La désaffection quasi générale du public à l'égard des élections locales du 23 novembre est criante. Les panneaux mis à la disposition des 51 partis, les quatre alliances et le groupe d'indépendants sont par endroits vides ou arrachés. Les électeurs sont loin d'être emballés par les nouvelles figures qui n'ont aucun programme ou sont en panne d'idées. La location de locaux pour mener campagne ne sert pas à expliquer grand-chose, sinon à faire défiler de la musique en boucle pour des jeunes désœuvrés ; l'opération de charme mise en branle par des candidats ne trompe plus les jeunes qui s'en détournent ; des transfuges qui, après avoir fait chou blanc dans leur dernier mandat au sein de la formation qu'ils représentaient, pensent avoir fait le bon choix en incarnant d'autres partis. «Nous avons un programme participatif», «nous œuvrerons pour le bien de la collectivité», «nous nous attelons à faire un travail de proximité», «nous prêterons l'oreille aux préoccupations des administrés», etc. Une foule de promesses inscrites sur de ternes banderoles et affiches brandies çà et là à l'endroit du potentiel électeur. Mais quid de la vérité une fois que les édiles auront la charge de présider aux destinées de leurs communes respectives ? Les gens veulent bien croire au changement en termes de cadre de vie (salubrité publique, éclairage public, embellissement des espaces publics, transport, culture…), mais la crainte de voir ces «bonnes gens» leur tourner le dos une fois que celles-ci auront pris les rênes de la municipalité les dissuade. C'est remarquablement curieux de voir ces élus balancer, comme d'habitude, cet argument sommaire pour échapper à leurs responsabilités : «On n'a pas les coudées franches» ou «cela ne relève pas de nos prérogatives», justifications maintes fois ressassées. Pourquoi donc faire miroiter des promesses à l'électeur quand on sait au préalable qu'on n'a aucune chance de les faire aboutir ? Le premier magistrat de la commune et les élus ont beau se défendre des maux de la cité qu'on leur impute. Ils ont beau mettre en avant qu'ils n'ont pas les moyens pour agir et répondre favorablement aux doléances de la collectivité. Ils ont beau justifier leur impuissance devant le cadre de vie qui se dégrade au fil des jours. Ils ont beau s'exempter de certaines urgences, comme l'hygiène publique, véritable tare dans nos cités. Ils ont beau dire qu'ils sont dans l'incapacité de réunir les porte-voix de la société civile pour mettre fin à la déliquescence de la cité. Sauf qu'ils oublient être les principaux gestionnaires de la commune, et qu'il leur incombe d'agir promptement et efficacement, quitte à quitter le navire de l'exécutif si les préoccupations de la collectivité sont mises sous le boisseau. La vox populi rapporte par ci par là les manœuvres sournoises des édiles dans la gestion des biens publics, de l'accaparement de lots de terrain, en sus de transactions contractées en porte-à-faux avec le code des marchés, notamment, mais les vautours sont toujours là-haut perchés, guettant l'heure opportune. S'il est vrai que certains élus – et ils sont rares – ont cette probité de servir le bien-être de la communauté, d'autres, en revanche – et ils sont nombreux – usent de louvoiement pour se servir. Et généreusement. Comme disait Brecht, «d'abord la bouffe, la morale après».