Le taux de chômage connaît une hausse selon la dernière enquête de l'ONS. Devant cet amer constat qui contredit les dires du gouvernement, l'économiste Abdelhaq Lamiri décèle une faiblesse de l'outil statistique en Algérie. « Cette dichotomie a toujours existé dans les données économiques sur l'Algérie. Cette fois-ci, c'est encore plus flagrant. Ils auraient dû au moins coordonner leurs chiffres », indique notre interlocuteur. Invité à apporter une analyse aux chiffres annoncés, M. Lamiri précise : « Si le chiffre de l'ONS se rapproche plus de la réalité, il doit toutefois être revu et corrigé car il y a beaucoup d'insuffisances dans l'outil statistique. » Tout en plaidant pour la constitution d'un institut indépendant crédible et audité capable d'apporter des statistiques fiables, à l'image de l'Insee en France qui est un organe de référence en matière de données chiffrées sur la vie socioéconomique, M.Lamiri regrette les données approximatives affichées par l'organe algérien des statistiques. « L'ONS travaille avec les moyens du bord et ses données recèlent plein d'inexactitudes. Selon les normes internationales, il y a toujours une marge d'erreur qui ne doit surtout pas dépasser les 10%, sinon il faudrait tout revoir. En Algérie, les écarts sont tellement grands qu'il n'est plus possible de contrôler l'économie », dira notre interlocuteur. Ce dernier reconnaît que ces contradictions dans les chiffres et données économiques reflètent un manque de sérieux. Quand la question est appréhendée sous l'angle de l'ONS, il s'agit pour M. Lamiri d'un problème technique entrant dans la lignée des pratiques datant des années 1970 et 1980 où les données étaient orientées selon des définitions précises ou particulières. « Quant à l'autre chiffre (celui donné par M. Ould Abbas), il est carrément politique », note Abdelhaq Lamiri qui considère que le diagnostic a été fait depuis longtemps, notamment par la Banque mondiale qui a établi dans l'un de ses rapports que l'Algérie n'a pas d'outil statistique fiable pour gérer son économie. « Des appels d'offres nationaux et internationaux avaient été lancés pourtant afin de permettre à l'ONS de moderniser ses moyens mais rien n'a été fait », affirme l'économiste en notant que ce dernier cafouillage dans les chiffres ne fait que confirmer ce qui existe déjà. « Nous avons eu plusieurs cas de ce genre, notamment dans les chiffres présentés par le ministère du Commerce et ceux présentés par les douanes, c'est une caractéristique des pays qui n'ont pas d'outil statistique fiable. » Prenant l'exemple d'une voiture qui dérape, l'économiste souligne que cette faiblesse dans le contrôle des données économiques risque de faire dévier les choix économiques. « On peut prendre de bonnes décisions mais qui sont inadaptables à la réalité. »