L'Inde compte encore ses morts, victimes d'une violence que l'on dit partout au regard des éléments visibles, c'est-à-dire les différentes mesures de sécurité, avec comme élément dominant les postes de contrôle qui ont fini par s'enraciner. Et en ce sens, la violence en Inde est partout, mettant aux prises les communautés hindoue, musulmane, chrétienne, avec des flambées de violence cycliques, des guerres avec le voisin pakistanais et un conflit au Cachemire. Pourtant, depuis longtemps, et spécialement depuis deux décennies, les Indiens tentent de venir à bout de ce phénomène par la seule voie politique, plus spécialement avec un effort de modernisation de la société, de l'accès aux plus hautes fonctions de l'Etat d'hommes et de femmes que l'on disait condamnés à d'autres tâches, les moins nobles en tout cas. C'est-à-dire effacer les origines ou encore ne plus en faire une tare ou un privilège. « On veut tout régler par l'éducation », nous disaient alors les dirigeants indiens, excluant de ce fait la contrainte allusion aux pays voisins. L'Inde effectivement se modernise, avec une classe moyenne forte de centaines de millions de personnes, absorbant les différences. Mais un tel discours ne semble pas tenir compte d'une réalité qui, par sa férocité et sa récurrence, rattrape les dirigeants de ce pays. On s'en tient alors au simple constat, compter les morts, encore et toujours, et lancer des accusations toujours les mêmes que l'on entend. Ce qui ne veut pas dire qu'elles sont infondées, mais tout porte à croire qu'elles n'ont pas été prises en charge, du moins pas sérieusement, et avec la même détermination que celle qui a été mise pour moderniser la société. Mais est-ce que les mêmes causes produisent les mêmes effets ? Autrement dit, ceux qui ont attaqué Bombay, ce symbole du renouveau indien, tué et massacré sans le moindre scrupule, pouvaient-ils être convaincus par un tel discours ? Qui sont-ils d'abord ? Ils viennent de pays voisins, dit-on au plus haut niveau indien. A vrai dire, il n'y a qu'un seul : le Pakistan avec lequel existe un contentieux qui remonte à la partition de l'Inde, mais qui est lui-même plongé dans cette tourmente et qui récuse ces accusations. Une situation réellement complexe bien que pour les historiens elle soit ancienne, puisqu'elle remonte aux années de l'indépendance de l'Inde et de l'assassinat de Gandhi. C'est là où le processus de modernisation a montré ses limites. De bien dangereuses limites, il faut en convenir, puisqu'il s'agit de sécurité et de stabilité, que seul le politique est à même d'assurer et de préserver. De simples barrières érigées au milieu de la chaussée ne sont pas dissuasives. Elles signalent tout juste l'existence d'un danger.