La quatrième édition du Salon international de la récupération et de la valorisation des déchets (REVADE), qui s'est déroulé à la Safex, touche à sa fin aujourd'hui. Plus de 50 exposants nationaux et étrangers y ont pris part. Zoom sur quelques idées de recyclage originales ! Lors de cette édition, organisée conjointement par la Chambre algérienne du commerce et d'industrie (CACI), et l'Agence nationale des déchets (AND), dont le thème est «L'entrepreunariat circulaire, un modèle économique d'avenir», différents modes de recyclage y étaient exposés. De la batterie au cuir en passant par le carton et le verre. «Tout est recyclable», assurent les exposants. Selon eux, le but premier est la protection de l'environnement mais pas que ! «On y gagne aussi à récupérer la matière première gratuitement. Cela nous permet de vendre notre produit final à moindre coût», expliquent-ils. Des sacs en bâche De la maroquinerie à base de bâche, des panneaux publicitaires, c'est possible. Amina Cherrad, designer de la marque Rovaldine, en compagnie de ses deux associées, ont flairé la bonne affaire et se sont vite lancées une fois leur formation achevée. En effet, elles sont 80 femmes à avoir suivi une formation, en décembre dernier, sur l'entrepreunariat, le commerce, le désigne et la couture, initiée par l'Agence de coopération internationale allemande pour le développement GIZ, qui a accompagné le ministère de l'Environnement pour le lancement d'un projet pilote à Annaba dans le cadre d'une coopération algéro-allemande dans le domaine de l'environnement. «Suite à cette formation, de nombreuses participantes ont créé des entreprises. Avec mes associées, nous avons lancé Rovaldine», confie Amina Cherrad. «Nous avons décidé de recycler les bâches jetées dans la nature. C'est bénéfique pour l'environnement et économique pour nous !», ajoute-t-elle. L'idée est donc de récupérer gratuitement cette matière première, soit chez les APC ou alors chez les boîtes de communication directement. Et pour donner une seconde vie à ces déchets, les jeunes femmes ne manquent pas de créativité. Shopping bag, pochettes, tabliers pour coiffeuses, trousses de toilette… en bâche ! Tout y est ! Pour ce qui est du processus, A. Cherrad confie qu'il n'y a pas plus simple. «On récupère la bâche. On la nettoie. Entre-temps, on dessine le modèle souhaité. On découpe les pièces nécessaires sur la bâche. Puis arrive le tour de la couturière qui rassemble le tout. Tout est fait main. Nous n'avons besoin d'aucune machine», conclut-elle. Le produit final sera donc du made in Dz, 100% fait main et en plus, à base de matière recyclée ! Les batteries, mines de plomb, acide et plastique Des métaux toxiques, précieux, du plastique mais aussi des acides. Dans les batteries, on retrouve un peu de tout. Des matières valorisables, mais aussi dangereuses et polluantes. C'est pour cela que leur recyclage est plus qu'essentiel. Un créneau dans lequel s'est lancée Sarl Fabcom, une unité dédiée au recyclage des batteries usagées, créée en 2019 à Aïn M'lila dans la wilaya d'Oum El Bouaghi. Une nouvelle activité qui génère de l'emploi. «3 mois à peine après son lancement, elles sont 120 personnes à avoir décroché un poste au sein de cette unité», assure Ramdane Bouterfa, représentant de l'entreprise. Pour ce qui est du processus, M. Bouterfa explique que l'unité fait la collecte chez les particuliers, les revendeurs et les entreprises, et ce, sur le territoire national. «Celles-ci nous sont vendues au prix de 50 DA le kilo», précise-t-il. Les batteries sont ensuite acheminées vers l'unité de recyclage pour être placées dans un grand bassin. «Elles sont ensuite portées par un crappeur, direction le broyeur qui les détruit», explique-t-il. Résultat des courses : 3 composants importants sont récupérés suite à cette opération, à savoir le plomb, l'acide et le plastique. M. Bouterfa soutient que le plastique est stocké pour être remis à la vente. Pour ce qui est de l'acide et le plomb, ces deux matériaux sont traités pour être réutilisés dans l'unité de production de batteries que compte Sarl Fabcom créée en 2015. Celle-ci a d'ailleurs une capacité d'un million de batteries par an. Finalement, rien ne se perd, tout se récupère. Le représentant de l'entreprise assure que l'avantage de ce processus est d'abord écologique, car les composants de la batterie sont nocifs pour l'environnement. Ensuite, il y a le volet économique qui n'est pas à négliger. «Avant le recyclage, on devait acheter la matière première. Aujourd'hui, ce procédé nous permet de faire des économies et entraîne une baisse dans le prix de la batterie neuve», explique-t-il. Ce dernier soulève néanmoins un problème : «Nous avons un problème dans la collecte des batteries. Les ferrailleurs et le marché noir détiennent le monopole. Ils les rachètent toutes, puis les revendent au prix fort, ce qui ne nous arrange pas. On souhaite que les ministères de l'Environnement, du Commerce ou de l'Industrie, qui ont une relation directe avec la collecte des batteries, organisent les collectes.» Des plateaux d'alvéoles en carton Trop de cartons sont encore jetés dans les rues malgré les nombreuses campagnes de sensibilisation. Pourtant, et afin de mettre un terme à ces dépôts sauvages qui se multiplient, la solution est simple : le recyclage. Almadar For Paper, une entreprise algérienne s'est rapidement intéressée à ce créneau, et ce, depuis 2006. Elle s'est alors spécialisée dans la récupération du papier et carton, enregistrant un volume annuel de collecte de plus de 35 000 t de papier et carton. «On fait la collecte de papier et carton chez des entreprises privées et étatiques (imprimeries, sociétés disposant d'archives périmées,ect.), et ce, sur les 48 wilayas», explique Hamza Lounes, assistant commercial chez Almadar. Ce dernier explique que l'entreprise rachète également chez les particuliers : «Il suffit que quelqu'un, à bord d'une petite camionnette, fasse une petite tournée et collecte du carton qu'il trouve sur son chemin, il peut nous le vendre à 5 DA le kilo». Une fois collectée, toute la matière première récupérée est stockée dans un hangar. Puis vient la phase du tri sélectif. «Souvent, du scotch et du plastique sont collés au carton récupéré. On procède à une opération de nettoyage. On enlève tout ce qui est corps étranger, verre, scotch ou plastique», explique Hamza Lounes. Une fois cette étape passée, le papier et le carton vont passer dans un broyeur, puis compactés et stockés afin d'être remis à la vente. Pour ce qui est des clients potentiels, on retrouve à titre d'exemple les fabricants des plateaux d'alvéoles pour œufs. «Si on s'est intéressé à cette activité, c'est non seulement par souci de sauvegarder l'environnement, mais aussi parce que c'est un créneau qui crée de l'emploi», avoue M. Lounes. En effet, tout le monde peut collecter du carton. A 5 DA le kilo, n'importe quel jeune chômeur peut facilement empocher 5000 DA/jour contre une tonne de papier et carton. Notez qu'en termes de chiffres, l'entreprise Almadar enregistre 25 000 t de papier recyclé par an. Des fertilisants agricoles en cuir Qui a dit que le cuir n'est bon que pour le prêt-à-porter ? Et si à partir de cette jolie matière, dont les déchets sont pourtant si nocifs pour l'environnement, on peut créer des fertilisants agricoles ? Une idée ingénieuse qu'a trouvée la société publique algérienne des cuirs et dérivés (ACED) à l'aide de son partenaire italien. Cette société, qui représente 40% de l'industrie du cuir en Algérie, engendre chaque année 7500 t de déchets de cuir traités au chrome, qui est une substance très nocive pour l'environnement. «Nous stockons ces déchets, qui ont dépassé la toiture de nos usines, au sein même de nos unités depuis des années déjà. Et aussi longtemps qu'aucune solution ne s'offrait à nous, cela nous coûtait extrêmement cher ! On payait d'importantes taxes, allant jusqu'à 10 millions de dinars par an, par unité», confie Nasser Lazirou, son directeur. Ce dernier se dit aujourd'hui content d'avoir trouvé la solution avec un partenaire italien, qui a inventé un procédé technologique, via le principe de l'hydrolyse à haute température et pression, qui détruit la structure du cuir, élimine le chrome et crée un fertilisant agricole bio à la sortie. Cette solution est bénéfique pour l'environnement, car ces déchets contiennent du chrome, un produit très nocif. «D'autant plus qu›on ne peut ni les incinérer ni même les éliminer dans les centres d'enfouissement technique car ils présentent des risques de contamination des nappes phréatiques», ajoute-il. Qu'en est-il aussi des déchets de cuir émanant du secteur privé ? Nasser Lazirou affirme que 12500 tonnes de déchets sont annuellement engendrés par les entreprises privées. «Chez nous, les déchets sont stockés au sein de nos unités, contrairement aux privés qui les jettent dans la nature», se désole-t-il. Mais cette situation ne va pas durer une fois l'usine lancée. En effet, M. Lazirou assure que par le biais du ministère de l'Environnement, «on va les obliger à ramener leurs déchets chez nous, car une usine privée, qui exerce et qui est en production, devra fournir un certificat attestant qu'elle ramène ses déchets vers cette usine et payer afin qu'ils soient traités. Finalement, au lieu de payer la taxe sur l'environnement, ils vont payer pour détruire ces déchets», explique-t-il. Ce dernier précise néanmoins que dans une telle affaire, l'investissement est tellement important qu'il n'y a pas de profit. «La vente du fertilisant servira à équilibrer la gestion de l'usine», fait-il savoir. D'ailleurs, cette dernière devrait être lancée dans 6 mois à Rouiba. Des paillettes en verre Aujourd'hui encore, les bouteilles en verre sont jetées dans la nature. Pourtant, le recyclage, avec tout ce qu'il offre comme avantage, devrait être plus répandu. En effet, le verre est tenace concernant sa décomposition. Il met 3 ou 4 millénaires à se décomposer dans la nature. D'un autre côté, créer du verre «neuf» à partir de verre recyclé consomme beaucoup moins d'énergie : une tonne de verre recyclé permet d'économiser une demi-tonne de CO2. Abdennacer Ghaïb est importateur de machine broyeuse de verre. «Avec toutes les bouteilles jetées, on ne retrouve pas pour autant énormément de recycleurs de verre», se désole-t-il. «A l'aide de la broyeuse, le verre est décomposé en granulés. Ces derniers passent par un système de tamis. Tout dépend du diamètre souhaité», explique-t-il. Le produit final est majoritairement destiné aux fabricants de carrelage. «A la place du granito, on utilise le verre. Ca donne un aspect plus beau et plus agréable. D'autres l'utilisent pour la décoration et les peintures afin de donner un aspect brillant. Il est également utilisé pour les filtres à piscine», propose-t-il. Le verre broyé peut aussi avoir d'autres utilisations. En effet, après avoir été récupéré, le verre est broyé pour devenir une fine poudre blanche. Cette transformation en poudre, est appelée «micronisation», puisque le verre se transforme en petits morceaux de la taille d'un micromètre et remplace ensuite une partie du ciment utilisé dans la fabrication du béton. L'argent des radiographies Quelle est la relation entre les radiographies et les bijoux en argent ? A priori, rien et pourtant ! Le recyclage des films de radio nous offre la matière première pour nos bijoux. «Il ne faut surtout pas les jeter à la poubelle, puisque les anciennes radiographies sont souvent de type argentique et contiennent des sels d'argent, toxiques pour l'environnement», explique une représentante de l'Eurl Tadjer, Mohammed Yasser, une entreprise de récupération de déchets, installée à Taourirt El Hadjedj, Beni Yenni, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Ce sont donc des déchets ménagers dangereux et les filières conventionnelles de traitement des déchets ménagers ne sont pas adaptés. Le recyclage de ce type de déchets s'impose. Cette dernière explique : «On fait la collecte auprès des hôpitaux et des grandes sociétés qui font ce genre de clichés. Vient alors l'étape du traitement pour en sortir avec du nitrate d'argent qui servira par la suite à diverses utilisations», conclut-elle. Il est à noter que le recyclage d'une tonne de clichés permet de récupérer 10 kg d'argent.