En dehors de la littérature stricto sensu (roman, poésie, théâtre), la guerre d'Algérie a été aussi une guerre de l'écrit. Journaux, manifestes et pamphlets ont mobilisé, dans les deux camps, protagonistes politiques et militaires, intelligentsia et opinion publique. Mais sait-on qu'il y a eu aussi des « Intellectuels-soldats dans la guerre d'Algérie » ? Tel est le sous-titre d'un volume d'essai, Par la plume ou le fusil, qui tente à la fois d'y répondre et de leur rendre justice dans le cadre d'une journée d'étude ayant célébré le quarantième anniversaire de l'indépendance, coordonné par Guy Dugas, professeur à l'université de Montpellier III et spécialiste des littératures francophones autour de la Méditerranée. Les « intellectuels-soldats » sont ces acteurs de tout bord qui, à un moment de leur vie, ont hésité entre l'écriture et le sabre ou ont pris tantôt le fusil et tantôt la plume (rarement les deux) pour combattre. A tout seigneur tout honneur, la haute figure de Jules Roy (1907-2000) domine l'ouvrage jusqu'à son dernier domicile de Vézelay (centre de la France) qui abrita en mars 2002 la rencontre, un prélude à Djazaïr 2003 - Une Année de l'Algérie en France. Officier en Indochine, ayant démissionné avec fracas de l'armée au printemps 1953, l'écrivain consacré (prix Renaudot 1946) revient en Algérie au printemps 1960 pour publier en septembre de la même année un témoignage dont le titre devient vite célèbre, La Guerre d'Algérie. Jules Roy dans la Guerre d'Algérie retrace, justement, l'itinéraire d'un soldat désengagé à un écrivain fidèle à lui-même, où honneur et morale se fécondent mutuellement. Dans Les intellectuels-soldats de la guerre d'Indochine à la guerre d'Algérie (100 jours les séparent : 20 juillet-1er novembre 1954, outre que l'on revient longuement sur Jules Roy, une intéressante interrogation du concept « intellectuels-soldats » est proposée. D'autres textes éclairent efficacement le lecteur tels, plus historique, Les Ould-Aoudia, des intellectuels algériens dans la guerre d'Algérie ou, plus littéraire, Algérie, les métaphores de la guerre. Un inédit de Jules Roy, Du métier des armes au métier d'écrire, clôt un recueil qui donne à voir autrement la problématique de la guerre d'Algérie, qui a été aussi une « insurrection de l'esprit » (Jean Grejean) restituée dans un contexte de décolonisation et de libération des peuples. Par la plume ou le fusil, les intellectuels-soldats dans la guerre d'Algérie, Pézenas, Domens, février 2004, 128 p.