Après avoir focalisé pendant de longues années ses échanges avec les pays de l'Union européenne (UE), l'Algérie a décidé de changer de vision et de tenter l'expérience africaine. Un terrain laissé vide à travers une politique économique africaine fondée jusque-là sur l'énergie et les infrastructures, conformément aux orientations du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (New Partnership for Africa's Development, NEPAD). Parallèlement à la création des commissions mixtes, à l'organisation des forums d'affaires et à l'échange des visites (l'Algérie a reçu quatre Présidents africains en un mois), les déclarations illustrant l'intérêt grandissant de l'Algérie à l'Afrique sur le plan économique se sont en effet multipliées ces dernières semaines. Plus particulièrement depuis l'amorce de la chute des cours du pétrole sur le marché international. La baisse des exportations d'hydrocarbures et la recherche de nouvelles sources d'entrée de devises expliquent cet engouement pour le continent africain, connu pour ses richesses minières et pétrolières. L'Algérie semble donc vouloir rattraper le retard pour avoir sa part du gâteau et passer ainsi du stade des relations politiques et du traitement des questions sécuritaires aux échanges économiques. Le 21 janvier dernier, lors de son passage à la télévision algérienne, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a clairement affiché la volonté du gouvernement à s'ouvrir sur le marché africain, promettant d'accompagner les entreprises algériennes dans le processus d'exportation. Il a même annoncé l'organisation, avant la fin de l'année, d'un forum d'affaires algéro-africain pour étudier ce dossier et arrêter les mesures nécessaires à cette ouverture. Une ouverture souhaitée par le Forum des chefs d'entreprises (FCE), dont le président, Ali Haddad, n'a pas manqué d'interpeller le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, sur ce dossier lors d'une rencontre entre les deux parties, le 21 janvier dernier, dans le cadre des réunions de concertation tenues entre le FCE et les représentants du gouvernement. Ali Haddad a plaidé pour la mise en place d'un guichet unique pour la promotion des investissements sur le continent africain, mais aussi pour la facilitation de l'acte d'exporter vers les pays de cette région. Moins de deux semaines plus tard, le 1er février dernier, le ministre de l'Industrie, Abdessalem Bouchouareb, aborde de nouveau ce dossier, et ce, à l'occasion du forum économique algéro-béninois organisé en marge de la visite du président de la République du Bénin, Thomas Boni Yayi, en Algérie. Le ministre de l'Industrie accorde une grande importance à ce forum algéro-africain. Il affiche même un certain empressement pour la tenue de cette réunion, s'engageant dans le même sillage à assurer la jonction dans un délai de dix-huit lois de la Transsaharienne reliant Alger à Lagos, de manière à accélérer l'intégration économique sud-sud après des années de léthargie et de promesses. L'Algérie absente sur le marché africain Car, faut-il le noter, cette question de coopération et de partenariat sud-sud a toujours été évoquée dans les discours des dirigeants africains, notamment l'Algérie, mais dans la réalité le niveau des relations économiques reste faible entre ces pays pourtant liés par plusieurs accords. Ce qui a poussé Ali Haddad à évoquer la question avec ses homologues africains lors d'une rencontre, le 5 février dernier, en marge du sommet France-Afrique. Il est vrai que l'Afrique offre d'importantes opportunités pour le développement des entreprises, mais il est également vrai que le terrain est déjà conquis par les pays qui ont compris plus tôt que les affaires se font en Afrique, à l'image de la Chine, la Russie, la France ou encore le Maroc qui est, faut-il le noter, plus présent dans le continent noir par rapport à ses voisins du Maghreb. Energie, banques et télécoms sont entre autres secteurs à travers lesquels le Maroc est présent en Afrique à la faveur de sa réorientation de sa politique extérieure vers l'Afrique centrale et l'Afrique de l'Ouest. De son côté, l'Algérie en plus d'être absente sur le marché africain, n'arrive pas également à intensifier ses échanges au niveau maghrébin. Ce problème d'intégration est d'ailleurs régulièrement soulevé, sans pour autant trouver son issue. «Mettons d'abord le paquet pour se placer au niveau maghrébin, avant d'élargir notre présence aux autres pays d'Afrique», nous dira un opérateur économique, pour qui ce processus d'ouverture sur le continent noir s'annonce dur eu égard aux entraves déjà rencontrées par les quelques exportateurs algériens, mais surtout à la faible compétitivité des entreprises algériennes, au moment où d'autres pays avancent à grands pas vers l'Afrique en dépit d'un contexte économique pas toujours favorable aux affaires. Cette question sera au cœur du programme de l'AFRICA CEO FORUM 2015 qui se tiendra à Genève, les 16 et 17 mars prochain.