Malgré un soleil de plomb, le jeûneur entame une autre journée d'abstinence, la gorge sèche et l'estomac vide. Mais la baraka du mois sacré est là pour venir en aide aux jeûneurs qui comme chaque année accueillent le mois de Ramadhan avec ferveur. Contrairement aux années précédentes, la fièvre acheteuse ne s'est pas emparée des consommateurs. Et pour cause, tous les produits de large consommation y sont disponibles et les prix n'ont pas subi la hausse habituelle. Même la tension sur le lait qui caractérise cette époque de l'année, été et Ramadhan s'entend, n'a pas lieu d'être, et ce, depuis l'avènement du mois sacré. Un autre événement ces jours-ci, l'absence de produits étalés sur les trottoirs. Même les marchands ambulants, vendeurs à la sauvette, vendeurs de sardines, d'huile d'olive..., ne font plus partie du décor. Les revendeurs ont élu domicile dans les marché couverts au bonheur de tous, marchands et consommateurs. Une tournée dans la ville révèle la disparition du phénomène de vente à la sauvette de produits alimentaires souvent douteux. Il ne subsiste que les petits revendeurs de pain traditionnel particulièrement prisé en cette période de jeûne. Hormis cette effervescence autour du commerce, la ville fonctionne au ralenti. C'est aussi la période des congés pour nombre de fonctionnaires. Et ce sont les femmes travailleuses qui généralement préfèrent se consacrer à leur foyer à cette époque de l'année. Ainsi vit Tlemcen et ses environs depuis le début du mois de Ramadhan. Au rythme nonchalant des déambulations dans les marchés, au farniente des après-midi chauds et calmes, à l'animation de la cité peu avant la rupture du jeûne pour reprendre juste après jusqu'au bout de la nuit. 16 heures 30. Bientôt la prière d'El Asr. Les fidèles se regroupent déjà sous les arbres centenaires de la grand-place, en attendant l'appel du muezzin. A quelques mètres de là, des citoyens font la queue à la station de taxi. Juste après la prière d'El Asr, ce sont les derniers achats qui prennent le dessus. Certains préfèrent rentrer avec de la Chamia, de Zlabia, d'autres avec des boissons, alors que les vieux « tuent » le temps en se racontant de vieilles histoires du côté du boulevard ombragé d'El Mechouar. Du côté de Lalla Setti et El Mefrouche sur les hauteurs de Tlemcen, l'étroite route qui mène vers le barrage est complètement « bloquée ». Retour à la ville. Là où on peut rencontrer des Subsahariens et des Syriens qui y ont élu domicile. Les riverains ont pour ces communautés le plus chaleureux des accueils, surtout en cette période de Ramadhan. Chacun y va de sa contribution. Les statistiques des services de sécurité indiquent la présence de quelque 10.000 sans-papiers. Une Syrienne entourée de ses trois enfants, témoigne de cette hospitalité légendaire des Algériens : « L'Algérie et son peuple sont d'une bonté et générosité inépuisables. Je m'y sens avec mes enfants en sécurité ». Le même témoignage émane de cette Malienne : « Nous sommes tous convenablement pris en charge dans des restaurants ». Le soir venu, Tlemcen et ses environs vivent une autre ambiance. Les ventres repus, l'esprit allégé, on ne pense qu'à se détendre après une journée chargée en événements multiples. Les rues s'animent. En attendant l'imsak, qui mène au sommeil, une autre journée de jeûne commence.