Pour le 47e vendredi consécutif, les Oranais sont sortis en grand nombre dans les rues pour marquer leur fidélité au hirak, qui, dans quelques semaines à peine, soufflera sa première bougie. Hier, malgré le temps maussade, ils étaient nombreux les Oranais à s'être donné rendez-vous à la place du 1er Novembre pour entamer la marche aux cris de «Aadala horra mostakila !» (Pour une justice libre et indépendante). Comme vendredi dernier, un important dispositif policier a accompagné la marche, du début jusqu'à la fin, pour éviter toute confrontation directe entre hirakistes et baltaguia. Ces derniers, d'ailleurs, étaient quasi absents, si on excepte un petit groupuscule d'une quinzaine d'adolescents au niveau du lycée Lotfi. Pour le reste, il faut reconnaître que la marche d'hier, à laquelle a pris part le président du MDS, Fethi Ghares, était moins imposante que celle des vendredis précédents. Elle a rappelé, pour beaucoup, les «vendredis estivaux», ceux des mois de juillet et août derniers, quand la mobilisation était réduite à son strict minimum à Oran et que le nombre des hirakistes oranais vacillait entre 3000 et 5000 personnes. Ainsi hier, on était bien loin des «pics» du 6 décembre dernier (15 000 manifestants, selon les estimations), du 20 septembre 2019 (20 000) ou encore du 1er novembre 2019 (30 000). Cela dit, les quelques milliers d'irréductibles hirakistes qui ont répondu présent à la 47e marche, hier, étaient animés d'une détermination sans pareille ; on comptait parmi eux un certain nombre de supporters du MCO, qui ont fait, hier, leur grand retour au hirak. Les revendications sont toujours les mêmes : la primauté du civil sur le militaire «Ghir bel silmiya ennahou el asker mel Mouradia !» (Par notre pacifisme, on enlèvera les militaires de la Présidence) ; la libération du reste des détenus d'opinion et politiques, «Makan la hiwar makan la hadra, ettalgou Tabbou w zidou Boumala !» (Il n'y aura pas de dialogue dans ces conditions, libérez Tabbou et Boumala) ; l'indépendance de la presse «Ya sahafa ya chiatine w ntouma sbabna yal madlouline !» (Les médias, bande de larbins, vous êtes la source de notre malheur) et enfin l'indépendance de la justice «Aadala horra moustakila !» Une étudiante a inscrit sur sa pancarte : «La jeunesse s'est politisée, elle fera tout pour relever l'Algérie», alors qu'une autre avait mis sur la sienne : «La révolution n'est pas une course de vitesse, mais d'endurance. Elle continue». A la place attenante au siège de la wilaya, une exposition en plein air, chargée d'émotion, a été organisée, qui revenait sur les Moujahidate de toutes les wilayas du pays qui ont combattu l'armée coloniale, tandis que les jeunes, notamment ceux du MCO, entonnaient des chants pour célébrer Yennayer, tout en lançant, de temps à autre, des piques aux gens de la politique. Enfin, bien que fraîchement installés, certains membres du gouvernement Tebboune commencent d'ores et déjà à être interpellés par les hirakistes, comme en témoigne la pancarte d'un manifestant, fidèle du hirak, qui s'adressait à la nouvelle ministre de la Culture ainsi qu'au ministre délégué chargé de l'Industrie cinématographique : «Malika Bendouda et Bachir Youcef Sehaïri : libérez Papicha et Abou Leïla !» A rappeler que Papicha et Abou Leïla sont deux films algériens produits en 2019, mais qui ne sont toujours pas passés dans les salles algériennes à cause de la censure administrative.