Au Festival de Rome, l'Actors Studios de New York est venu faire la démonstration de la « Method », chère à Konstantin Stalinavski. La Festa de Rome a pris le raccourci du spectacle à l'art. Avant l'ouverture, il y avait quelques inquiétudes dans l'air. Les responsables avaient annoncé un « gros budget », de « grosses productions », de « grandes stars ». De Venise à Rome, on faisait des prédictions redoutables. C'est trop de risques. C'est casse-cou. Dans la presse italienne, on se penchait sur le corps du nouveau-né avant de naître. Et puis le 13 octobre, la Festa a démarré comme un grand spectacle dans le cadre futuriste du Parco Della Musica. Foules acclamant Nicole Kidman et Monica Bellucci, agitation effrénée des paparazzi, la « Passarella Rossa » (le tapis rouge) était quasiment envahie. Le cinéma spectacle avait le vent en poupe sous le ciel étoilé de Rome. Au fil des jours pourtant, changement de cap. L'art, la culture, le business ont systématiquement changé l'aspect des choses. Grâce aux œuvres de Scorsese, Tornatore, Belluccio, Comencini et d'autres. Grâce aussi aux expositions, aux débats, à la magnifique rétrospective consacrée à Marcello Mastroianni. Vive agitation aussi dans les salles du centre de Rome. Barberini, Fianna, Warner, Métropolitan où tout un contingent de films étrangers en versions originales était programmé. A Rome, le festival est allé dans le même sens que le travail de Nanni Moretti qui possède aussi une salle où il montre des œuvres venues de loin. L'un des thèmes fort du Festival de Rome, c'était aussi la série de conférences sur le travail de l'Actors Studio. Tous les chemins mènent à Rome, y compris la mythique « Method », inspirée du travail de Stalinavski, une technique de jeu de l'acteur basée sur le « naturalistic style », et reprise par Elia Kazan qui a créé l'Actors Studio à New York en 1947. Dans ces années de l'après-Seconde Guerre mondiale, le cinéma américain était marqué par les comédies musicales, les mélodrames. Il s'agissait de s'opposer à cette tendance. La nouvelle école de New York a introduit une rupture par rapport au cinéma traditionnel et a formé des acteurs qui ont démontré avec brio leur immense talent : Marlon Brando, James Dean, Marylin Monroe, Elisabeth Taylor, Montgomery Clift et d'autres qui ont hissé le jeu d'acteur à une hauteur jamais encore égalée. L'influence de la « Method » de Stalinavski, c'est particulièrement le cas dans le film d'Elia Kazan : On the Waterfront (Sur les Quais), avec Marlon Brando, que le Festival de Rome a programmé avec d'autres dans des copies parfaites, récemment restaurées. Konstantin Stalinavski dirigeait dans les années 1920 le Théâtre d'art de Moscou. Lors d'une tournée en Amérique, il a décidé de rester à New York avec une partie de sa troupe. Quelque temps plus tard, il fonde The Group Theatre où il enseigne une nouvelle approche du jeu d'acteur qu'il appelle « La mémoire émotionnelle », différente de la technique de l'action physique. L'acteur, selon lui, doit chercher dans sa mémoire ses émotions passées pour les mettre au service de son personnage. Dès le départ, le programme de l'Actors Studio était basé sur ce principe. Dans les mêmes copies restaurées, le public romain a pu revoir (fidèle application de ce principe) le jeu de Paul Newman The Left Handed Man, de Arthur Penn ; de James Dean dans Rebel Without a Cause, de Nicholas Ray ; ou encore de Marlon Brando dans Viva Zapata, d'Elia Kazan.