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Parc national de Theniet El Had: Au paradis des cèdres
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 20 - 10 - 2020

Epique escapade à la découverte du monde du silence : classé patrimoine mondial protégé, la forêt des cèdres, ou Parc national de Theniet El Had dans la wilaya de Tissemsilt, est une véritable merveille de la nature. Ici, récit de 14 kilomètres de randonnée pédestre en direction de Ras El Braret à.1.787 mètres d'altitude, le point culminant au centre de l'Atlas tellien, à la jonction des vastes plaines du Sersou et la limite sud du grand massif de l'Ouarsenis.
Vendredi, il est presque 7 heures et le soleil n'a pas encore quitté sa cache. Engoncés dans leurs habits d'hiver, les membres de l'expédition ont rendez-vous au niveau de la place «Regina», en plein cœur de la ville de Tiaret. Un café chaud vite avalé, l'autobus s'ébranle en direction du parc national de Theniet El Had, à quelque 120 kilomètres de la capitale du Sersou. Il est à peine 8 heures 30 quand nous arrivons à Theniet El Had : pour se dégourdir les jambes, une pause dans un somptueux hôtel nouvellement construit et entièrement dédié au tourisme local, fait beaucoup de bien aux 25 membres de l'expédition, partis à la quête de ce somptueux monde du silence, à la louable initiative de l'association écologiste «Essalam El Akhdar» et dynamique président, Ghouzi Mohamed Reffasi, toujours fidèle à son poste de premier de cordée. De nombreux sites pleins d'intérêts émerveillent notre regard à l'entrée du parc national de Theniet El Had tels que ces belles futaies équiennes élancées, qui s'étendent à perte de vue.
L'épique expédition vers le parc national des cèdres se transforme en une kermesse générale pour tous les randonneurs, tous âges et condition physique confondus. La beauté du décor ambiant est à couper le souffle. A quelque trois kilomètres en pente accentuée de la ville de Theniet El Had, nous atteignons la barrière où tous les véhicules doivent s'arrêter, pour pénétrer à pied dans la magnifique forêt des cèdres, s'étendant sur une vaste superficie de 3.425 hectares et érigée en parc national depuis juillet 1983. Le parc national des cèdres occupe la partie dorsale de Djebel «El Meddad» sur trois versants principaux, dont une zone tampon, entièrement dédiée à l'écotourisme et les randonnées pédestres. En file indienne derrière notre guide, sur un chemin escarpé et caillouteux, nous entamons notre périple en direction de Ras El Braret, le point culminant de l'Atlas tellien, juché entre le sud du grand massif de l'Ouarsenis et les vastes plaines du Sersou. A peine quelques centaines de mètres parcourus, Adda, pourtant un habitué des randonnées pédestres et amoureux de la nature, est pris d'un malaise. Rapidement secouru, nous l'abandonnons, le cœur serré, entre de bonnes mains, le laissant récupérer son souffle à l'entrée du parc. Adda ne sera pas du voyage d'exploration de la somptueuse cédraie. Et alors que l'expédition commence à s'étirer en plusieurs groupuscules, tant l'ascension est enivrante vers les hauteurs de la magnifique cédraie, les poumons sont mis à rude épreuve. Slimane joue à la « voiture balai » et s'enquiert de l'état des randonneurs largués par le groupe d'échappée. Soudain, un cri strident fuse de nulle part. Renseignement pris, l'on saura qu'un membre du groupe en retard sur le peloton de tête, a aperçu une meute de loups, sans avoir eu le temps de dégainer son appareil photo pour immortaliser «l'évènement». L'on saura, aussi, que l'aigle royal, le chacal doré, le renard roux, ou encore le pic épeiche, constituent d'autres espèces faunistiques endémiques à la région. Nous atteignons la parallèle de la retenue collinaire de «Sidi Abdoune», au milieu d'une végétation luxuriante et de vieux cèdres d'une beauté radieuse. Certains sujets sont millénaires, comme Messaoud et Messaouda, deux cèdres vétérans, qui se côtoient depuis la nuit des temps, sous l'œil protecteur de leur seigneur, le cèdre «Sultan» de toute la forêt. Le chêne vert ou le chêne zen, une espèce qui ne pousse qu'en Afrique du nord, y est présent en masse. D'aucuns en profitent pour cueillir le fruit du cèdre, des cônes en forme de petits tonnelets ovoïdes. Un précieux souvenir à ramener à la maison. Au loin, deux silhouettes ont le dos courbé, calepin à la main. L'on saura que c'est des scientifiques, en mission d'exploration, dans ce milieu naturel idéal pour la recherche sur les espèces floristiques et faunistiques de la région.
Le rond-point des cèdres : «ici on se sent tout proche du ciel» !
Essoufflés, les membres de l'expédition décident de faire une pause-café. Tout le monde dégaine son appareil-photo. Mais personne ne peut se mesurer au talent de Noureddine, le photographe attitré de l'expédition, qui sait jouer de son corps et différentes positions, pour figer dans le temps, le décor ô combien merveilleux, de ce monde du silence, où la majesté des monts de l'Ouarsenis le dispute à la magnificence de la cédraie, déclinée en couleur arc-en-ciel, dessinant un tableau de maître à couper le souffle. Après presque huit kilomètres de marche, beaucoup de randonneurs ont les pieds en charpie et les poumons en feu. Mohamed, un autre randonneur, est, lui aussi, pris d'un malaise, semant l'inquiétude parmi l'expédition. Le groupe de tête est alerté. Tout le monde décide de se regrouper pour s'enquérir de l'état du sexagénaire, dont la fragile morphologie a été mise à très rude épreuve, sur un chemin qui monte inexorablement vers le majestueux sommet de Ras El Braret. Rassurés de l'état du «naufragé», l'expédition reprend son chemin, sous l'œil expert de Larbi, un ancien athlète qui surveille tout le monde, et surtout organise le rythme de la marche, portant de précieux conseils par-ci par-là. L'oxygène commence à se raréfier, quand nous atteignons le célèbre «rond-point des cèdres» à plus de 1.400 mètres d'altitude, entre les deux pics dominant du parc national de Theniet El Had : Ras El Braret (1.787 m) et Kef Siga (1.784 m), caractérisé par un immense rocher au sommet duquel sort hardiment un grand cèdre «parasol», et au sommet duquel l'on peut même apercevoir la Méditerranée. «Le rond-point des cèdres », une grande clairière, véritable mer de verdure, entourée de cèdres multi-centenaires, où les randonneurs s'installent pour pique-niquer, où même bivouaquer à l'image de ces Algérois, nombreux, installés dans des tentes, tout autour de la fontaine de «Aïn Harhara». Des carcasses de maisons forestières, des chalets, une ancienne cafétéria, des terrains de football, de tennis ou encore de volley-ball, reposent comme des vestiges au beau milieu de cette nature à nulle autre pareille. « Pourquoi ce gâchis dans un parc supposé classé et protégé ?! » s'interroge Mourad. Après avoir pris une bonne heure de repos, s'être sustentés et surtout bu beaucoup d'eau, les membres de l'expédition entament le chemin du retour par un autre chemin qui devait nous faire retomber sur nos pieds, au pied de la cédraie. Point d'orgue de ce beau voyage dans les entrailles d'une mer de verdure, nous rencontrons un groupe de randonneurs algérois, munis de tout l'arsenal du bivouaqueur professionnel. Pour Nadjib, venu de Belcourt, il s'agit « du plus bel endroit de toute l'Algérie » s'émerveille-t-il, les yeux luisant de bonheur. Les deux groupes, celui de Tiaret et l'autre de la capitale, font connaissance et décident de prendre une photo de famille. Une ambiance de joie et de ferveur est partagée par tout le monde. Alors qu'il est presque 15 heures, sur le chemin du retour, nous rencontrerons beaucoup d'autres randonneurs, des hommes, mais aussi beaucoup de femmes et des enfants, venus pour passer la nuit en pleine forêt, sous l'œil vigilant et protecteur des villageois de quelques hameaux épars, comme heureux de ce véritable déferlement de randonneurs et autres curieux, venus à la découverte de ce monde à part.
Le «petit détail» qui gâche tout !
Le «petit détail» qui gâche tout comme dirait l'autre. Pour une « grosse surprise » c'en fut vraiment une : plus nous descendions pour atteindre notre point de départ, plus les gens étaient nombreux, venus s'offrir un grand bol d'oxygène dans cette nature vierge. Au niveau du parking où nous avions laissé notre autobus, c'est la foire d'empoigne. Un nombre impressionnant de véhicules barrent carrément l'accès au parc de la forêt des cèdres. Les plaques minéralogiques des voitures nous renseignent sur la provenance de cette foule immense, accourue par un vendredi après-midi, vers la localité de Theniet El Had. Si les véhicules et autres autocars immatriculés à Alger sont les plus nombreux, les visiteurs viennent de tout le pays : Tipaza, Médéa, Sidi Bel Abbès, Aïn Defla, Tiaret, Tissemsilt, Boumerdès et même de Béchar. Petit incident qui gâche toute la joie et la bonne humeur « emmagasinée » durant toute le durée de l'expédition, notre autobus est coincé dans une « forêt » de voitures et autres nombreux véhicules de transport collectif. Notre sympathique conducteur, pourtant très expérimenté pour avoir sillonné presque tout le pays avec des touristes à bord, a un mal fou à dégager son autobus. Après moult manœuvres très risquées, nous sommes enfin délivrés pour rejoindre la RN 14, en direction de la capitale des hauts plateaux de l'Ouest. Une dernière halte est marquée dans un motel, à la sortie de la ville de Tissemsilt. Il est presque 18 heures quand l'autobus se débarrasse, un à un, de tous ses passagers, arrivés certes vannés mais très heureux d'une folle expédition qui laissera des souvenirs indélébiles dans l'esprit de chacun. Aussi vrai que l'est la beauté de l'Algérie, un pays-continent qui reste à découvrir. Et surtout à faire découvrir, d'abord à ses propres enfants...


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