Entretenue par le pouvoir égyptien comme un moyen de diversion, la campagne anti-algérienne, hystérique et comique à la fois, des médias égyptiens, se poursuivait, hier encore. Après son fils qui a traité les Algériens de «mercenaires» et de «terroristes», c'est au tour de Hosni Moubarak d'apporter sa contribution publique à la «troisième mi-temps» médiatique, que les Egyptiens veulent imposer après la défaite de leur équipe de football sur le terrain. Formellement, le président Hosni Moubarak s'est abstenu de citer nommément l'Algérie dans son discours devant le Parlement égyptien. Le discours a cependant été «orienté» par la furieuse campagne de conditionnement des esprits orchestrée par des dizaines de chaînes de télévision. Il se veut ferme voire menaçant. «Le bien-être de nos citoyens à l'étranger relève de la responsabilité de notre pays, nous nous assurons que leurs droits soient respectés et rejetons les violations (...) qui sont commises à leur égard». En soi, rien d'anormal dans le propos, tous les Etats au monde sont responsables de bien-être de leurs citoyens à l'étranger. Le problème est que les médias égyptiens sont les seuls à avoir vu un «massacre» à Khartoum, alors que toutes les informations, y compris celles communiquées officiellement par le pays hôte, évoquent un incident léger. Le choix de provoquer une «troisième mi-temps» est donc un choix politicien, froidement conçu et exécuté avec une outrance inégalée par les animateurs des télés égyptiennes. Elle sert à donner le change à l'opinion égyptienne et à forger une allure martiale au discours de Moubarak. «L'Egypte ne fera pas preuve de laxisme envers ceux qui portent atteinte à la dignité de ses citoyens», a-t-il déclaré. Cela mérite-t-il une réponse officielle algérienne... ? Non, car de toute évidence, on se trouve dans une entreprise de conditionnement de l'opinion égyptienne pour amortir le mauvais retour sur investissement politique de Gamal Moubarak, qui ne surfera pas sur la victoire de l'équipe égyptienne de football. Les soldats zélés des TV et le jeu des officiels Chez les animateurs des chaînes de télévisions égyptiennes - qui sont les porte-voix zélés de la campagne et non ses concepteurs - on observe qu'ils découvrent subitement que l'Egypte n'est pas le nombril du monde arabe. Ce n'était pas le cas depuis longtemps, mais ils semblent l'avoir ressenti à la faveur de la hargne des Algériens, touchés à la fibre sensible de la «hogra». D'où, la violence extraordinaire de la campagne et des insultes de bas étages que l'on peut encore voir et entendre sur les chaînes égyptiennes. Reste le jeu des officiels égyptiens et dans le cas actuel du clan des Moubarak. On se demandait hier, dans ces colonnes, «jusqu'où ira cette gestion, affligeante, de la troisième mi-temps égyptienne ?». C'était moins une question qu'une expression d'étonnement. Le pire où l'on peut arriver dans la dégradation des relations entre l'Algérie et l'Egypte serait une rupture des relations diplomatiques. Il n'y aura de guerre ni en mer, ni sur un quelconque désert. Et, au plan économique, l'Algérie a beaucoup moins à perdre que l'Egypte. Pourquoi dès lors, le pouvoir égyptien s'est-il engagé dans cette formidable entreprise de conditionnement guerrier de l'opinion égyptienne. Une intronisation brisée par le coup de pied fatal d'Antar Yahia La réponse est peut-être dans le discours même de Hosni Moubarak, qui s'en est pris nommément à l'Iran en le menaçant de prendre des mesures «pour faire face à la déstabilisation de la région pour préserver la sécurité nationale égyptienne laquelle est liée à la sécurité du Golfe». On peut donc supposer, alors que les pressions s'accentuent sur Téhéran, que le message de Hosni Moubarak sur l'Iran n'a rien de subliminal. La haine anti-algérienne, entretenue sur le mode de «l'affront fait à l'Egypte», sert à préparer l'opinion, par glissement, à des options belliqueuses mais contre des ennemis plus «proches» et plus «consensuels» puisqu'ils sont ceux des Occidentaux : les Iraniens. Pour amortir l'effet du ratage de la quasi-intronisation de Gamal Moubarak brisée par le coup de pied fatal d'Antar Yahia, le système égyptien va continuer à chauffer son opinion. Le second niveau - le plus important - de cette mise à cran est de préparer les esprits à une éventuelle guerre contre l'Iran qui commence à être envisagée par les Occidentaux. Il n'y a pas de perspectives «algériennes» dans cette monumentale manipulation. Par contre, dans une géopolitique régionale explosive où l'Egypte est un sous-traitant reconnu des Occidentaux, la manipulation des foules prend un peu de sens. Ce n'est bien entendu qu'une hypothèse... elle est la plus vraisemblable pour expliquer ce délire égyptien sciemment entretenu par le régime.