Les partis de l'opposition en Algérie ne doivent pas rêver de concrétiser, du moins à court terme, l'objectif pour lequel ils ont été créés et pour lequel ils militent : l'exercice du pouvoir. Ils n'auront pas cette chance. C'est ce qu'a laissé entendre hier le secrétaire général du RND et néanmoins chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia. « Nous savons que l'opposition ne prendra pas le pouvoir en Algérie, je ne dirais pas ‘hata inouar elml'h' (c'est-à-dire jamais), en tout cas pas de sitôt », a-t-il lancé devant les députés et sénateurs du RND réunis à l'hôtel Essafir pour accorder une dernière fois leurs violons avant d'aller voter comme un seul homme, aujourd'hui, pour le projet de révision constitutionnelle. La phrase de M. Ouyahia est lourde de sens. Elle signifie on ne peut plus clairement que l'exercice du pouvoir en Algérie est réservé aux hommes politiques « issus du pouvoir ». Cela ne sera pas, bien entendu, consacré par un texte de loi. Pour le secrétaire général du RND, la création de l'Alliance présidentielle sert également à étouffer les voix de l'opposition. C'est cette même alliance composée du FLN, du RND et du MSP qui fera, a-t-il dit, passer le projet de révision constitutionnelle. Il prévoit pour cela un raz-de-marée. Le vote des députés et des sénateurs de ces trois partis permettra de réunir les trois quarts des voix du Parlement indispensables pour avaliser le projet et ouvrir les portes du troisième mandat au président Bouteflika. Un troisième mandat pour lequel le RND, affirme son premier responsable, fera campagne. « Le RND votera pour la révision de la Constitution. Le RND fera campagne pour le troisième mandat du président de la République. Cela a été décidé par le dernier congrès du parti », a-t-il précisé. Le leader du RND ne trouve aucun inconvénient à la suppression de la limitation des mandats. « Cette révision est bonne parce qu'elle apportera un surcroît de pratiques démocratiques et d'ordre institutionnel à l'Etat algérien, à travers l'ouverture des mandats, ce qui est le cas dans l'écrasante majorité des pays du monde », estime-t-il. Pour tenter de renforcer ses arguments, l'orateur remonte jusqu'aux années 1940 et fait le parallèle avec le cas du président américain Franklin Delano Roosevelt (1933-1945) qui a fait plus de trois mandats à la Maison-Blanche. Le nombre des mandats a été limité à deux au USA en 1951. En 2008, Ahmed Ouyahia pense que la non-limitation des mandats n'altère en rien le principe fondamental de la démocratie qui est l'alternance au pouvoir. De plus, la révision de la Constitution va permettre, enchaîne-t-il, « la remise en forme de l'agencement institutionnel du pouvoir exécutif ». Un pouvoir qui, selon lui, fonctionne avec « des bizarreries » telles que le chef du gouvernement, l'organisation d'un conseil du gouvernement en parallèle avec le Conseil des ministres... M. Ouyahia a estimé que la Constitution de 1996, soutenue à l'époque par le RND, « est venue à la porte de la crise ». « La crise étant dépassée, l'Algérie a besoin de revenir à une situation ordonnée. Cela ne veut pas dire que c'est le Coran qui va être écrit demain », a-t-il ajouté. L'histoire et le renforcement des droits politiques de la femme sont également de bons points apportés par le nouveau projet.