C'est la continuité sur toute la ligne avec un léger lifting. A l'arrivée de nouveaux ministres et le départ de quelques membres de l'ex-gouvernement s'ajoute le changement d'intitulé pour certains ministères et l'installation d'un ministère délégué chargé du budget et de la prospective. Ainsi, le ministère de l'Industrie, de la PME et de la promotion de l'investissement (MIPPI) redevient ministère de l'Industrie et des Mines. La PME a carrément disparu de l'organigramme du gouvernement alors que la prospective rattachée auparavant à la statistique a été associée au budget à travers un ministère délégué aux Finances. Dans la forme, le changement opéré s'apparente à un jeu de mots, mais qu'en est-il réellement dans le fond ? C'est à ce niveau que la question reste posée. Pourquoi avoir éjecté la PME qui était auparavant liée tantôt à l'investissement, tantôt à l'artisanat ? Quels que soient le cas ou l'affectation, au cours des trois premiers mandats de Bouteflika les résultats enregistrés en matière de développement d'un tissu de PME performant sont loin d'être probants. On a beaucoup plus assisté au cours de cette période à la création de petites entreprises dans le commerce ou les services via les différents dispositifs (Ansej, CNAC…). Le recensement économique de l'Office national des statistiques (ONS) le confirme d'ailleurs. Aussi, les enveloppes financières dégagées pour la mise à niveau des entreprises n'ont pas eu les résultats escomptés. Ce dossier a à maintes reprises fait objet de litiges et de polémiques entre le ministère de la PME et de l'Artisanat et celui de l'Industrie. Le bilan est là, aujourd'hui, pour montrer l'inefficacité de ce programme sur le terrain. Est-ce pour toutes ces raisons que les pouvoirs publics ont jugé utile de se passer d'un ministère dédié à la PME ? Pour l'heure, les choses ne sont pas claires. L'autre dossier ayant marqué les tergiversations et les hésitations au cours de ces dernières années est la prospective. Un chapitre occulté au début avant d'être réhabilité superficiellement et être de nouveau effacé de l'organigramme de l'Exécutif lors du remaniement de septembre 2013… Et d'être remis en place aujourd'hui d'une manière discrète. En somme, durant les deux premiers mandats de Bouteflika marqués par l'importance des recettes en hydrocarbures, la prospective et la planification ne faisaient pas partie des outils de gestion utilisés. Ce n'est qu'après la crise économique de 2008, précisément en 2009, qu'il y a eu des tentatives de réhabilitation de la prospective. Mais sans plus. On efface tout et on recommence A chaque fois qu'un travail est entamé en termes de prospective et de planification, il est vite coupé au milieu ou relégué au second plan. On efface tout et on recommence. Et pourtant, la nécessité d'un système national fiable de la prospective comme outil d'aide à la prise de décision publique a été soulignée à maintes reprises, que ce soit par les experts en la matière ou par les membres de l'Exécutif. C'est en fait une manière de définir les objectifs contenus dans les politiques publiques. Cependant, pas de place à un travail de fond dans ce cadre. En effet, avec la création d'un Commissariat général à la prospective et à la planification sous la direction de Sid Ali Boukrami en 2006, ils étaient nombreux à croire à la réhabilitation de la planification après avoir été assimilée pendant de longues années à l'économie dirigée. Mais les espoirs sont vite tombés à l'eau. Le CGPP a, dans un premier temps, mis beaucoup de temps avant d'avoir un cadre juridique. Trois ans de perdus depuis la date de son annonce et celle de son officialisation. Le CGPP n'est devenu en effet effectif qu'à partir de 2009, conformément à une réorganisation arrêtée en vertu du décret présidentiel n°09-220 du 24 juin 2009. Il était même question que le CGPP mène une étude sur la diversification de l'économie, une urgence expliquée à l'époque par la crise économique mondiale. Ce que le Commissariat chargé théoriquement d'assister le gouvernement dans le choix et l'élaboration de sa stratégie économique a fait. Une série de propositions avait été élaborée. Le plan des investissements publics 2010-2014 a été même soumis, dans sa phase de conception, à l'analyse du CGPP qui a eu également à tracer les lignes directrices et la méthodologie à suivre dans la formulation des projets contenus dans ce plan.Tout un travail pour rien. Car vite oublié avec l'arrivée en mai 2010 d'Abdelhamid Temmar (qui était à la tête du ministère de l'Industrie et de la Promotion des investissements) comme ministre de la Prospective et des Statistiques avec Sid Ali Boukrami, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Prospective et des Statistiques, chargé de la statistique. L'accent a été mis sur la stratégie Algérie à l'horizon 2030 à travers le lancement d'une étude sur le développement éco-social de l'Algérie avec l'appui des sud-coréens. Là aussi le travail est suspendu puisque deux ans plus tôt Bachir Msitfa est nommé comme Secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de la Prospective et des Statistiques. Ce dernier arrive avec une nouvelle feuille de route qu'il n'a pas eu le temps d'appliquer puisque le portefeuille a été éjecté du gouvernement lors du remaniement de septembre 2013 pour revenir aujourd'hui sous une autre forme. Et pour quels résultats encore ? A la lumière du communiqué rendu public à l'issue du premier Conseil des ministres tenu sous Bouteflika 4, rien n'indique le chemin à suivre dans ce cadre. Faudrait-il attendre que le plan d'action pour ce quinquennat soit dévoilé pour voir. Mais ce qui est certain pour l'heure, c'est que du temps et de l'argent l'Algérie en a assez perdus.