Nous avons reçu des personnes qui suffoquaient après le lancement des bombes lacrymogènes à l'intérieur du Tunnel. Pour être tombés, des asthmatiques et d'autres manifestants, qui se sont fracturé les membres inférieurs, ont été transférés vers l'hôpital par la Protection civile", témoignera le Dr Bouazid. Le comportement agressif et violent des forces antiémeutes contre la mobilisation pacifique des Algériens lors de ce 8e vendredi de contestation a été fortement condamné aussi bien par les citoyens à travers les réseaux sociaux que par la société civile. Les commentaires des uns et les déclarations des autres sur ce qui s'est passé avant-hier au Tunnel des facultés et à la place Audin, à Alger, battent en brèche le "démenti de la DGSN" qui nie tout "recours des éléments de la sûreté au gaz lacrymogène". En fait, des images et des vidéos des blessés partagées et les témoignages des équipes de secouristes bénévoles confirment bel et bien que la répression policière était au rendez-vous, avant-hier, en tirant des bombes lacrymogènes à l'intérieur du Tunnel des facultés ainsi que des balles en caoutchouc contre des manifestants pacifistes. Les manifestants qui ont toujours scandé — depuis le 22 février — le slogan de fraternisation avec les policiers, "khawa khawa", s'indignent et condamnent, à travers les réseaux sociaux, le traitement répressif des forces de l'ordre. Des internautes exigent "l'ouverture d'une enquête pour arrêter les responsables qui ont ordonné l'usage des bombes lacrymogènes et des balles en caoutchouc contre des manifestants pacifistes". Dans une déclaration rendue publique, le Syndicat national des médecins résidents joint sa voix aux nombreux Algériens qui ont dénoncé le recours à la "machine répressive" contre des citoyens qui aspirent à un changement politique du système. Le SNMR, qui déplore "cette répression policière injustifiée", soutient "être témoin, par le biais des équipes des médecins bénévoles présents sur le lieu des manifestations et des points d'urgence, des agissements violents et illégitimes des forces de l'ordre en dépit du caractère pacifique de la marche". Le bilan de la "répression policière" lors de ce 8e vendredi communiqué par le président du bureau du syndicat en question, le Dr Bouazid Skandar, est sans appel. "Environ soixante-dix personnes ont été secourues et prises en charge à la place Audin, parmi elles beaucoup d'enfants, des personnes âgées, des femmes et des asthmatiques. En raison des bousculades qui ont suivi la charge répressive contre la mobilisation pacifique, des secouristes bénévoles, ainsi que ceux du Croissant-Rouge ont évacué des citoyens et des enfants blessés vers un hôpital de campagne érigé à la rue de Mulhouse pour leur prodiguer les premiers soins. Nous avons reçu des personnes qui suffoquaient après le lancement des bombes lacrymogènes à l'intérieur du Tunnel. Pour être tombés, des asthmatiques et d'autres manifestants, qui se sont fracturé les membres inférieurs, ont été transférés vers l'hôpital par la Protection civile", témoignera le Dr Bouazid, qui rappellera que "des médecins bénévoles ont même pris en charge des citoyens touchés par des balles en caoutchouc aux membres inférieurs et au thorax. Il y a eu des personnes souffrant de brûlures et d'autres de contusion". Par ailleurs, le SNMR déplorera "l'utilisation excessive et sans réserve des canons à eau, ainsi que des gaz lacrymogènes contre des manifestants". Pour sa part, La Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh), qui salue la grande mobilisation populaire, dénonce "l'usage des bombes lacrymogènes lors de manifestations pacifiques, notamment dans le Tunnel des facultés qui a provoqué des scènes de panique, des évanouissements et des sensations d'étouffement chez des personnes âgées, malades et à mobilité réduite". La Laddh n'omet pas de préciser que "les tentations répressives face aux revendications politiques de tout un peuple ne feront qu'exacerber et compliquer la situation". L'organisation que préside Noureddine Benissad réitère son appel à l'ensemble du peuple "à maintenir intacte la mobilisation populaire, pour imposer la transition démocratique et le démantèlement du système autoritaire". L'association Rassemblement-Actions-Jeunesse (RAJ) témoigne, pour sa part, sur le comportement "violent et répressif" des policiers contre des citoyens qui se sont mobilisés pacifiquement pour "dénoncer une transition clanique au sein du pouvoir". "Malgré le caractère pacifique de la marche, la police a usé de la violence pour réprimer la marche à Alger en recourant aux canons à eau, aux bombes lacrymogènes et même aux balles en caoutchouc", lit-on dans la déclaration du RAJ qui interpelle par la même occasion le pouvoir en place "sur le respect du droit de manifester et de se rassembler à Alger et sur tout le territoire national". Hanafi H.