Les droits de l'homme doivent être consolidés dans la prochaine constitution. Tel est le plaidoyer des juristes contactés à l'occasion de la journée internationale des droits de l'homme célébrée le 10 décembre de chaque année. « La future loi fondamentale se doit de renforcer les droits de l'homme en améliorant en premier lieu la démocratie. Cela implique des élections transparentes, un appareil judiciaire totalement indépendant et une presse qui jouit d'une liberté totale », a estimé le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Me Farouk Ksentini qui se dit beaucoup plus partisan d'une constitution sociale que politique. Au sujet de la situation des droits de l'homme en Algérie, il les qualifie « d'ordre moyen » même s'il y a des manquements « qui ne sont pas significatifs ». « Les droits de l'homme se consolident au fur et à mesure. Il faut toutefois rester vigilant parce qu'il n'y a pas plus fugace que les droits de l'homme. Il suffit d'un seul incident pour remettre en cause toute une décennie d'efforts. En Algérie, les choses s'améliorent. La liberté d'expression et les libertés individuelles connaissant une nette progression. A cela s'ajoute, la démocratie qui est en train de s'enraciner », a-t-il observé. Toutefois, l'avocat a mis en garde contre la bureaucratie « qui est en train de faire des ravages ». « C'est elle qui se nourrit des dépassements », a-t-il ajouté, dénonçant le « favoritisme » induisant une régression des droits de l'homme. Le président de la CNCPPDH a cité également les accidents de la circulation qui sont, selon lui, une atteinte aux droits de l'homme. Ce qui le pousse à plaider pour un durcissement des sanctions.Autre domaine qui porte un coup aux droits de l'homme : le domaine de la santé. « Ce secteur est quasiment sinistré dans certains de ses services à l'exemple de la prise en charge des malades chroniques tels que les cancéreux. Tout cela empêche l'installation définitive des droits de l'homme dans notre pays aussi bien verticalement qu'horizontalement », a-t-il signalé. Instaurer une nouvelle instance de protection des droits de l'homme Maître Miloud Brahimi a tenu à préciser que la célébration de la journée internationale des droits de l'homme donne l'impression qu'il s'agit d'une fête internationale alors qu'en réalité les droits sont malmenés partout dans le monde. « En Algérie, les choses sont positives, d'autres gagneraient à le devenir. Dans notre pays, la liberté d'expression est une liberté fondamentale et totale. Concernant la justice, je pense qu'il y a une amélioration », a-t-il jugé. Il a rappelé que même si tout n'est pas parfait, les choses vont dans la bonne direction. « Les droits de l'homme constituent une partie d'un tout. Ils sont à l'image de la situation générale d'un pays. Ils sont infiniment mieux protégés dans les pays démocratiques que dans les pays antidémocratiques », a-t-il estimé, précisant que « les principes affirmés dans le projet constitutionnel sont bons et suffisants ». Le problème réside, selon lui, dans le « respect pratique » de ces principes. Concernant les rapports des organisations internationales sur la situation des droits de l'homme en Algérie, l'avocat a affirmé qu'il ne croit pas trop à leurs contenus. Il a rappelé que durant les années du terrorisme, ces mêmes organisations faisaient état des choses contraires à la vérité. Le président du syndicat national des magistrats, Djamel Aidouni considère que les réformes politiques initiées par le président de la République « s'inscrivent justement dans le respect des droits de l'homme ». Il a cité l'exemple de la révision du code des procédures pénales ayant apporté, selon lui, beaucoup de nouveautés susceptibles d'améliorer les prestations judiciaires. « La révision de la détention provisoire, le respect des droits des femmes, des enfants, des témoins et des justiciables confirme le prgrès des droits de l'homme dans notre pays », a-t-il indiqué. « La nouvelle constitution concrétisera assurément les droits de l'homme si l'on tient compte de la première mouture rendue publique », a-t-il observé. Le constitutionnaliste Me Boudjemaâ Souileh estime que les droits de l'homme sont nettement mieux respectés qu'auparavant. Toutefois, il a signalé qu'en dépit des engagements pris dans le cadre des conventions internationales, des « dépassements » existent pour ce qui est de la liberté d'opinion, de rassemblement, de constitution des partis politiques... Pour y faire face, il propose la multiplication des voies de recours, rappelant que la consécration de ces droits est tributaire d'un système démocratique. Il estime aussi qu'il faut encourager les associations de protection des droits de l'homme et ne pas se contenter d'une seule instance. Maître Chérif Chorfi souligne, lui aussi, l'avancée « noble » des droits de la défense, « même si beaucoup reste beaucoup à faire ». « Chacun a sa lecture des droits de l'homme », a-t-il souligné incitant l'opposition à faire preuve d'éthique politique et morale dans le cadre justement du respect des droits de l'homme. Il estime que ce qui se passe actuellement « n'honore en rien la politique encore moins ses auteurs ».