Faisant fi des conclusions des travaux de la réunion des «pays du champ» tenue la fin de la semaine dernière à Niamey, considérant que la complexité de la crise malienne demande une approche politique en vue de sa solution, le président intérimaire malien Dioncounda Traoré joue les va-t-en-guerre en voulant manifestement d'une intervention militaire dans le nord de son pays au motif selon lui que celle-ci est inévitable car il n'y aurait rien à négocier avec les rebelles dans cette zone. Dioncounda Traoré a fait sa déclaration alors justement que le ministre burkinabé des Affaires étrangères venait de prendre contact au Nord-Mali avec certains des acteurs locaux de la crise malienne et des notables représentatifs de la population de cette partie du pays. Des contacts qui ont fait apparaître que les interlocuteurs de l'émissaire burkinabé sont acquis à l'idée d'un dialogue et de négociations avec les autorités de Bamako, excluant la revendication de la partition du pays. Disposition conciliante dont même le groupe islamiste armé Ansar Eddine s'est déclaré animé. Il est indubitable que la « sortie » belliqueuse du président intérimaire malien a eu pour objectif de faire capoter la médiation burkinabé. La solution politique prônée par les « pays du champ » dont l'Algérie n'est pas de toute évidence inscrite dans l'agenda de Dioncounda Traoré. Celui-ci est rentré au pays après plus de deux mois d'un séjour parisien qu'il ne doit pas uniquement aux soins médicaux rendus nécessaires par la gravité de l'agression dont il a été victime dans le palais présidentiel à Bamako. Il ne fait aucun doute qu'il a attendu le feu vert français à son retour, lequel s'est effectué une fois que l'Elysée et le Quai d'Orsay ont finalisé à son intention leur feuille de route à suivre par les autorités maliennes pour la gestion de leur crise nationale. Dioncounda Traoré revenu au pays, la France fait le pressing pour l'option interventionniste qu'elle va remettre sur le tapis au Conseil de sécurité de l'ONU dont elle vient de prendre la présidence tournante pour un mois. La diplomatie française cherche à créer l'illusion d'un consensus régional et international en faveur de cette option en arguant de la menace d'un « Sahélistan » en voie d'instauration au Nord-Mali sous la coupe de l'organisation islamo-terroriste Aqmi. Oublieuse pourtant que sans mésestimer cette menace à laquelle la politique française dans la région n'est pas étrangère, les « pays du champ » s'en tiennent à une autre démarche pour la conter. Celle de convaincre les autorités maliennes que le préalable à une intervention militaire au nord du Mali consiste dans la réconciliation entre les autorités de Bamako et les populations de cette partie du Mali et de ce fait isoler Aqmi de celles-ci. Il semble bien que Dioncounda Traoré soit sous l'influence française réfractaire au dialogue avec quiconque est en rébellion contre l'autorité du gouvernement malien. Cet état d'esprit a été celui d'AT Touré, son prédécesseur déchu, et a conduit à la crise qui a consommé la partition du pays et à la destruction de l'Etat malien. En refusant d'admettre que le fond de la crise est d'abord et avant tout politique nécessitant un dialogue inter-malien, Dioncounda Traoré, son sponsor français et leurs alliés liges africains font le jeu d'Aqmi, qui pourra ainsi très certainement argumenter auprès des autres groupes armés au nord du Mali que l'intervention projetée les vise sans distinction et leur prêcher l'union dans la résistance. Et si cet objectif est atteint par Aqmi, l'intervention demandée par Diaoncounda Traoré deviendra un enfer pour les troupes qui y seront engagées et dramatique pour les populations locales.