"Je préfère une vérité nuisible à une erreur utile : la vérité guérit le mal qu'elle a pu causer", disait le philosophe et poète allemand Goethe. Cette citation résume à elle seule le malaise et l'incompréhension qui taraudent les Algériens depuis l'enclenchement de la polémique du "Petit Futé". Il faut dire que ces derniers jours, les Algériens ont découvert par la grâce et l'intelligence d'un éditeur français qu'ils sont tous des crétins frustrés qui lèvent facilement la main sur leurs femmes lesquelles se donnent, toujours selon les remarques du Petit Futé, facilement aux hommes étrangers. Exagérés ou pas, interprétés hors contexte, reflet d'une réalité bien palpable, les avis et les lectures divergent sur ces passages qui figurent bel et bien dans le guide touristique francophone le plus connu au Monde. Ceci dit, d'aucun n'a omis de préciser que ce guide s'immisce là dans un territoire qui est bien étranger au tourisme. D'ailleurs, la presse française a, elle-même, constaté que l'édition 2009-2010 du «Petit Futé» regorge de clichés, de propos violents et racistes à l'encontre de l'Algérie. Ainsi, le Journal de Dimanche et le Paris Match n'ont pas manqué de relever que les rédacteurs du «Petit Futé» ont versé réellement dans la "caricature" la plus abjecte et dans un «racisme étonnant», pour reprendre l'expression de Paris Match. Mais contre cette vague d'indignation, Jean-Paul Labourdette, directeur des collections du «Petit Futé», n'a cherché, en guise de défense, qu'à discréditer l'auteur de la contribution, publiée dans les colonnes d'El Watan, Mourad Kezzar, à coup de graves accusations. Celles-ci ont réussi au début à jeter le doute sur l'honnêteté de cet économiste spécialisé en tourisme. Toutefois, Mourad Kezzar, l'homme par qui le scandale est arrivé, a révèle hier, contrairement à ce que prétendait l'éditeur du guide français, qu'il n'a jamais fait partie du collectif du «Petit Futé», écartant des lors d'un revers de la main la thèse d'un ancien employé remonté contre son ex-employeur. Malheureusement, l'affaire est bien plus grave que cela. "Ce n'est que fin juillet dernier que j'ai reçu un exemplaire intégral en papier du guide. Et de toute façon, si la direction du Petit Futé juge que sur les atteintes à la dignité d'un peuple, à la morale, il y a un délai de prescription, c'est son problème. De la même façon, aller dire sur votre site que je suis un professionnel du tourisme, je trouve que c'est une façon de discréditer mon article. J'ai fait une contribution, en tant que journaliste, en tant que professionnel du tourisme, pour dire à l'opinion publique : voilà ce que contient le guide le plus vendu en langue française concernant l'Algérie et dont il est censé faire la promotion", a souligné hier Mourad Kezzar sur parismatch.com en guise de réponses aux accusations prononcées par Jean-Paul Labourdette sur le site Rue89. Un ministère aux abonnés absents ! En réalité, beaucoup noteront que les véritables questions se posent toutes sur le financement public d'un Guide Touristique Français qui aligne les passages les plus méprisants envers l'Algérie ! Enrichis par d'innombrables pages publicitaires d'institutions et d'organismes publics de notre pays, le "Petit Futé" fait des guides touristiques pour l'Algérie depuis 2004. Le ministère du Tourisme travaille depuis cette date-là avec le "Petit Futé" pour améliorer l'image de l'Algérie. Or, le tableau que dresse le «Petit Futé» n'est vraiment pas rose pour inciter des touristes à venir dans notre pays ! Contacté par nos soins durant toute la journée du mardi, aucun responsable du ministère du tourisme n'a pu répondre présent à nos sollicitations "insistantes". Une fois le téléphone sonne dans le vide, une autre, les interlocuteurs sont en réunion, bref, le ministère du tourisme est, malheureusement, aux abonnés absents. Alors que cette polémique fait rage, au-delà même de nos frontières, depuis une semaine, aucun responsable de ce département n'a jugé utile d'intervenir pour éclairer "la lanterne" de l'opinion publique ! L'erreur utile du "Petit Futé" nous a divulguée enfin la vérité nuisible de notre pays : celle qui a trait à des autorités publiques éternellement démissionnaires lorsque l'honneur et la dignité de l'Algérie sont voués aux gémonies.