Au même titre que les vendeurs informels, des institutions publiques squattent les rues de la capitale. Des barrières ont été installées là, obstruant le passage vers le passage de l'hôtel Es Safir et le bout de ruelle qui relie la rue Asselah Hocine au Front de mer. Les services de l'APN ont placé des garde-fous lors de l'ouverture de la session d'automne du Parlement. Les piétons étaient contraints, ce jour-là, de marcher sur la chaussée. Mais, passé ce moment solennel, les barricades aurait dû être enlevées. Mais elles sont toujours là. Plusieurs rues sont régulièrement fermées dans cette partie de la ville. Des herses, des blocs en béton, des chaînes en fer sont installés par l'EPIC de wilaya, les Ateliers d'Alger, dans tout le centre-ville où se concentrent plusieurs administrations publiques. Les passages des édifices d'institutions de souveraineté, (APN, Sénat), ou même économique (banques) ont été fermés à la circulation : des portes en fer forgé sont installées aux extrémités des rues gardées par des policiers. Au moins quatre ruelles adjacentes au boulevard Zighout Youcef, d'à peine 200 m, ont également été fermées à tout passage automobile. Le porche du siège de la wilaya d'Alger, œuvre néo-mauresque, de l'architecte français Henri Petit, est fermé aux piétons. Les autorités de la wilaya en ont décidé ainsi depuis plusieurs années. Les véhicules ne peuvent plus traverser ces bouts de rue et les piétons trouvent du mal à y passer sans être apostrophés par les policiers en faction ou même fauchés par un véhicule roulant à vive allure. Beaucoup choisissent de marcher sur le trottoir d'en face. «L'état d'urgence qui justifiait toutes ces mesures de sécurité a été levé. Les rues fermées à la circulation devaient être libérées tout de suite après. Il n'en est rien. Que craignent ces responsables planqués derrière leurs bureaux ?», s'interroge un sexagénaire, qui réside à la rue Abane Ramdane. Les rues menant à l'imposant tribunal de Sidi M'hamed, qui a pris, avec le temps, le nom de l'organisateur du congrès la Soummam, ont été fermées : plus aucun riverain ne peut garer son véhicule au bas de son immeuble. Sauf quelquefois des pistonnés. «Les rues sont bloquées par décision du tribunal. Personne ne peut plus garer ou même traverser par les rues de notre quartier. Mais ce qui agace le plus les riverains dépossédés de leurs rues, c'est de constater que cette décision n'est pas appliquée à tous. Certains pontes, d'éminents avocats du barreau ou des copains du policier du coin ont accès à cette partie du tribunal fermée à double tour», s'indigne Slimane, qui affirme être contraint de laisser sa voiture au parking de l'Egctu de Tafourah. «Je ne peux plus garer ma voiture dans mon quartier. Un soir où ma sœur est tombée malade, j'étais obligé de courir comme un demeuré à Tafourah, alors que j'avais la possibilité d'avoir mon tacot garé sous ma fenêtre», se désole-t-il. à bas les barricades ! Les résidants ont organisé des actions de protestation pour faire revenir sur sa décision le président du tribunal. Peine perdue. Les passages, fermés progressivement au début des années du terrorisme, ne sont toujours pas libérés et les habitants n'ont plus qu'à ronger leur frein. «Les résidants qui ont écrit au président du tribunal ont vite déchanté. La peur des représailles. On va vite vous coller une infraction sur le dos. A quoi bon insister ! ‘‘Balak baylek'' (attention l'Etat !) comme dirait ma grand-mère», s'indigne Slimane. Aucune plaque portant le numéro d'une quelconque décision prise par la wilaya déléguée de l'APC n'est installée. Le fait accompli tient lieu de loi. La décision des hautes autorités de «nettoyer» les villes du pays aurait pu faire renaître un espoir chez les citoyens. «Le ministre de l'Environnement, Amara Benyounès, a parlé de libérer les trottoirs des revendeurs informels. Il serait aussi sage de dégager les rues des blocs de pierres et des chaînes de fer. Pour que la ville respire, ces obstacles qui ferment les rues des administrations publiques comme les Douanes nationales, les ministères, les commissariats ou même les maisons de certains particuliers, autrefois heureux commis de l'Etat, les autorités doivent les rouvrir. Même les livraisons et le ramassage des ordures ménagères devraient être faits de nuit. Ces décisions rendraient les rues à leurs vrais propriétaires. Ne dit-on pas que le droit de circuler est un droit constitutionnel (art 44 de la Constitution de 1996» ? Alors, il suffit juste de l'appliquer sans tarder», estime Slimane qui espère circuler librement dans son propre quartier.