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Le Qatar : évolution ou révolution?
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Publié dans El Watan le 07 - 08 - 2013

Le Qatar et sa diplomatie du carnet de chèques sont devenus incontournables dans l'actualité : il ne se passe pas un jour sans qu'on entende parler d'investissements qataris dans le monde entier et dans la majorité des secteurs.
On entend moins souvent parler des réelles ambitions du deuxième pays le plus riche du monde et de la géostratégie qu'il mène, à croire que le Qatar est une crainte pour les étrangers, même s'il est une nécessité pour certains systèmes économiques en période de crise. Pourtant, cet état microscopique, peuplé de 1,8 million d'habitants et à peine plus grand que l'Ile de France, sait faire parler de lui. En dehors de son territoire et grâce à ses pétrodollars, le Qatar peut, aujourd'hui, acheter à peu près tout ce qu'il souhaite et investir où il le désire. L'émirat est présent partout : dans l'arène diplomatique, dans la sphère économique et sur la scène médiatique. Avec ses ambitions qui sont sans limite, le Qatar se donne les moyens d'être omniprésent.
Depuis son indépendance en 1971, le Qatar s'est imposé au point que cet activisme multidimensionnel et pluridisciplinaire commence à déranger. Le Qatar étonne : il inquiète certains et fascine d'autres. Investisseur frénétique, nouveau maître de l'industrie et du luxe, le Qatar entend devenir le leader incontesté dans la plupart des domaines. Référence en matière d'expansion et de finance ainsi que dans les milieux économique, diplomatique, médiatique, sportif ou culturel et à l'échelle mondiale, une interrogation complexe et majeure se pose :
Que révèlent les multiples investissements du Qatar en France et dans le monde sur son ambition ?Dans cette société musulmane et islamique, le niveau de vie des Qataris est très élevé et le taux de chômage quasi nul : on comprend alors pourquoi le Qatar n'a pas connu de printemps arabe, ce qui aurait pu le freiner dans son expansion. Même si aucun parti politique n'est autorisé, les Qataris disent avoir une liberté d'expression et de pensée. Peut-on vraiment parler de liberté d'expression et de respect des droits de l'homme lorsqu'un poète est condamné à la prison à vie pour un écrit «offensant à l'égard de l'émir» ? Rappel des faits : le poète qatari, Mohammed Al-Ajami, a été condamné en novembre 2012 à la prison à vie (réduite par la suite à quinze ans) pour un poème qui rendait hommage à la révolution tunisienne et qui critiquait le manque de liberté dans le Monde arabe.
L'accusé n'a pas eu droit à la parole et il a été interdit à son avocat de plaider. Le Qatar cultive les paradoxes et désoriente ses partenaires. En investissant à l'étranger dans les pays en crise, comme la France, l'Italie, le Royaume-Uni, le Qatar cherche à être utile, indispensable. En ayant imposé un respect et une considération, d'autres pays ont recours au Qatar et demandent volontairement de l'aide pour se sortir de la crise. Les ambitions du Qatar sont loin d'être terminées. Le Qatar ne compte pas rester un simple producteur d'énergie. L'émirat veut se transformer en une société de connaissance, leader des pays arabes et incarnant la modernité.
De grandes universités ont vu le jour, notamment à Doha et des personnalités intellectuelles s'y sont d'ores et déjà installées. Le catalyseur de cette réussite est la chaîne de télévision qatarie, Al-Jazeera, première chaîne d'information en continu en arabe, lancée en 1996 par l'émir, qui a été créée à l'origine pour libéraliser le paysage médiatique arabe. Grâce à cette chaîne, le Qatar possède un avantage de première classe : l'émirat est petit, mais il se fait entendre partout dans le monde et se fait représentant des pays arabes. En moins de 20 ans Al-Jazeera est devenue un acteur incontournable et controversé dans le Monde arabe. D'ailleurs, un des consultants les plus connus de cette chaîne est Youssef Al-Qaradawi, islamiste extrême, ce qui laisse la presse s'interroger sur le financement des groupes islamistes par le Qatar.
A l'origine, le Qatar a d'abord soutenu le parti des Frères musulmans en Egypte (dont fait partie Al-Qaradawi), puis les révolutions arabes, gagnées par les islamistes, en commençant par la Libye. En effet, implicitement, ce sont le Qatar (sous-entendu l'émir) et Nicolas Sarkozy qui ont déclenché la guerre en Libye. Ils avaient pour but de faire tomber le dictateur et de récupérer le pays. Le Qatar avait pour volonté de transformer la Libye en un royaume wahhabite. L'émirat est le parrain de la Libye. Il a soulevé le CNT et l'a financé. Il y a ensuite une volonté plus complexe de la part des deux acteurs qui était d'hériter de la fortune de Kadhafi à sa mort : 165 milliards de dollars que tout le monde veut récupérer. Karim Sader l'a dit : le Qatar cultive les paradoxes.
Car sous le parrainage de la Libye par le Qatar, l'ambassade de France a été attaquée et l'assassinat de l'ambassadeur des Etats-Unis à Benghazi, en 2012, ces faits sont attribués aux groupes islamistes. Ce qui est encore plus ambigu c'est que le Qatar est le principal bailleur de fonds des islamistes et soutient activement le Hamas et autres mouvances islamistes. Par exemple, Abbassi Madani, leader historique du FIS en Algérie, a reçu l'asile politique de la part de Doha, Tariq Ramadan est devenu professeur à la faculté islamique de Doha, et les armes des djihadistes maliens proviennent de leurs pétrodollars.
Le Qatar mène une vraie politique panislamiste énigmatique. Comme en Egypte, en Libye et en Tunisie, il cherche à répandre l'islamisme. N'oublions pas que l'ambassade des Etats-Unis à Tunis a, elle aussi, été attaquée, en 2012, alors que le Qatar est un parrain de la Tunisie et un allié militaire des Etats-Unis. De plus, le Qatar et le parti islamiste au pouvoir en Tunisie, Ennahda, sont accusés d'être les commanditaires de l'assassinat de Chokri Belaïd, opposant au régime tunisien, assassinat donnant naissance aux premières manifestations anti-Qatar en Tunisie, berceau des révolutions arabes.
Le Qatar est donc un ami proche des islamistes, mais aussi un ami proche des Etats-Unis. Le paradoxe est le suivant : ses amis, les islamistes, sont l'ennemi numéro un de son ami les Etats-Unis. Idéologiquement opposés, les Qataris et les Etat suniens sont liés par leurs intérêts militaire et économique, liens surpassant donc les idéologies de chacun. Hormis la chaîne de télévision Al-Jazeera, l'autre instrument utilisé par le Qatar est le sport. Après avoir racheté le Paris Saint-Germain, et en avoir fait un grand club européen, et être devenu le premier sponsor officiel du FC Barcelone, le Qatar est devenu un acteur du football européen. En enchaînant les achats de joueurs toujours plus populaires grâce à ses offres alléchantes, l'émirat applique plus que jamais sa stratégie du carnet de chèques.
Grâce à ses porte-parole influents, comme Zidane, le Qatar attire un maximum de fans. Et après avoir gagné l'organisation des Coupes du monde de handball et de football et le Championnat mondial de cyclisme sur route, le Qatar vise les Jeux olympiques. Le «Qatargate», scandale de corruption quant à l'organisation du Mondial de football 2022, a suscité de vives réactions qui mêlent économie, sport et politique et a animé une contre-offensive anti-Qatar de la part de la classe politique française. Malgré ses investissements incessants, il reste un émirat grand comme l'Ile de France : sa faible superficie contraste grandement avec celle des deux géants voisins : l'Iran et l'Arabie Saoudite qui font craindre pour sa sécurité.
Quand on fait un coup d'Etat à son père, on se méfie forcément de ses voisins ! Bien que ses pétrodollars soient attractifs, l'émirat a des faiblesses majeures : les Qataris ne sont pas nombreux et l'armée qatarie repose sur la coopération entre les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni. Mais ses faiblesses sont vite estompées par sa puissance financière. Comment un pays peut-il être affaibli et monter en puissance comme le fait le Qatar ? Pour le professeur Marc Lazar, la réponse est à la fois dans la géographie du Qatar et dans l'histoire récente du Moyen-Orient. L'invasion du Koweït par l'Irak, en 1990, mit en évidence la vulnérabilité des petits Etats du golfe arabo-persique et pour l'émir, seul Washington a la capacité d'apporter une vraie sécurité.
Le Qatar a alors pris ses distances de l'Arabie Saoudite de qui il dépendait traditionnellement, et cela s'était avérée inutile pour le Koweït. La leçon du Koweït est retenue et pour ne pas être une cible d'attaques et une victime des pays voisins, le Qatar décide d'être dans les réseaux des plus puissants, grâce à l'économie et à la finance. L'autre point qui explique l'émergence de l'influence du Qatar réside dans la réussite de son processus de diversification économique. Les différents chocs pétroliers, entraînant des crises économiques, ont convaincu la famille royale que pour rester au pouvoir, ils avaient besoin de diversifier leur économie : par des investissements. Voilà ce que produit le Qatar.
En effet, le climat (le Qatar reste un désert) autant que la présence de ses puissants voisins font que le Qatar est fragile. Et c'est notamment en raison de ces faiblesses que l'émir Hamad Ben Khalifa Al Thani conduit une diplomatie lui permettant de rendre indispensable son Etat auprès de grands partenaires occidentaux et de caparaçonner son territoire (par exemple grâce à la base américaine d'Al-Udeid ou encore par le possible déplacement du siège de l'OACI à Doha). Cet activisme incessant, repose en définitive sur ce que Bill Clinton appelle le «soft-power».
A travers les médias, la mode, l'art, le sport, le luxe, le Qatar s'est imposé pour être intouchable. Il s'achète, par le biais de ses investissements pluridisciplinaires et multilatéraux, une notoriété inéluctable et un prestige sur la scène internationale. En soutenant les islamistes, ce «porte-avions des Etats-Unis» se met à l'abri contre toute éventuelle attaque terroriste sur son territoire. Le Qatar est passé depuis les révolutions arabes d'une volonté d'influence à une volonté de puissance. En s'imposant comme le leader des pays arabes, il cherche à gravir l'échelle de superpuissance financière et à transformer le rêve américain en rêve arabe. En se servant de personnalités, grâce à ses publicités et à sa générosité attrayantes, ce pays caméléon est aujourd'hui imposant et joue un rôle majeur dans les relations internationales.
En vingt ans le Qatar a réussi à prouver qu'une cité-Etat du Golfe persique pouvait devenir un eldorado et acquérir ainsi une renommée internationale, même si une de ses ambitions est le panislamisme, ce qui peut dans un futur proche envenimer ses affaires. Cela n'exclut pas également l'idée d'un réseau mondial d'islamistes domestiqué par l'émir pour en faire un atout d'influence et de déstabilisation. Déstabilisation, c'est ce qui s'est produit il y a moins d'un mois lorsque Cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani a abdiqué pour céder le pouvoir à son fils héritier du trône Tamim Ben Hamad Al-Thani. Le coup d'état intérieur est la première hypothèse de cet évènement, Cheikha Moza étant l'héroïne de ce jeu d'échecs, et l'origine étant une volonté de modernisation, et d'évolution. Avec son nouvel émir, le Qatar entre-t-il alors dans une nouvelle phase d'évolution ou de révolution comme l'ont vécue, le vivent et le revivent les pays arabes ?


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