Grande tension au sein de la chambre basse du Parlement où son président, Said Bouhadja (80 ans), nommé à l'issue des législatives de mai 2017 remportées par le FLN, est poussé vers la porte de sortie par son propre parti. Annoncé mercredi comme étant démissionnaire par le groupe parlementaire du parti majoritaire à l'APN, Bouhadja a démenti le lendemain jeudi sa démission. Il a annoncé dans une déclaration à TSA Arabi que cette 'démission'' doit obéir à 'une procédure légale'' de destitution. Selon la Constitution, 'le président de l'Assemblée Populaire Nationale est élu pour la durée de la législature'', c'est à dire cinq ans. D'autre part, l'article 10 du règlement intérieur de l'APN souligne que le cas de vacance de la présidence de l'Assemblée peut intervenir soit 'par suite de démission, d'incapacité ou d'incompatibilité ou de décès'', et fixe les modalités d'élection d'un nouveau président (dans un délai de 15 jours). 'Je n'ai pas compris pourquoi on parle au sein d'un groupe de ma démission. La démission obéit à des procédures légales, pas à des procédures illégales, sans aucun rapport avec les lois de la République'', a-t-il expliqué dans une déclaration au site TSA-Arabi. Le président de l'APN a même annoncé qu'il est prêt à partir, si la 'procédure de sa destitution respectait la loi'', évoquant, concernant cette procédure 'la partie qui m'a désigné à ce poste''. Pour lui, 'l'état d'ébullition au sein du Parlement et au sein du FLN a une dimension politique''. Il a répété jeudi en marge d'une séance de questions orales que sa démission, encore moins sa destitution, n'est pas 'à l'ordre du jour'', et que cette destitution n'a pas été à l'ordre du jour également de la réunion du groupe parlementaire du FLN à Hydra. En fait, le SG du FLN, Djamel Ould Abbès, avait convoqué mercredi dernier les députés du parti pour un conclave à huis clos à Hydra pour vraisemblablement discuter de la destitution de son poste du président de l'APN, Said Bouhadja. Selon une source proche de la direction du FLN, 'les députés vont discuter avec Ould Abbès du sort du président de l'APN'' après que celui-ci ait mis fin aux fonctions de Bachir Slimanin, SG de l'APN, ce que Ould Abbès n'avait pas accepté. Mais, 'nous n'avons pas abordé la destitution de Bouhadja hier lors de notre réunion avec Djamel Ould Abbès'', affirme un cadre du FLN, selon lequel 'de toute façon, on ne pouvait pas le faire puisque seul le président (Bouteflika) est en mesure d'imposer la démission'' du président du Parlement. La colère des députés du FLN contre Said Bouhadja, même si le courant ne passe plus entre le SG du FLN et le président de l'APN, qui ne se parlent plus en fait depuis plusieurs mois, est motivée non pas par des considérations organiques, mais par la gestion presque autoritaire et personnelle de la chambre basse du Parlement. Le 'clash'' entre Bouhadja et Ould Abbès, par députés à l'APN interposés, est né en fait après le licenciement du SG de l'APN, un militant du FLN. ' Bouhadja a écarté le SG de l'APN pour des raisons personnelles'', affirment des députés de la majorité parlementaire. 'Hospitalisé en France ces dernières semaines, Said Bouhadja avait exigé une prise en charge totale pour son chef de protocole, qui l'avait accompagné à Paris'', indiquent les mêmes sources, qui précisent que le secrétaire général de l'APN avait refusé de signer la décision, faisant référence à la loi en matière de frais de mission, qui fixe, en cas de prise en charge, ces frais à 25% seulement. Said Bouhadja a signé ensuite lui-même cette décision, et, dès son retour, il a limogé le SG de l'APN, précise-t-on. Selon la page Facebook de l'APN, Said Bouhadja avait opéré un changement à la tête de l'administration de l'APN 'dans le cadre de ses prérogatives''. Mais, l'éviction du SG de l'APN avait suffi pour provoquer un tollé au sein de l'hémicycle parmi les députés du FLN, auxquels se sont joints ensuite les groupes parlementaires des partis de la majorité présidentielle. 'Il y a une unanimité contre lui au sein du groupe parlementaire du FLN'', affirment des députés, qui mettent en avant la gestion 'catastrophique de Bouhadja, notamment sa décision de mettre fin aux fonctions du SG de l'APN. Par ailleurs, outre le groupe parlementaire du FLN, d'autres groupes comme ceux de TAJ et du RND et des indépendants exigent le départ du président de l'APN, mais sans officialiser cette position, qui s'apparente à un alignement sur la posture du parti d'Ould Abbès. 'Les députés ont longuement discuté de la gestion catastrophique de Bouhadja, notamment sa décision de mettre fin aux fonctions du SG de l'APN'', indiquent des sources parlementaires selon lesquelles 'les groupes parlementaires du FLN, du RND, de TAJ, du MPA et des indépendants, se sont rencontrés hier et ont décidé d'arrêter toute collaboration'' avec le président de l'APN. La crise est ouverte dès lors au sein de l'APN, et Bouhadja poussé à la démission. Il est clair que la crise au sein du Parlement, dont le limogeage du SG ne serait qu'un simple détonateur, est surtout le résultat de profonds antagonismes entre le SG du FLN et le président de l'APN. Et pourtant, il y a une année, en mai 2017, Djamel Ould Abbès avait vanté la personnalité de Bouhadja en présentant sa candidature à la présidence de l'APN, parlant de 'moujahid et militant connu''. De son côté, Said Bouhadja avait répliqué que cette désignation à la tête de l'APN revenait en fait 'au brave moudjahid Abdelaziz Bouteflika, président de la République''. Il est clair, au sein de l'APN et en dehors de l'hémicycle, que seul le président Bouteflika, nonobstant l'application stricte de la Constitution, peut accélérer la destitution de Said Bouahdja. Un seul cas de démission a été enregistré jusque-là depuis l'indépendance: c'était en 2004 avec la démission de Karim Younès, qui avait fait campagne aux côtés de Ali Benflis.