Le dossier de la crise syrienne s'est encore épaissi après la visite du médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe en Syrie, M. Lakhdar Brahmi. Et du coup, beaucoup n'hésitent plus à pointer du doigt certaines parties qui compliquent un peu plus une situation, au départ complexe. Certes, M. Brahimi a rencontré samedi à Damas, le Président Bachar Al Assad, qui lui a confirmé que la crise ne peut-être résolue que par la voie politique, tout en maintenant ses exigences: pas de discussions avec l'opposition armée, qu'il assimile à des terroristes. De son côté, la rébellion, armée et soutenue par l'Occident et des pays arabes du Golfe, a tout simplement refroidi les attentes de M. Brahmi, estimant que sa médiation est vouée à l'échec. Selon un dirigeant de l'opposition armée, cette mission de Brahimi est «vouée à l'échec», soulignant qu' «un régime qui dirige le pays par la force ne pouvait être renversé que par la force». Du coup, le message de l'opposition est clair : il n'y aura pas de dialogue avec le régime ou ses représentants pour l'arrêt des hostilités. Mieux, l'opposition affirme qu'elle a pris les armes pour défendre la population civile contre la répression sanglante de la révolte, au départ pacifique, contre Bachar al-Assad. Dès lors, aucun répit dans les combats entre l'armée syrienne et l'opposition n'est, pour le moment envisagé. Pour M. Brahmi, qui s'est rendu dimanche au Caire où il devait rencontrer, dans la soirée de lundi, les membres du groupe de contact (Egypte, Arabie Saoudite, Iran et Turquie), la tâche est peut-être plus compliquée qu'il ne le prévoyait. Mais, la porte d'un règlement politique n'est pas totalement fermée, même si les pays occidentaux, notamment la France, veulent mettre un peu plus de pression en invoquant la violation des droits de l'Homme dans un pays qui a basculé dans la guerre depuis 18 mois, depuis que ces mêmes pays ont appelé et soutenu la rébellion contre le régime en place. C'est au niveau ministériel que le groupe de contact devait se rencontrer, hier soir, dans la capitale égyptienne. Les chefs de la diplomatie d'Egypte, de Turquie et d'Iran se sont retrouvés au siège du ministère égyptien des Affaires étrangères, pour discuter des développements de la situation humanitaire et politique en Syrie», selon un communiqué des Affaires étrangères égyptiennes. Pour autant, il y avait la grande interrogation de savoir qui allait prendre la place du ministre saoudien, Saoud Al-Fayçal, convalescent, à cette réunion. «Le fait que quatre pays importants de la région se réunissent pour parler de ce dossier sensible est en soi un pas positif, et nous espérons que les résultats de la réunion seront conformes aux intérêts de tous les peuples de la région et de la paix et la stabilité», a estimé le ministre iranien des Affaires étrangères Ali Akbar Salehi. Il a également réaffirmé que l'Iran souhaitait rééquilibrer le «groupe de contact» en l'élargissant à deux autres pays qui ne sont pas hostiles au régime en place, l'Irak et le Venezuela. Selon le quotidien cairote «Al Ahram», le groupe de contact était «ouvert» à la possibilité d'inclure «d'autres parties à l'avenir». L'Egypte, l'Arabie Saoudite et la Turquie n'ont jamais fait mystère que pour eux la crise en Syrie s'achèvera lorsque Bachar Al Assad quittera le pouvoir. M. Lakhdar Brahimi devrait également participer à cette réunion et rapporter ses discussions avec le président syrien. Il devait aussi s'entretenir, à huis clos, avec le chef de la Ligue arabe Nabil al-Arabi des résultats de sa mission en Syrie. Par ailleurs, la Russie a mis en garde lundi contre une éventuelle intervention des pays occidentaux dans le conflit syrien. D'éventuels projets d'intervention en Syrie conçus par des pays occidentaux préoccupent la Russie, a affirmé le vice-ministre des Affaires étrangères Guennadi Gatilov. «Nous estimons que toute mesure doit être adoptée à titre collectif, dans le cadre du Conseil de sécurité de l'ONU, et qu'une démarche unilatérale, quelle qu'elle soit, dévoierait la démarche d'un règlement politique de la crise syrienne», a-t-il dit, cité par l'Agence «Ria Novosti». Pour Gatilov, aucune mesure unilatérale prise sans le consentement du Conseil de sécurité de l'ONU n'aboutirait à un règlement solide et durable. Par ailleurs, le président de la commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie, Paulo Pinheiro, a recommandé au Conseil de sécurité de prendre les «mesures appropriées» alors que les abus progressent en «nombre, rythme et intensité». Dans un rapport, M. Pinheiro a soulevé «la gravité des violations, abus et crimes perpétrés» par les forces gouvernementales et les milices pro-régime, ainsi que par «des groupes antigouvernementaux», c'est-à-dire l'opposition. En Syrie, les combats retentissent, avec des affrontements violents à Alep, Damas et plusieurs autres villes du pays.