Ferhat Aït Ali, expert financier, plaide pour une nouvelle répartition des revenus à travers de nouvelles grilles salariales «plus équitables». Au lieu de l'augmentation des salaires que revendique actuellement l'intersyndicale en quête de l'amélioration du pouvoir d'achat des travailleurs, l'expert préconise une nouvelle grille salariale, pouvant permettre de maintenir un pouvoir d'achat décent aux salariés aux plus bas revenus, impliquant toutefois des «sacrifices» de la part des hauts cadres de la nation. Les disparités criantes dans les salaires peuvent induire «une implosion sociale et politique», soutient le même expert. Les hauts cadres de la nation ainsi que certains hauts cadres de la Fonction publique touchent des salaires dix fois plus élevés que le Snmg, rappelle le même expert. Invité hier par l'intersyndicale, dans le cadre d'une journée d'étude sur le pouvoir d'achat, M. Aït Ali estime que les travailleurs de la Fonction publique sont «pris au piège de la politique boiteuse du gouvernement basée sur la gestion d'une rente héritée». L'expert, qui a longuement exposé sur les raisons ayant conduit à la situation actuelle, en l'absence d'une véritable politique d'investissement et une économie basée sur la rente et totalement dépendante des recettes pétrolières, prévient contre le recours à la planche à billets pour le financement des salaires. Il appelle les syndicats à reconsidérer les priorités dans leur plateforme de revendications qui devraient être orientées vers la levée des disparités dans le régime indemnitaire et la sauvegarde du système de la retraite, et non à protéger des acquis et des «considérations corporatistes», ou une augmentation salariale aux conséquences désastreuses sur leur pouvoir d'achat. Lyès Merabet, président du Syndicat national des praticiens de santé publique (Snpsp), craint que la solution préconisée ne soit applicable qu'avec le licenciement de milliers de travailleurs de la Fonction publique. De son côté, Zineb Aït Yahia duConseil des enseignants des lycées d'Algérie (Cela), tout en exprimant son rejet de l'option préconisée par M. Aït Ali, estime que l'Etat gagnerait à réviser son système fiscal en «taxant le privé» et en trouvant une solution «à l'argent des impôts perdu dans l'informel». «Nous n'avons pas été associés dans la prise de décision au temps de l'opulence, pourquoi, serait-ce aux travailleurs de faire encore des sacrifices pour faire face à la crise ?» fulmine, Idir Achour, du même syndicat, rappelant que l'intersyndicale a été la première à proposer une échelle mobile et transparente des salaires. Le Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l'éducation (Cnapeste) rejette toute autre solution, en «dehors de l'augmentation des salaires et la protection du pouvoir d'achat». Sadek Ziri, président de l'Union nationale des personnels de l'éducation et de la formation, souligne que l'intersyndicale revendique des mécanismes de protection du pouvoir d'achat «à travers la révision du système fiscal en réduisant l'IRG, à titre d'exemple». L'intersyndicale se réunira le 24 octobre pour annoncer le plan des actions de protestation contre la loi sur la retraite. Il s'agit aussi d'exiger la protection du pouvoir d'achat des travailleurs et celle d'autres acquis des travailleurs, en appelant à la mobilisation concernant le projet du code du travail.