La décision de reprise des gardes par les médecins résidents, qui devait être effective à partir d'hier, mercredi 13 juin, comme annoncée par un communiqué du Collectif autonome des médecins résidents algériens (CAMRA), est une initiative qui ne fait pas l'unanimité au sein des grévistes. A Constantine, le ton est tranchant, les médecins résidents ont, tous, rejeté cette idée de reprise des gardes, qui a été décidée par les membres du national, sans se référer à la base, rappelle-t-on d'emblée, pour montrer que la décision du bureau national du CMRA n'a pas respecté le cheminement habituel. « D'habitude, on travaille selon le principe du retour à la base avant de prendre des décisions qui engagent l'avenir du mouvement, et cette fois-ci également, on a demandé au bureau national de ne pas diffuser le communiqué relatif à cette annonce de reprise des gardes avant de sonder les avis des médecins résidents, mais on a cru bon de le rendre public sans suivre le procédé régulier, et voilà le résultat qui attend, ce n'est pas l'avis de tout le monde pour ce qui est de cette reprise des gardes », se désole presque le Dr Dridi, membre du bureau de la CAMRA à Constantine. Non sans préciser que la reprise des gardes ne veut pas dire reprise de travail, car la grève se poursuit jusqu'à la satisfaction des revendications. Notre interlocuteur indique que les médecins résidents à Constantine ont préféré maintenir le boycott des gardes tant que la tutelle persiste dans son indifférence vis-à-vis du mouvement de contestation. Notre interlocuteur avoue qu'il y a, effectivement, des dissensions, des divisions dans les positions au sein du CAMRA, mais le mouvement ne s'essouffle pas comme on aurait tendance à le croire. « Il nous est arrivé de ne pas tomber d'accord sur certains sujets, certes pas autant déphasé que cette fois-ci, mais cela fait partie de notre lutte, car on peut régler tous ces problèmes et maintenir notre mouvement au niveau solide de la solidarité et la continuation de la protesta », souligne, encore, le Dr Dridi. Ajoutant que « la reprise des gardes a été décidée à cause de l'état de fatigue de certains grévistes, pour sauver le mouvement et, aussi, en réponse à la promesse de dialogue exprimée par le ministère de la Santé, mais voyez comment le ministre accueille cette décision, en niant qu'il y ait eu accord pour une rencontre, ce jeudi 14 juin, et en balayant tout espoir de réunion avec les grévistes tant qu'ils n'auront pas repris le travail ». Cette sortie du ministre de la Santé a suscité l'indignation et la colère des grévistes. D'ailleurs, selon les échos qui nous parviennent des régions du pays, les médecins résidents de la wilaya de Blida rejoignent leurs collègues de Constantine et ont rejeté la décision de reprise des gardes, ainsi que d'autres wilayas qui partagent le même avis mais qui doivent attendre que tous les membres des Collectifs locaux des médecins résidents expriment leur position sur la question, à l'enseigne des wilayas de Annaba, Tizi Ouzou, Béjaïa. Il y a même des médecins résidents de plusieurs services à Alger qui refusent de marcher dans le sens d'une reprise des gardes, a-t-on appris dans le sillage de cette décision qui fait des vagues. Est-ce le début de la dislocation du solide et solidaire mouvement des médecins résidents, en grève depuis 7 mois ? Le Dr Dridi rappelle que le dernier mot revient toujours à la base. Notons qu'en parallèle à ces moments d'incertitudes, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a annoncé, dans un communiqué que l'examen du Diplôme d'études médicales spécialisées (DEMS) pour l'ensemble des résidents se déroulera durant la période allant du 1er au 19 juillet, conformément aux textes réglementaires. Il s'agit d'une session de rattrapage qui fait suite à la session normale qui s'était tenue du 18 mars au 12 avril de l'année en cours, a rappelé le ministère, précisant, cependant, que « les candidats n'ayant pas passé l'examen de la session normale, et à titre exceptionnel, seront autorisés à s'inscrire auprès de leur département respectif, au cours de la période programmée du 17 au 24 juin 2018, afin de pouvoir se présenter à cet examen s'ils le souhaitent ». Non sans user d'un ton menaçant en soulignant que « cette session de rattrapage sera la dernière à être organisée pour l'année universitaire 2017/2018 », prévenant que les candidats qui ne s'y présenteront pas « seront considérés, en situation d'abandon d'étude et par conséquent exclus ». Après le gel des salaires par le ministère de la Santé, voilà que les médecins résidents sont sous la menace de l'expulsion de la part de l'autre ministère de tutelle, en l'occurrence celui de l'Enseignement supérieur.