L'approbation par le Conseil des ministres , tenu le 15 novembre passé, du marché de réalisation de la ligne de chemin de fer Tindouf-Béchar constitue un signal fort pour le lancement effectif du gigantesque projet d'exploitation des mines de fer de Ghar-Djebilet. Deux entreprises algériennes, l'Anesrif et Cosider et une entreprise chinoise, Crcc, ont été chargées par le Conseil des ministres de la réalisation de cette nouvelle voie ferrée d'une longueur de 1.000 km. Pour accélérer la réalisation, le projet a été divisé en quatre tronçons. Le premier va de la ville de Béchar jusqu'au point kilométrique 200. Le second tronçon de ce point kilométrique à la commune d'Oum El Assel. Le troisième, va de cette dernière commune à la ville de Tindouf. Enfin, le dernier reliera Tindouf à la mine de Ghar Djebilet. Le lancement de ces quatre chantiers en même temps nécessitera la mobilisation d'importants moyens humains et matériels par les entreprises réalisatrices. Des milliers de postes d'emplois, directs et indirects, seront créés tout au long de la durée nécessaire à la construction. La décision historique prise par le Conseil des ministres ouvre ainsi la voie à la réalisation d'un rêve qui traine depuis au moins un demi-siècle, celui d'exploiter les gigantesques mines de fer de Ghar Djebilet et de Mecheri Larbi. Une fois achevée, la ligne de chemin de fer Ghar Djebilet-Tindouf-Béchar permettrait la production de pas moins de 40 millions de tonnes de minerais de fer. Les retombées de ce gigantesque projet vont complètement changer, sur le plan économique et social, l'ensemble de la région du Sud-Ouest algérien. Concrètement, le projet ne se résume pas seulement à la construction d'un chemin de fer et l'entame de la production dans les mines de fer. Il est question également de la construction de plusieurs unités de traitement du minerai pour l'enrichir et réduire sa teneur en phosphore. Plusieurs infrastructures seront implantées à Tindouf et à Béchar. Au mois d'avril de l'année en cours un accord entre le groupe minier algérien, Manal et le complexe sidérurgique Tosyali de Béthioua, a été conclu. Il vise la réalisation d'une unité de production de concentré du minerai de fer de Ghar Djebilet à Béchar. La future usine devrait produire un demi-million de tonnes de concentré de fer qui sera utilisé par le complexe sidérurgique de Tosyali à Oran. Au mois de juin 2023, le Gouvernement décide de son côté du lancement d'une étude de faisabilité concernant l'implantation d'une usine sidérurgique à Béchar. Cette dernière sera destinée à produire des rails et du profilé en acier à partir du fer de la mine de Ghar Djebilet. Un autre accord est attendu avec le complexe sidérurgique algéro-qatari de Bellara. L'ensemble de ces projets devraient fournir la totalité des besoins en fer des différentes usines sidérurgiques du pays. Une option qui permettrait de mettre un terme à la facture des importations du minerai de fer qui s'élève actuellement à 1,2 milliard de dollars. Et il n'y a pas que ces projets. En 2021, le ministre de l'Energie et des Mines, M. Arkab, a annoncé la prochaine relance de l'exploitation de la mine de manganèse de Guettara, située dans la jeune wilaya de Beni Abbès. Le manganèse est utilisé à 95% dans l'industrie sidérurgique. Ce minerai serait destiné à la future usine sidérurgique de Béchar pour servir comme alliage dans la production des rails de chemin de fer. L'exploitation de la mine de Guettara serait facilitée par le passage de la ligne de chemin de fer Béchar-Tindouf sur 178 km dans le territoire de la wilaya de Beni Abbès. Un peu plus au Nord, dans la wilaya de Béchar, plus précisément dans la commune de Boukais, des études d'évaluation de deux mines de cuivre ont été lancées pour déterminer la commercialité de leurs exploitations. Enfin, le Gouvernement vient de décider de la reprise de la production du charbon dans la mine de Menouna, près de Béchar. Et c'est un groupe algéro-turc qui est chargé de cette relance. Lors de la phase de démarrage, il est attendu une production de 10.000 tonnes de charbon par mois. Les réserves de ce gisement sont importantes. Elles sont estimées à 200 millions de tonnes. L'Algérie importe en moyenne 120 millions de dollars de dérivés de charbon annuellement. Ces importations servent surtout à alimenter le complexe sidérurgique d'El Hadjar en coke. Le prix d'une tonne de coke sidérurgique avoisine les 600 dollars. Mais à Kenadsa, il n'y a pas que la relance des mines de charbon, il y a aussi des projets d'énergie solaire. Dans le cadre du programme de réalisation de 2000 Mw d'énergie solaire à travers le pays, une station d'une puissance de 120 Mw est prévue à Kenadsa et une autre de 80 Mw à Abadla. Ces deux nouveaux projets viennent ainsi s'ajouter à celui de Béni Ounif doté d'une puissance de 50 Mw. Ces nouvelles infrastructures énergétiques viennent renforcer des capacités existantes en énergie solaire et éolienne de 33 Mw dans la wilaya d'Adrar. Tindouf compte déjà 20 Mw de puissance en énergie solaire, 9 autres megawatts dans la nouvelle wilaya de Timimoun et 5 à Reggane. Le lancement de ce gigantesque projet d'exploitation des mines de Ghar Djebilet et les investissements industriels qui vont avec nécessiteront énormément d'énergie (électricité, gaz naturel et carburants). Les wilayas d'Adrar et de Timimoun produisent déjà du gaz naturel et du pétrole. La raffinerie de pétrole de Sebaa, dans la wilaya d'Adrar, d'une capacité de 600 tonnes devrait répondre aux besoins en carburants des entreprises qui seront chargées de la réalisation des projets. A Béchar et de Tindouf, Sonatrach a réalisée ces dernières années de nouvelles découvertes de gaz naturel qui attendent l'exploitation. Par ailleurs, à Béchar et à Aoulef, dans la wialaya d'Adrar, deux grandes cimenteries d'une capacité totale de 2,5 millions de tonnes sont en activités depuis 2018. Elles seront appelées à répondre aux énormes besoins en ciment et autres matériaux de construction que généreront les grands chantiers qui seront lancés dans les prochains mois. Ces projets créateurs d'emplois dynamiseront inévitablement les secteurs du bâtiment, du commerce et des services dans ces wilayas. Cette nouvelle dynamique économique que va vivre la région aura également des retombées positives sur le secteur agricole. Les wilayas d'Adrar et de Timimoun comptent près de 35.000 hectares de terres agricoles en irriguées. Cette superficie sera renforcée par 50.000 nouveaux hectares grâce au programme de mise en valeur des terres lancés par le tout nouvel office de développement de l'agriculture industrielles en terre sahariennes. De son côté, la wilaya de Béchar comptabilise un peu plus de 20.000 hectares de terres agricoles irriguées. Un potentiel agricole qui sera appelé à répondre à la croissance de la demande en produits agricoles et alimentaire qu'entraîneraient les investissements miniers et industriels qui seront lancés. Par ailleurs la réalisation de la voie ferrée Béchar-Tindouf coïncidera avec l'achèvement de la route Tindouf-Zouerate en Mauritanie. Le transport des marchandises par voie ferroviaire du Nord du pays vers le Sud réduirait les coûts et rendrait les produits algériens plus compétitifs sur les marchés africains. La réalisation de l'ensemble de ces projets entraînerait une forte croissance de l'activité commerciale, du tourisme et des services. Incontestablement l'Algérie est à la veille du lancement du plus grand projet socio-économique, hors hydrocarbures, dans le Sud du pays depuis son indépendance.