Les experts plaident pour la création de fonds d'investissement pour contourner les règles prudentielles de la Banque d'Algérie. Les banques continuent de se cacher derrière le vieux slogan selon lequel le surplus de liquidités est la résultante d'une gestion saine et rigoureuse du risque. Le gouvernement semble vouloir mettre le doigt là où ça fait mal pour les investisseurs : les banques. Karim Djoudi, ministre des Finances, a sommé les directeurs des banques à faire des suggestions en vue de mettre un terme au statu quo et Ahmed Ouyahia, fraîchement réélu à la tête du gouvernement, entend rencontrer les banquiers dans les tout prochains jours. Pour les experts, il n'y a pas mille solutions en vue. Soit revoir la politique de prudence de la Banque d'Algérie et le plafond fixé aux investisseurs demandeurs de crédit, soit créer des banques destinées spécialement au financement des investissements. Les banques, notamment publiques, affichent des surplus qui se chiffrent en milliards de dinars, mais les entreprises font toujours les frais des restrictions pour leur financement. Ces institutions financières continuent de se cacher derrière le vieux slogan selon lequel le surplus de liquidités est la résultante d'une gestion saine et rigoureuse du risque. Mais de l'argent qui n'est pas utilisé n'est-ce pas synonyme d'une réserve mal investie ? Peu avant son départ du ministère délégué à la Réforme financière, Fatiha Mentouri allait s'attaquer au gros morceau de la politique et l'évaluation du risque crédit. Les experts, eux, plaident pour la création de fonds d'investissement pour contourner les règles prudentielles de la Banque d'Algérie. Pour Lachemi Siagh, consultant et expert international en finances, il est vrai que les banques publiques disposent actuellement de surliquidités qui ne sont pas prêtables à cause de leur faible capitalisation et, par conséquent, des limites imposées par les normes prudentielles de gestion bancaire. Avis partagé par Abdelhak Lamiri, docteur ès sciences de gestion (université de Californie, USA). Ce dernier estime que le caractère des banques algériennes pose aussi problème. « Ce sont des banques commerciales qui ont des dépôts à court terme », a-t-il expliqué, soulignant qu'il est impératif de passer à l'autre option de créer des banques d'investissement. Cela, selon lui, pour contourner les normes prudentielles appliquées par la Banque d'Algérie et qui ne permettent pas de financer l'investissement et la création d'entreprises. Pour esquiver ces restrictions qualifiées « d'objectives » par Lachemi Siagh, il faut aller, selon lui, vers la création d'autres instruments, à l'image de caisses de dépôt pour éponger les surliquidités bancaires. Celles-ci « doivent être placées soit sous forme de capital, soit sous forme de dettes, dans les entreprises algériennes qui en ont cruellement besoin », soutiendra sur sa lancée Lachemi Siagh. Abdelhak Lamiri, appelé hier par nos soins, estime que tous les économistes algériens défendent l'idée selon laquelle les réserves actuelles sont très suffisantes pour le financement et la sécurisation de l'économie. Il est donc primordial de passer à la phase de la mise en place des instruments de financement. « Il s'agit, en fait, d'une caisse que l'Etat doit créer afin que les banques puissent y placer leurs liquidités pour qu'elles soient, par la suite, allouées aux entreprises », suggère encore Lachemi Siagh. Cette caisse, se référant à ces explications, pourrait par ailleurs assurer le rôle de fiduciaire et de teneur de marché. « Il y a une sérieuse réflexion qui commence à germer et qui consiste à donner une âme à cette idée de créer des fonds d'investissement », soutient également M. Lamiri. A en croire une source de la Banque d'Algérie, l'enjeu premier pour cette institution est d'améliorer les outils de gestion et de renforcer la capacité d'analyse et d'évaluation des risques crédit en Algérie. Mais l'absence d'un marché boursier national limite l'accès à des sources alternatives de financement de l'investissement.