La tangibilité du terrain est bien plus complexe qu'il n'y paraît entre les pays exportateurs de pétrole. La Russie avec une production de plus de 11 millions de barils/jour en septembre de cette année affiche quand même une croissance nulle. L'Arabie Saoudite premier producteur mondial avec 11,5 millions de b/jour n'est pas mieux lotie avec les énormes sommes d'argent qu'elle dépense pour les équipements de son armée, et ses très coûteux soutiens aux guerres régionales en Syrie, au Yémen et en Irak. L'Iran après une résistance aux effets néfastes de l'embargo ne veut pas entendre parler d'un gel de la production ; ce pays a grandement besoin d'argent pour financer ses programmes d'investissement. En fait, depuis le dernier accord entre les pays membres de l'Opep en 2008, lorsque le prix pétrole avait fait une chute brutale passant de 150 dollars à près de 40 dollars, à aucun moment l'Opep n'a envisagé de réduire sa production ; c'est ce qui explique la qualification du rendez-vous d'Alger par les annonceurs «d'historique». L'Algérie qui n'exporte tout au plus qu'un million de barils/jour ne souffrira vraisemblablement pas de réduction de sa production. Une chance pour rééquilibrer son budget qui a réellement besoin d'un bol d'air. La part de la diminution arrêtée à Alger sera supportée par l'Arabie Saoudite. Les vrais enjeux de ces négociations au sein du cartel Opep s'apprécieront en novembre à Vienne. C'est dire que l'accord d'Alger est fragile, et les risques de le voir capoter par la philosophie de chacun pour soi sont réels, parce que le royaume wahhabite traverse une zone de turbulence budgétaire assez importante. Son déficit budgétaire record était de 98 milliards de dollars et prévoit 87 milliards de déficit en 2016. Depuis la mi-2014, l'Arabie Saoudite a puisé quelque 170 milliards de dollars dans ses réserves, tombées fin juillet à 560 milliards de dollars. Après avoir augmenté les prix du carburant, de l'électricité, de l'eau et autres services publics, Riyad a décidé cette semaine de réduire jusqu'à 20% les salaires des ministres, et les émoluments des membres du Conseil consultatif. En Algérie, la loi de finances 2017 ne prévoit pas de faire supporter aux riches, au corps diplomatique, aux membres des deux Chambres, ainsi qu'aux ministres une participation au financement des déficits enregistrés depuis 2014, à la suite de la baisse des revenus de la fiscalité pétrolière. Sellal compte s'en sortir avec la réforme de l'économie trop dépendante de la rente pétrolière. Combien de temps faudra-t-il pour réussir une mue de l'économie nationale ? Certainement des années, de trop nombreuses années et tant pis pour nous si nos enfants et les enfants de nos enfants en profiteront.