Est-ce que la Corée du Nord qui a procédé hier à son deuxième essai nucléaire l'a fait pour sortir les négociations actuelles de l'impasse où elles se trouvent, ou plus simplement pour ne plus avoir à en parler ? C'est ce raisonnement quelque peu par l'absurde qui parcourait le monde à l'annonce de cet essai que la Corée du Nord a annoncé l'avoir effectué « avec succès ». Pyongyang agitait la menace de représailles, notamment celle d'un nouvel essai nucléaire, depuis sa condamnation le mois dernier à l'ONU à la suite d'un tir de fusée à longue portée au-dessus du Japon, début avril. Ce pays parmi les plus pauvres de la planète venait ce jour-là d'étoffer son arsenal. Pour ce qui est des faits d'hier suscitant tous des réactions de désapprobation, ils ont été rapidement confirmés par leur auteur. « La République démocratique populaire de Corée (RDPC) a procédé avec succès à un nouvel essai nucléaire souterrain le 25 mai dans le cadre de ses mesures destinées à renforcer ses capacités de dissuasion nucléaire (...) », a indiqué l'agence de presse officielle du régime KCNA, reçue à Séoul. Peu après, on apprenait que le Conseil de sécurité de l'ONU allait se réunir en début de soirée, très certainement pour renouveler sa condamnation de tels essais. L'annonce en a été faite depuis Beyrouth par le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov. Selon des responsables sud-coréens, une secousse a été décelée dans la ville nord-coréenne de Kilju (nord), où Pyongyang avait déjà procédé à son premier essai. L'institut américain d'études géologiques (USGS) a pour sa part détecté un « épisode sismique » de magnitude 4,7, à 375 km au nord-est de Pyongyang et à une profondeur de seulement 10 km. Selon KCNA, ce nouvel essai était plus puissant que celui du 9 octobre 2006 qui avait provoqué une crise internationale. De nombreux doutes avaient entouré ce premier essai nord-coréen. L'explosion atomique n'avait été confirmée que tardivement et son « succès » revendiqué largement contesté. Ce nouveau test sonne comme un défi à la communauté internationale qui tente depuis six ans de convaincre le Nord de renoncer à ses ambitions atomiques contre une importante aide énergétique. Ces négociations au long cours entamées en août 2003 sont aujourd'hui dans les limbes, suspendues au bon vouloir de Pyongyang sourd aux semonces internationales et adepte de longue date d'une diplomatie de « bord de gouffre ». La Corée avait ainsi fait fi des résolutions de l'ONU adoptées en 2006 après son premier test nucléaire. Le Conseil de sécurité de l'ONU avait condamné par ailleurs le 13 avril un tir de fusée balistique effectué le 5 avril par la Corée du Nord et a renforcé le régime de sanctions mis en place à son encontre en 2006. En réponse à cette condamnation, Pyongyang avait annoncé son retrait des négociations à Six (Russie, Corée du Nord et Corée du Sud, Etats-Unis, Japon et Chine), l'arrêt de sa coopération avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et la réactivation de ses installations nucléaires. Pyongyang avait menacé fin avril de procéder à un nouvel essai nucléaire et exigé des « excuses » des Nations unies. « Le deuxième test est arrivé plus tôt que prévu et illustre la colère grandissante du Nord à l'égard de Washington », a estimé Kim Yong-hyun, chercheur à l'université Dongguk de Séoul. Plus que cela, et ultime défi, la Corée du Nord menace de procéder à d'autres essais nucléaires si les Etats-Unis poursuivent « leur politique d'intimidation » contre Pyongyang. Ce sont là les propos d'un haut responsable de l'ambassade nord-coréenne à Moscou. Cette source a mis en garde contre « la possibilité d'autres essais nucléaires » dans le cas où « les Etats-Unis et leurs alliés poursuivent leur politique d'intimidation à l'encontre de la Corée du Nord ». La Corée rejoint donc le cercle très fermé des puissances nucléaires, et du coup, cela étend la course que d'aucuns tentent de freiner.