Des Sahraouis, qui ont « goûté » aux geôles marocaines, ont raconté, pour certains, par l'image, pour d'autres, ce qu'est l'horreur. Fait nouveau, la cause sahraouie semble tirer profit du « printemps arabe ». Tunisiens, Egyptiens, Libanais promettent de plaider l'affaire des Sahraouis dans le monde arabe et moyen-oriental où elle était « inconnue » jusque-là. « Nous venons des territoires occupés et du Sud marocain pour certains. Nous sommes là pour témoigner sur ce que nous avons enduré dans les prisons marocaines, dans lesquelles croupissent encore et sans jugement au moins 49 de nos frères. Leur crime ? Ils ont osé revendiquer la liberté pour le Sahara occidental. Même s'ils savent qu'ils risquent des peines de 20 à 30 ans, certains parmi eux savent qu'ils pourraient connaître une fin comme celle du chahid Mustapha El Ouali, c'est-à-dire ne pas être enterré par leur famille et leurs proches. Même si je ne peux pas tout dire ici, par respect pour l'assistance, par pudeur, je connais ce qu'est la torture depuis l'âge de 15 ans, y compris la privation du sommeil ; je crois pouvoir dire que le Maroc, qui croit qu'en nous violentant, réussira à nous réduire au silence, fait fausse route », affirme Oulad Cheikh Mahjoub, un activiste sahraoui, avant de lancer « Aidez-nous ! » à l'assistance. « La communauté internationale doit intervenir. Elle doit savoir que je serai jeté en prison dès mon retour », dit-il. Kheïra M., une autre activiste, comme tous les autres Sahraouis qui se sont succédé à la tribune, apporte quasiment le même témoignage. « Dans les territoires occupés où nous n'avons aucun droit, nous sommes violentés, malmenés quotidiennement », déplore-t-elle. Aalia Akhyarhoum osera dire que parmi les tortures qu'affectionnent les Marocains, le déshabillage des femmes. Mais assurément, le témoignage de la famille de M'barek Daoudi, un activiste sahraoui en grève de la faim depuis plus de six semaines et prisonnier à Salé, depuis les événements de Gdeim Izik en 2010, a ému l'assistance. Tour à tour, sa sœur et son fils ont pris la parole pour « démasquer » la politique des « droits de l'homme » du Royaume chérifien. Moment de forte émotion dans la salle. La communauté internationale doit agir Invités à prendre la parole, tous les participants étrangers ont mis sous le coude les discours qu'ils avaient préparés. « Que dire après ces témoignages sinon saluer la force et la détermination de ce peuple. Nous ne pouvons que les admirer », dira Christine Perregaux, présidente du Comité suisse de soutien au peuple sahraoui. « Nous sommes dans l'urgence et nous avons le devoir de nous indigner et d'agir. Et auprès des institutions internationales pour qu'elles honorent leurs engagements, la tenue d'un référendum au Sahara occidental et auprès des médias pour donner un prolongement aux dernières révélations sur la politique étrangère marocaine. Keit Mokoap, président des Amis de la RASD en Afrique du Sud, qui a fait l'objet d'un contrôle durant un récent séjour au Maroc, a dénoncé l'empêchement des délégations étrangères désireuses de se rendre dans les territoires sahraouis occupés. « J'ai été prisonnier sous l'apartheid, je suis devenu après parlementaire, je peux avancer que les pratiques du Maroc ne sont qu'une continuité des pratiques de l'ex-régime ségrégationniste sud-africain », soutient-il, rêvant d'une Afrique « affranchie de l'occupation ». Lucas Chomera Geremias, premier vice-président de l'Assemblée nationale du Mozambique, qui s'est exprimé au nom du président de son pays, Armando Emílio Guebuza, salue d'abord l'Algérie. « Par son soutien à la cause sahraouie, l'Algérie a permis à cette question d'être inscrite en permanence dans l'agenda des Nations unies et de l'Union africaine », dit-il, avant d'appeler les bonnes âmes et les bonnes volontés à ramener le Maroc à la raison et à libérer « immédiatement » les prisonniers sahraouis. Il lancera aussi un appel à la Minurso pour qu'elle organise enfin le référendum pour lequel elle a été créée en 1991. « La décolonisation du Sahara occidental est une nécessité impérieuse », plaide Mohamed Ahmed Salem Talebna, président du comité d'amitié algéro-mauritanien. « L''établissement d'un Etat sahraoui permettra de faire face au crime, au trafic de stupéfiants et au terrorisme dans le Sahel et le Maghreb », dit-il, espérant comme tous les participants que 2015 soit la bonne année pour les Sahraouis. « Cet espoir est légitime », dira Mohamed Haddad, coordinateur du Front Polisario avec la Minurso, car « le Maroc ne peut plus compter sur la France comme avant ».