La confidence faite par le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, à son arrivée à Alger – selon laquelle il est venu en Algérie «prendre des nouvelles du président Bouteflika» – enlève à cette visite «de travail et d'amitié» son caractère officiel pour la réduire à un geste de courtoisie envers un malade convalescent. En dépit de l'importance stratégique de cette visite officielle en Algérie du nouveau chef de l'Etat malien, qui intervient dans un contexte régional tendu qui nécessite une coopération plus intense des Etats de la région sahélo-saharienne, l'événement du jour, en Algérie, demeurera la santé de Bouteflika. Les observateurs n'ont pas manqué d'analyser et de scanner le déroulé de la visite du président malien. L'évacuation, la semaine dernière, vers l'hôpital parisien du Val-de-Grâce de Bouteflika pour, «officiellement», un «contrôle médical routinier» et son retour se sont faits dans la discrétion la plus totale. Aucune image, ni au départ ni au retour au pays du président de la République. Le communiqué officiel de la Présidence se voulait pourtant rassurant sur son état de santé qui «s'améliore sûrement». La signature par Bouteflika du décret présidentiel portant convocation du corps électoral à son retour de son séjour parisien avait valeur de bilan de «bonne» santé pour l'entourage présidentiel. Premier couac : durant la première journée de la visite d'Ibrahim Boubacar Keïta, le président Bouteflika a brillé par son absence. C'est le président du Sénat, M. Bensalah, et le Premier ministre, M. Sellal, qui ont comblé le vide et représenté le chef de l'Etat pour les activités protocolaires et les entretiens au sommet au niveau politique. Même le traditionnel dîner officiel offert en l'honneur de l'hôte malien s'est déroulé sans la présence de Bouteflika. La journée de samedi s'est terminée sans le moindre tête-à-tête entre les deux chefs d'Etat. Une première depuis que le président de la République est entré en convalescence des suites de sa maladie. Jusqu'ici, le président de la République s'est toujours efforcé, même au prix de laborieux efforts physiques et de pirouettes scéniques, de recevoir ses hôtes étrangers en médiatisant ses apparitions publiques. Les règles protocolaires dues à un chef d'Etat étranger ne sont pas celles d'un maire parisien. Ne pas s'empresser de recevoir, dès les premières heures de son arrivée, le chef d'un Etat voisin avec lequel l'Algérie partage les mêmes préoccupations et, qui plus est, place sa visite sous le signe de «l'amitié», ne peut pas ne pas soulever de légitimes interrogations. Bouteflika n'a finalement reçu son homologue malien que quelques heures seulement avant que ce dernier achève sa visite et quitte le pays. La santé du président de la République s'est-elle détériorée au point d'être incapable d'assurer le minimum requis par le protocole lié à la fonction présidentielle ? Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ? Difficile à convaincre. Après cette journée de cache-cache, où la classe politique et les Algériens étaient à l'affût de la moindre image du Président à la suite des informations alarmistes relayées par les réseaux sociaux lors de sa dernière évacuation au Val-de-Grâce, la communication présidentielle sur l'état réel de la santé de Bouteflika prend eau de toutes parts avec ce nouveau raté diplomatique. Cet épisode ne fera qu'alimenter encore davantage les informations qui se télescopent sur la santé de Bouteflika et sur le silence entretenu autour de sa candidature pour un quatrième mandat.