Les images prises le jour même des inondations par Alsat 1, le satellite de l'Agence spatiale algérienne (ASA), ont permis aux services la Protection civile de connaître l'étendue des dégâts occasionnés par la furie des eaux. Alignées les unes à côté des autres, les photos sont révélatrices de l'étendue du drame. Elles montrent comment l'oued M'zab a repris sa route en détruisant tout sur son passage, notamment les constructions et obstacles érigés sur son lit sur une étendue de 4500 km2. Pendant plus d'une heure, le lieutenant Keffous Mrizak, du poste de commandement opérationnel de la Protection civile, a bien voulu revenir sur les premiers moments des interventions, c'est-à-dire à partir du 30 septembre dernier, lorsque le premier bulletin météo spécial (BMS) est tombé. « Ce bulletin annonçait de fortes pluies sur les Hauts-plateaux. Nous nous sommes préparés en renforçant nos unités sur place. Nous étions en état d'alerte. Le second BMS, qui annonçait de fortes pluies pour la journée du 1er octobre, nous a poussés à faire appel aux unités des wilayas limitrophes. Le volume des précipitations était compris entre 600 et 900 m3 par seconde. Il n'y a pas eu que l'oued M'zab qui a débordé de manière violente, d'autres aussi, à savoir oued El Kebch qui traverse Berriane, les oueds Labiod, Ballouh, Haimoun, Laâdira, Metlili, lui, a ravagé la commune qui porte son nom, et N'tissa qui, faut-il le rappeler, a encerclé 150 personnes du côté de Ouargla, sauvées in extremis grâce aux hélicoptères de l'ANP. Le premier jour, 400 agents étaient mobilisés, alors que 250 étaient dépêchés d'Alger. A la fin de la journée, 780 pompiers avaient rejoint Ghardaïa. Mais l'étendue des inondations était très importante. L'oued Labiod, par exemple, est passé d'une largeur de 25 m à 41 met a provoqué des dégâts considérables au niveau de sept agglomérations situées sur son itinéraire », explique l'officier, qui précise au passage qu'au deuxième jour de la catastrophe, 1177 agents de la Protection civile avaient été dépêchés vers Ghardaïa de 27 wilayas, avec 195 moyens matériels. Des groupes cynotechniques, de plongeurs et un autre chargé des stations de potabilisation ont été également institués, vu l'ampleur des dégâts. « Dès le premier jour, nous avons donné la priorité aux opérations de secours dans la zone inondée, répartie en quatre secteurs. Du premier au troisième jour, nous avons retiré 5 morts du secteur 1 et 6 autres du secteur 2. Des deux secteurs, nous avons pris en charge 47 blessés. Du 3e secteur, nos éléments ont retiré 2 morts et transféré à l'hôpital 19 blessés », déclare l'officier. Selon lui, 84 blessés et 36 morts ont été repêchés par la Protection civile, alors que 7 personnes décédées ont été retirées par leurs proches et enterrées sans que les autorités n'en soient informées. Ce n'est que cette semaine que leur famille les ont déclarées au parquet, en prévision d'éventuelles indemnisations. Au poste de commandement des opérations, tout est inscrit au détail près sur des feuilles blanches accrochées au mur. 1400 opérations d'évacuation des eaux, 1222 opérations d'assistance, 333 interventions médicales et plus de 80 véhicules dégagés de la boue. Pourtant, la population a fait état de l'absence remarquée de la Protection civile dans certaines régions inondées et du manque de moyens pour les opérations de sauvetage dans d'autres. « Nous comprenons parfaitement les préoccupations des citoyens. Dans de pareilles circonstances, les gens se sentent terriblement seuls, même si nos agents sont près d'eux. Il faut prendre en compte l'étendue des dégâts. Les inondations ont touché une superficie de 4500 km2, avec 9 zones d'habitation. Quand nous disons zone d'habitation, cela suppose plusieurs quartiers dévastés. Même si vous dépêchez une armée complète sur les lieux, les gens diront que cela s'avère malheureusement insuffisant. Nous avons de l'expérience dans le domaine et les cadres dépêchés des autres wilayas, notamment de l'état-major, de la Protection civile, ont très bien organisé les secours. Malgré cela, il est vrai qu'il y a eu des faiblesses qu'il faudra mettre sur le compte de la gravité de la situation », précise l'officier. Le lieutenant Keffous estime que le capital expérience de la Protection civile a permis de faire face à une épreuve des plus difficiles en cette nuit du 9 octobre où la météo avait annoncé de fortes précipitations sur les Hauts- Plateaux d'où arrivent les affluents de la vallée du M'zab. « En plus des éléments qui étaient sur place, nous avons mis en alerte 1150 agents prêts à intervenir. Parallèlement, des appels radio et dans les mosquées et lieux publics ont été lancés pour sommer la population de s'éloigner de la rive gauche de l'oued M'zab où nos craintes de le voir déborder étaient très fortes. Des agents ont été dépêchés vers les oueds et retenues situés en amont de la vallée pour suivre le niveau de l'eau. Fort heureusement, ce dernier n'a pas dépassé un mètre. La catastrophe n'a pas eu lieu et l'alerte a été levée. Nous pensons que cette expérience a été bénéfique parce qu'elle nous a montré que la prévention est l'un des meilleurs moyens de lutte contre les risques naturels. C'est dans ce cadre qu'un spot publicitaire a appelé la population à s'éloigner des barrages, des rives des oueds et des retenues », affirme le lieutenant Keffous Mrizek.