L'Algérie est classée 100e sur 175 pays par l'indice 2014 de perception de la corruption (IPC), élaboré par l'organisation Transparency International, rendu public hier. Avec une faible note de 3,6 sur 10, égale à celle enregistrée en 2013, l'Algérie dégringole tout de même de 6 places dans le classement international en passant de 94e l'année dernière à 100e cette année. Avec une note inférieure à 5, elle occupe ainsi une place peu honorable parmi les pays en zone rouge, ex aequo avec la Chine, et dans laquelle le secteur public est perçu comme extrêmement corrompu. L'Algérie arrive bien loin derrière le Qatar classé 26e, le Bahreïn, la Jordanie, et l'Arabie Saoudite 55e, Oman 64e, le Koweït à la 67e position, la Tunisie à la 79e, le Maroc 80e et l'Egypte à la 94e place. Un bien triste classement qui remet sans nul doute en question l'efficience des mécanismes officiels de lutte contre la corruption. Souvent cités dans les discours des gouvernements comme une «preuve» de l'existence d'une volonté de venir à bout de la corruption, ces mécanismes et lois s'avèrent en fin de course complètement inopérants dans un contexte où est établie la soumission du pouvoir judiciaire au pouvoir politique. Trop d'affaires en instance De l'affaire Khalifa, à l'affaire Sonatrach II, en passant par celle de l'autoroute Est-Ouest, ou encore de Brown and Root-Condor, ou des concessions agricoles et de la pêche, et la liste est non exhaustive, les dossiers de corruption s'entassent sur les bureaux des magistrats sans que les principaux responsables ne soient inquiétés. Des enquêtes judiciaires sont ouvertes puis vite livrées au temps, jusqu'à ce qu'un nouveau scandale éclate et que les médias s'en emparent. Des lampistes sont sacrifiés pour faire taire l'appel de la justice, et les connexions politiques dans les différentes affaires sont sabrées pour protéger les politiques. Pour l'Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC), l'Algérie «n'a non seulement fait aucun progrès pour faire reculer l'avancée dévastatrice de ce fléau, mais plus grave, la seule volonté du pouvoir est de neutraliser toute perspective de lutte contre la corruption, et ce, par tous les moyens». L'AACC cite en guise de moyens mis en place pour neutraliser la lutte contre la corruption : «La mauvaise législation anticorruption (qui plus est non appliquée) ; la justice complice et relais du pouvoir ; organes de contrôle et institutions spécialisées gelés de fait ; dénonciateurs systématiquement réprimés ; corruption comme instrument de pouvoir et du pouvoir à tous les niveaux ; transactions commerciales internationales de l'Algérie soumises à une corruption systématique.» Dans sa lettre accompagnant la publication de l'IPC 2014, le président de Transparency International, José Ugaz, souligne que «les abus de pouvoir des responsables politiques et des hauts fonctionnaires entravent la croissance et les efforts de lutte contre la corruption». L'IPC 2014 enseigne aussi, dans le cas des pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, que «la corruption politique est le principal défi dans la région. Les élites dirigeantes, qui concentrent le pouvoir pour de petits groupes, piétinent le principe de séparation des pouvoirs… Elles abusent systématiquement de leur autorité et agissent en toute impunité. Les promesses de réformes institutionnelles, qui devaient avoir lieu après 2011, n'ont pas été tenues». L'indice 2014 de perception de la corruption s'est basé sur les résultats de 12 enquêtes dont les thèmes principaux portent notamment sur l'application des lois anticorruption, l'accès à l'information et les conflits d'intérêts. Dans le cas de l'Algérie, l'IPC 2014 a établi son classement sur la base des résultats de pas moins de dix enquêtes et études menées par des organisations internationales non gouvernementales. L'AACC a tenu à lancer un appel à la société civile et aux médias afin de «ne pas passer sous silence la célébration, le 9 décembre prochain, de la Journée des Nations unies contre la corruption». Une journée placée cette année sous le thème «Rompez la chaîne de la corruption».