L'organisation terroriste autoproclamée «Etat islamique» a décapité, dimanche, 21 Egyptiens de confession chrétienne dans l'est de la Libye. L'Egypte a décidé de ne pas attendre qu'une solution politique soit trouvée au chaos libyen pour s'attaquer aux groupes terroristes qui activent en Afrique du Nord. L'Egypte a décidé de ne plus attendre qu'une solution politique soit trouvée au chaos, dans lequel est plongée la Libye depuis le renversement en 2011, par l'OTAN et le Qatar, du régime de Mouammar El Gueddafi, pour lancer les hostilités contre l'organisation terroriste autoproclamée Etat islamique (EI) implantée dans l'ex-Jamahiriya. Le président Abdelfattah Al Sissi a trouvé hier un argument imparable pour faire sonner les tambours de la guerre. Vingt et un de ses ressortissants de confession chrétienne ont été décapités, dimanche, dans la région de Cyrénaïque. Il veut se venger. Et maintenant ! Mais conscientes de la difficulté de la tâche, les autorités égyptiennes ne veulent pas mener cette guerre contre le terrorisme seules. Surtout qu'elle risque d'être longue et coûteuse. Aussi, Le Caire a-t-il multiplié durant toute la journée d'hier les contacts avec ses partenaires occidentaux et arabes afin de les convaincre de soutenir, au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, un projet d'opération militaire de grande envergure. Le chef de la diplomatie égyptienne, Sameh Shoukry, a annoncé pour sa part qu'il se rendait à un sommet antiterroriste à Washington avec l'intention de plaider pour une «intervention ferme». Sameh Shoukry «se rend à Washington pour participer à un sommet antiterroriste du 18 au 20 février, pour y affirmer la position de l'Egypte face au terrorisme : laisser la situation en l'état en Libye sans une intervention ferme pour y stopper la progression des organisations terroristes représenterait une menace claire pour le sécurité internationale et la paix», a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. Hollande répond présent Le premier pays occidental à avoir déjà répondu favorablement à la proposition égyptienne est la France. La célérité avec laquelle Paris a soutenu l'appel de l'Egypte n'a rien d'étonnant puisque le gouvernement français n'a pas arrêté aussi, ces dernières semaines, de faire du lobbying en Afrique et en Europe en faveur d'une action similaire. Les présidents François Hollande et Abdelfattah Al Sissi n'ont d'ailleurs pas perdu de temps pour appeler, à l'unisson, à une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies et à «de nouvelles mesures» contre l'EI. Lors d'un entretien téléphonique, «les deux chefs d'Etat ont évoqué hier la situation en Libye et l'extension des opérations de l'Etat islamique dans ce pays. Ils ont souligné l'importance que le Conseil de sécurité se réunisse et que la communauté internationale prenne de nouvelles mesures pour faire face à ce danger», a annoncé un communiqué de la présidence française. Le duo franco-égyptien devrait certainement être très vite rejoint par l'Italie. Rome a plaidé, avec véhémence et avant tout le monde, pour une action militaire musclée. De plus en plus alarmés par l'avancée des terroristes en Libye où leur pays compte d'importants intérêts économiques, des membres du gouvernement italien sont allés jusqu'à proposer de prendre la tête d'une coalition internationale dans le cadre de l'ONU et d'envoyer plus de 5000 soldats sur place. L'Egypte a un pied en Libye La ministre italienne de la Défense, Roberta Pinotti, a affirmé, dans un entretien au quotidien Il Messaggero dimanche, que l'Italie était «prête à guider une coalition de pays de la région, européens et nord-africains, pour arrêter la progression du califat qui est parvenu à 350 km de nos côtes». Surpris par le ton belliqueux de sa ministre de la Défense, Matteo Renzi, le président du Conseil des ministres italien, s'est néanmoins employé, hier, à atténuer les relents guerriers du discours de l'Italie sur la Libye. Il a notamment recommandé l'extrême prudence et rappelé la complexité de la situation. Côté arabe, les Emirats arabes unis, l'un des principaux soutiens au général Khalifa Haftar contre les milices de Fajr Libya, pourraient aussi être de la partie. Il ne serait pas surprenant par ailleurs que l'Arabie Saoudite, également dans la ligne de mire des terroristes l'Etat islamique, s'empresse de sortir son chéquier pour soutenir financièrement le projet de guerre égyptien. Mais le soutien saoudien ne sera certainement pas gratuit. Riyad compte aussi beaucoup sur l'Egypte pour tenir en respect les chiites yéménites au cas où ils commenceraient à se faire menaçants pour la monarchie wahhabite. En attendant que la coalition internationale contre la branche libyenne de l'EI souhaité par Le Caire prenne forme, Abdelfattah Al Sissi a commencé à se faire justice. L'aviation égyptienne a frappé, dès l'aube hier, des positions de l'EI à Derna, le principal bastion du groupe terroriste dans l'Est libyen. «Nos forces armées ont mené lundi (hier, ndlr) des frappes aériennes ciblées contre des camps et des lieux de rassemblement ou des dépôts d'armes de l'EI en Libye», a annoncé l'armée égyptienne. Les militaires ont, en outre, rendu publiques des images montrant des avions de combat décollant en pleine nuit. L'Egypte a donc, de manière officielle, le pied dans la guerre en Libye, un pays où désormais elle dispose du pouvoir d'influer sur le cours des événements. Ce n'est pas tout. En engageant son armée en Libye, le président Al Sissi fait comprendre aux pays occidentaux que son régime peut être un rempart sûr contre le terrorisme. Les Occidentaux n'en espéraient certainement pas tant.