Les islamistes égyptiens ont été appelés à manifester samedi dernier en soutien au président Mohamed Morsi qui fait face à un mouvement de contestation grandissante de l'opposition laïque qui dénonce une dérive autoritaire depuis la publication d'un décret élargissant les prérogatives du chef de l'Etat. Morsi, issu des Frères musulmans, devait ratifier samedi le projet de nouvelle Constitution, qui a été approuvé vendredi par l'Assemblée constituante dominée par les islamistes, et devrait le soumettre à référendum d'ici quinze jours. La confrérie islamiste, la formation politique la mieux organisée du pays, et ses alliés salafistes du parti Al- Nour s'estiment en mesure de mobiliser suffisamment d'électeurs pour remporter le référendum. Les islamistes qui ont renoncé à se réunir place Tahrir pour éviter toute confrontation, devaient faire des rassemblements de samedi dernier une démonstration de force après la forte mobilisation des manifestants anti-Morsi ces derniers jours. Plusieurs milliers d'Egyptiens ont en effet une nouvelle fois participé vendredi à des manifestations au Caire, à Alexandrie et dans plusieurs autres villes dans le Delta du Nil et le long du canal de Suez. «Le peuple veut la chute du régime», ont scandé les manifestants rassemblés place Tahrir, symbole de la révolution de l'an dernier qui a renversé l'ancien président Hosni Moubarak. Les tensions entre la population et le nouveau chef de l'Etat sont montées d'un cran le 22 novembre dernier avec la publication d'un décret qui élargit les prérogatives de Mohamed Morsi. Ce décret empêche toute contestation des décisions présidentielles dans l'attente de l'élection d'un nouveau Parlement, ce qui ne devrait pas intervenir avant mi-2013. Le président égyptien, qui insiste sur le caractère temporaire du décret, affirme que le texte ne vise pas à concentrer les pouvoirs mais au contraire à les déléguer et éviter une politisation de l'appareil judiciaire. Deux personnes ont été tuées et plusieurs centaines d'autres blessées lors de manifestations organisées par les forces de l'opposition qui accusent Morsi de se comporter en dictateur. Dans une allocution télévisée jeudi soir, le chef de l'Etat a assuré qu'il n'y avait pas «de place pour la dictature.» Le projet de Constitution, qui compte 234 articles, maintient les «principes de la charia», la loi islamique, comme source principale de la législation, ce qui était déjà le cas sous Moubarak mais ce que refuse le camp laïc. Les adversaires du chef de l'Etat critiquent cette précipitation dans l'adoption d'une Constitution qu'ils jugent prise en otage par les Frères musulmans et leurs alliés. La nouvelle Constitution égyptienne stipule que le chef de l'Etat ne peut effectuer plus de deux mandats de quatre ans chacun. Le texte prévoit également une supervision par les civils de l'institution militaire, mais encore trop timide pour les détracteurs du projet. Pour déclarer la guerre, le chef de l'Etat devra, en plus d'obtenir l'aval du Parlement, demander l'avis du Conseil national de défense.