Ajourné le 13 octobre 2009 par le juge qui avait ordonné un complément d'information assorti d'un refus de mainlevée sur les 3 thoniers turcs arraisonnés au port de Annaba, le procès de l'affaire des 210 tonnes de thon rouge, dans laquelle sont inculpés 6 armateurs turcs et un algérien ainsi que le secrétaire général du ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques et le directeur central des pêches maritimes et océaniques (DPMO), est enrôlé pour le 8 mars prochain au tribunal de Annaba. Cependant, Benbakir Mostepha, le juge qui avait traité l'affaire auparavant, ne statuera pas cette fois sur le dossier. Un autre jeune magistrat a été désigné pour trancher sur l'affaire, classée parmi les 5 plus grandes qui ont marqué l'année 2009 en Algérie. « Est-il utile pour la manifestation de la vérité et une bonne application du droit que cette affaire soit transférée à un autre juge à cette phase ultime du dossier ? », s'interrogent plusieurs hommes du prétoire. En prolongeant le suspense, Benbakir Mostepha avait satisfait à une partie de la requête principale du procureur de la République, présentée une semaine auparavant, lors des plaidoiries où il avait requis 8 ans de prison ferme à l'encontre de Boudamous Fethi (secrétaire général du ministère de la Pêche) ; 6 ans de prison ferme contre Allam Mohamed (directeur central de la pêche) et 5 ans de prison ferme pour l'armateur algérien et les 6 turcs, assortie d'une amende évaluée à 10 fois la valeur de 210 tonnes de thon, la saisie de leurs navires ainsi qu'un complément d'information sur toutes les opérations de pêche au thon réalisées depuis 2006 pour situer les responsabilités de chacun. C'est ce qui a été fait puisque le juge d'instruction près le tribunal correctionnel de Annaba vient de boucler le dossier. Dans ce contexte, plusieurs représentants de corps constitués – gendarmerie, douane et garde-côtes – ont été entendus par le magistrat instructeur. Aussi, dans le but d'approfondir davantage ses investigations pour mieux cerner les responsabilités, le juge a auditionné les représentants des institutions du transport, de la pêche et des impôts. Selon d'anciens magistrats qui suivent de près ce dossier, l'instruction devrait déterminer en premier lieu la quantité du thon qui aurait été exportée par les armateurs turcs après la conclusion de la transaction. Tout a commencé, pour rappel, en juin 2009 lorsque les gardes-côtes ont intercepté, au large des côtes d'El Kala (El Tarf), Akuadem 2, Certer Ahmet 1 et Abdi Baba 3, trois navires turcs dont le dernier remorquait une cage contenant 210 tonnes de thon rouge vivant, avec l'équipage à bord. Ils ont été arraisonnés le 12 juin 2009 au port de Annaba et la justice a été saisie. Le scandale qui a éclaté avait fait réagir plus d'un, dont Necati Bigali, l'ambassadeur de Turquie en Algérie, qui avait réclamé la libération des bateaux turcs arraisonnés au port de Annaba. Au lendemain, c'est l'armateur du thonier El Djazaïr, auteur de la vente aux Turcs de « la cargaison de thon », qui sera appréhendé au port de Bou Ismaïl de Tipasa avec son embarcation. Criant au scandale, il avait déclaré avoir agi sur autorisation du secrétaire général du ministère de la Pêche. Ce dernier avait fait porter le chapeau à M. Allam, le DPMO, en l'accusant ouvertement d'être derrière l'affaire.