terre. Les premiers sont des ouvriers journaliers qui louent leurs “bras” aux patatiers pour l'arrachage de la pomme de terre, et qui, au retour des champs, reviennent avec des sacs de cinq à vingt kilos de tubercules, glanés ou souvent maraudés. Alors que le fellah qui y a engagé fonds et labeur a dû attendre près d'un trimestre pour arracher les 25-28 DA/kg, le journalier employé ne daignera jamais, quant à lui, céder sa “marchandise” en deçà des 22 DA/kilo ! Davantage moins peinard que ce dernier, le second intermédiaire ira l'offrir au consommateur à 30 DA, soit pas moins de 8 DA, nets d'impôt et souvent sans avoir ni soulevé, ni transbordé, ni déplacé le moindre sac ! “Précipité par les cours alléchants et le mildiou qui menace, l'arrachage de la pomme de terre bat son plein à Mostaganem. Il s'agit d'une récolte anticipée par la menace du désastre cryptogamique, mais également par le cours certainement alléchant avoisinant les 30 DA le kilo au prix de gros, offert au niveau de la parcelle. Un cours fort intéressant pour se débarrasser de sa production sans attendre la maturité complète. Cette saison, au bas mot, le manque à gagner serait de l'ordre des 10%, estime-t-on dans le milieu des patatiers. Alors que nombre de producteurs, non encore totalement remis de la ruine subie l'an dernier à la suite des attaques massives de leurs champs de pomme de terre par le mildiou, ont préféré déclarer forfait pour la plantation de l'arrière-saison, revoilà le spectre du redoutable champignon qui se profile devant les agriculteurs téméraires ayant tenté le pari de se rattraper ! Chez les techniciens de la protection des végétaux, l'alerte est au rouge. Deux avertissements ont été lancés à ce jour, à l'adresse des “patatiers”. On prodigue conseils et instructions techniques, mais les caprices du climat semblent s'en ficher éperdument ! La “ruine” hante les producteurs. Pour échapper au risque d'un nouvel échec, l'agriculture à haute teneur en empirisme offre une alternative : précipiter l'arrachage. Sur le bassin maraîcher mostaganémois, le vent de la panique a soufflé. Mais pour les omniprésents spéculateurs, et à la faveur d'une mercuriale aussi lucrative, l'attaque du mildiou n'aura été que le prétexte supplémentaire. Sur le marché du détail, Dame Pomme de terre n'ose pas encore descendre en deçà des 30 DA/kg. Quand le prix y est, la qualité et le rendement relèvent du souci secondaire. Provenant des parcelles les plus précoces, c'est une pomme de terre peleuse, presque à l'état d'albumen, qui est mise depuis quelques jours sur le marché à Mostaganem.Proposée aux environs des 30 DA, tout venant, au niveau de la parcelle et au marché de gros, la patate de saison aura le mérite d'avoir désamorcé la folie des prix qui s'est emparée, l'automne dernier, de ce produit agricole de large consommation. En l'absence de structures de régulation et de réels professionnels dans la filière, le marché de la pomme de terre demeure livré aux spéculateurs de tous bords. Ce sont ces spéculateurs qui décideront des quantités à mettre sur le marché. Le consommateur ne pouvant s'en abstenir achètera à tout va. Les services agricoles sont formels, ce n'est pas un problème de production puisque la pomme de terre est disponible sur le marché. Les responsables du commerce sont incapables de mettre un frein à l'anarchie. Les mandataires, officiels ou non, jongleront avec les prix et s'en laveront les mains. Le producteur se lamente de la pénurie des engrais, cause des faibles rendements obtenus, se plaint du déficit pluviométrique, et déplorera les tarifs exorbitants des intrants, et estimera dérisoires les cours auxquels sa production a été cédée aux intermédiaires. Aïn Defla n'a pas encore pris le relais de la récolte. Les prix ne fléchiront vraisemblablement pas de sitôt et les grimaces du consommateur devant l'étal des fruits et légumes ne s'estomperont probablement pas demain. M. O. T.