Abdelmadjid Tebboune a été élu 8ème président de la République algérienne démocratique et populaire ! Et la présidentielle du 12 décembre s'impose de fait comme un repère nouveau pour l'ensemble des protagonistes de la crise politique que vit le pays. Il prêté serment et prendra officiellement ses fonctions avec, sur les bras, un passif très lourd, hérité de la «issaba» dont les membres sont, en partie, détenus à la prison d'El Harrach. Et le déficit est énorme sur tous les plans : politique, institutionnel, économique et social. De ce fait, l'enjeu pour lui qui vient d'être élu, consisterait à convaincre les Algériens de sa volonté de répondre véritablement aux revendications de la révolution du sourire initiée par le Hirak « Canal Historique » du 22 février qui a permis à l'Algérie de rentrer dans une ère nouvelle, même si, faut-il le dire, ce mouvement a été plus au moins dérouté de son itinéraire ce qui lui a fait perdre quelque peu son souffle. Mais, paradoxalement, c'est le président Tebboune qui est venu à sa rescousse en « lui tendant la main » lors de sa conférence de presse tenue au lendemain de son élection en lui promettant « un dialogue global et sérieux ». De l'avis des observateurs de la vie politique, la parole ainsi délivrée laissera libre cours aux échanges et aux débats publics ce qui permettrait l'émergence d'une élite susceptible de structurer ledit Hirak et de lui conférer la capacité à négocier et surtout, le sortir de son «horizontalité » actuelle ! Ceci étant dit, sur quel gouvernement va s'appuyer Abdelmadjid Tebboune pour commencer à mettre en œuvre ses 54 engagements électoraux ? On n'en sait rien pour l'instant, si ce n'est les quelques bribes lâchés par le président qui a évoqué l'idée d' « un gouvernement de compétences ou des jeunes feront leur entrée ». Gouvernement bien entendu sans accointances politiques ; il ne peut en être autrement dès lors que le président Abdelmadjid Tebboune s'est présenté aux électeurs en tant que candidat indépendant ! Ce gouvernement-ci, aura certainement un mandat limité à la gestion des affaires du pays, jusqu'à la tenue d'élections législatives dans les plus brefs délais. On ne peut, effectivement et logiquement, affirmait un éditorialiste, s'attendre à ce que la représentation nationale actuelle fasse fi de ses ardents engagements passés et tourner le dos à un nouveau vent et voir encore cette institution vitale triturer une nouvelle énième fois une loi fondamentale que le nouveau chef de l'Etat entend bouleverser en premier lieu. Les Algériens devront-ils pour autant s'interdire de penser à la nature et aux contours du gouvernement qui, forcément, s'installera au palais du docteur Saâdane ? Au delà des nouvelles personnalités qui doivent composer ce gouvernement idéal, l'Algérie selon les experts, a déjà besoin aussi d'une nouvelle structure gouvernementale. A savoir se doter de 10 ministères uniquement et de 15 secrétaires d'Etat et ce afin de réduire les dépenses onéreuses qu'impose l'actuelle lourde machine bureaucratique. Il est par exemple suggéré de créer des super-ministres regroupant plusieurs portefeuilles comme le ministère de l'Economie qui regroupera un secrétariat à l'Industrie et l'investissement et un autre dédié au Commerce au lieu de laisser ses secteurs dans deux ministères différents. Quid du profil des ministres ? Le président de la République va-t-il par exemple : 1. encore une fois, puiser dans le corps des walis pour nommer ses ministres ? 2. faire confiance aux technocrates ? 3. s'en remettre aux « rares » partis politiques qui l'auraient soutenu dans sa campagne pour former son gouvernement? 4. ou recruter ses ministres sur Internet parmi les citoyens de son pays, comme à voulu le tenter Adel Abdel Mahdi, tout juste désigné Premier ministre en Irak ? S'agissant des walis promus ministres, il faut le rappeler, ils n'ont pas été à la hauteur des attentes, à voir globalement leurs bilans ! De là à prétendre que la filière des walis reste, malgré tout, un vivier de compétences malgré leurs échecs successifs, c'est aller vite en besogne ! Et de les affubler du titre de «technocrates» ? Alors qu'ils ne sont que des grands commis de l'Etat qui ont, pour la plupart, «touché à tout», sans être pour autant des experts dans un domaine précis. Rappelons justement que et dès l'annonce de la formation ministérielle de Abdelmadjid Tebboune, premier ministre d'alors, les observateurs se sont précipités à parler d'un «gouvernement de technocrates». Evidemment, ce n'était pas vrai, même si certains ministres, comme Abderrahmane Raouya, Mustapha Guitouni, Mourad Zemali et Mokhtar Hazbellaoui, entre autres, pouvaient s'en revendiquer. Dans un gouvernement de technocrates, ce sont ces derniers qui décident de tout et restent impuissants devant les problèmes de société ! L'idée d'une technocratie demeure pourtant hypothétique, même si des nations ont, par le passé, été considérées comme soumises à une forme de gouvernement d'experts. Pour fermer la parenthèse, «le phénomène semble aussi facile à expliquer que la théorie de la relativité d'Einstein», expliquait un politologue. Mais sinon, un gouvernement politique à 100% est-il envisageable pour 2019 ? Même s'il s'évertue à marteler qu'il a été élu en étant candidat indépendant écrivait un chroniqueur, Abdelmadjid Tebboune sera amené tôt ou tard à s'entourer de figures et de partis politiques pour mettre en œuvre son programme. Aussi se bousculent-ils déjà devant sa porte pour lui apporter leur soutien et afficher leur disposition à prendre part au dialogue auquel il a appelé. Sauf que ce beau monde, déjà trop marqué, rappelle le règne et la méthode Bouteflika. Opter pour un gouvernement exclusivement politique, une équipe de spécialistes indépendants, ou une formule mixte, c'est-à-dire un cabinet techno-politique appelé à contenter à la fois, si cela est possible, les milieux politiques, les investisseurs et entrepreneurs honnêtes et aussi et surtout les contestataires du Hirak Canal Historique, c'est aussi une autre possibilité qui échoit au président de la République. Bref, autant de questions qui préoccupent les observateurs de la vie politique, tout comme la désignation du Premier ministre qui reste du ressort exclusif du président de la République, ce qui élimine tout suspense quant à celui qui conduira l'Exécutif, contrairement aux ministres qui composeront son staff. Justement, qui pourrait être l'homme à qui le président Abdelmadjid Tebboune confierait les rênes de son exécutif et dont le nom sera dévoilé samedi prochain ? Il devrait cumuler l'ensemble des critères requis comme : 1. une forte personnalité et un esprit indépendant (l'un ne va pas sans l'autre) ; 2. une intégrité morale au-dessus de tout soupçon ; 3. une connaissance intime des questions économiques, sociales et financières ; 4. une grande capacité à mobiliser les ressources humaines auxquelles il ou elle devra s'adosser pour engager des réformes de structure indispensables, sans cesse différées depuis 40 ans. Aujourd'hui la seule personnalité qui vient à l'esprit et qui réunit toutes les qualités pour permettre à notre pays de traverser, avec le moins d'encombres, les épreuves qui l'attendent et au président Abdelmadjid Tebboune de concrétiser ses 54 engagements électoraux est indéniablement Ahmed Benbitour. Adoubé, faut-il le rappeler, par le Hirak Canal Historique dès les premiers vendredis ! Ahmed Benbitour est resté huit mois à peine à la Primature, avant de démissionner, lorsqu'il lui apparut clairement que sa conception de l'Etat et de l'intérêt général était aux antipodes de celle d'un Président de la République résolu à détruire ce pays, objectif qu'il a hélas largement atteint. Abdelmadjid Tebboune n'a pas fait long feu lui aussi pour presque les mêmes raisons ce qui a fait dire à nombre d'Algériens qu'il y a, forcément, des atomes crochus entre ces deux hommes politiques. Beaucoup l'espèrent, croyant dur comme fer que ce binôme mènerait à coup sûr le pays à bon port dès lors qu'ils auraient aussi en commun la même vision d'une économie plutôt libérale et aussi la volonté ferme de lutter contre la corruption et de rapatrier, coûte que coûte l'argent détourné par les oligarques véreux et les délinquants «en col blanc » qui étaient au pouvoir ! Ainsi Abdelmadjid Tebboune s'attellerait à redonner le respect pour la fonction de président de la République qu'il n'y a plus aujourd'hui ! Quant à Ahmed Benbitour, il se fera un devoir de remettre du mouvement dans le statu quo qui prévaut dans le pays depuis 1962 !