L'application Uber, devenue une société internationale florissante, fait actuellement débat au niveau des usagers et des instances publiques de nombreux pays, tant son innovation déroge au cadre réglementaires mis en place pour les activités de transport et que son modèle économique pose problème. Ce sont deux jeunes, Travis Kalanick et Oscar Salazar, venus à Paris en 2008 pour assister à un salon sur le web, confrontés aux problèmes des taxis parisiens, similaires à ceux de leur ville San Francisco, qui ont eu l'idée de mettre sur pied dès 2009, une société appelée alors « Uber Cab » spécialisée dans la fourniture de chauffeurs privés à la demande. « Uber, anciennement UberCab, est une entreprise technologique américaine qui développe et exploite des applications mobiles de mise en contact d'utilisateurs avec des conducteurs réalisant des services de transport », détaille l'encyclopédie en lige Wikipédia au sujet de cette start-up qui fait beaucoup débat actuellement. Avec un siège social en Californie, comme la majorité des acteurs dominants du web, elle est valorisée en 2015 à plus de 50 milliards de dollars et revendique une présence dans plus de 300 grandes villes dans le monde. Uber a adopté uns stratégie de développement basée sur une extension géographique en même temps d'une diversification de ses offres, avec néanmoins des difficultés d'implantation, voire même des interdictions d'activités dans certaines villes en raison du caractère nouveau de l'application et des implications socioéconomiques qu'elle engendre. « Organisant une activité commerciale régulière de vente de service comme s'il s'agissait d'une activité occasionnelle, la société fait l'objet de nombreuses polémiques, en raison de débats sur ses pratiques, où la libre concurrence qu'elle défend se heurte à des accusations de concurrence déloyale et de travail dissimulé de la part des pouvoirs publics et des professionnels qui se réclament du respect de la réglementation sociale, fiscale et administrative en vigueur », écrit à ce propos Wikipédia qui résume en grande partie les griefs retenus contre cette application tant par des professionnels du transport que par de nombreux gouvernements, notamment européens qui se plaignent de l'inadaptation du modèle proposé avec leur législation.Mais les enjeux sont tels que la bataille sera longue et rude au regard des positions qui se dessinent chez les différents protagonistes de ce marché juteux, que commence à devenir la Voiture de transport avec chauffeur (VTC) qui commence à faire fureur dans les grandes villes du monde et notamment à Paris où un véritable bras de fer est engagé avec la traditionnelle corporation de taxieurs parisiens réputés corporatistes. Le quotidien économique français latribune.fr s'est intéressé à la comparaison des services offerts par les chauffeurs Uber et les taxieurs parisiens, dans un papier mis en ligne le 9 novembre dernier, dans lequel on peut lire : « Lorsque vous avez utilisé pour la première fois les services d'un VTC comme Uber, vous avez eu l'impression d'entrer dans un autre monde : un chauffeur qui vous ouvre la portière ; qui est aimablissime ; qui vous demande si vous voulez écouter la radio, et si oui, laquelle ; qui vous offre des bonbons et de l'eau minérale ; et qui ne doit pas être payé en liquide », écrit le journaliste du site ajoutant : « Vous avez peut-être ainsi évité — cela arrive parfois — l'odeur du chien sur le siège passager, la saleté dans l'habitacle, les jérémiades du chauffeur sur la circulation, le refus des cartes de crédit, etc. » Des chiffres publiés fin novembre dernier par le bureau d'études américain Boston Consulting Group estiment le développement de ce marché « entre 1,5 milliard d'euros et 3,9 milliards d'euros en 2022, contre 800 millions d'euros cette année. Et employer entre 40.000 et 80.000 personnes de plus qu'aujourd'hui, soit entre 60.000 et 100.000 chauffeurs qui travailleraient en France pour ces plateformes », lit-on dans cette étude réalisée avec la participation de la société Uber. On y apprend également que le nouveau service a participé à une augmentation des opportunités d'emploi ; « alors que l'on compte quelque 40.000 chauffeurs de taxi en France, le secteur des VTC a créé 22.000 emplois sur tout le territoire, selon le BCG », souligne 20minutes.fr qui cite un des auteurs du rapport affirmant que la « moitié de ces personnes étaient sans emploi avant de devenir des chauffeurs privés. Et un quart d'entre elles auraient subi des discriminations à l'embauche lors de leur parcours professionnel antérieur. » D'après le contenu du rapport de BCG, l'apport du VTC va au-delà puisqu'il permettrait des revenus stables et même supérieurs à la moyenne dans les services à la personne par exemple. « Le revenu moyen oscille entre 1.400 et 1.600 euros nets pour des travailleurs indépendants... mais c'est mieux, par exemple, que les personnes qui travaillent dans les services à la personne, rémunérées, en moyenne, 1.300 euros par mois », indique un autre cadre de chez BCG. Les observateurs, notamment français, auront remarqué que l'étude est publiée au moment où la société Uber est confrontée à une prise de position de l'Europe. Le journaliste du site 20minutes.fr fait également le lien entre les informations divulguées par BCG, avec le concours de la société Uber et un autre rapport publié sur le même sujet par le cabinet d'études Facta avec l'appui de nombreuses fédérations des taxieurs. Ce dernier met l'accent beaucoup plus sur l'impact de ce nouveau service sur les revenus des taxieurs. « Alors que l'activité des VTC a progressé de 270% par an ces trois dernières années, celle des taxis a, elle, baissé de 5,3% par an, note le site du journal gratuit qui revient à l'étude de BCG pour constater que les services de VTC ont tout de même introduit des nouveautés : « En Ile-de-France, on remarque, par exemple, que certains territoires (grande banlieue) ou certaines plages horaires (la nuit) mal desservis par les transports en commun et les taxis ont été conquis par les VTC. Ces derniers ont donc permis à de nouveaux clients d'utiliser ces services », rapporte-t-il. La dernière actualité relative aux activités de la société rapporte des pratiques de géolocalisation et de suivi des données de clients qui suscitent un débat. La dernière mise à jour de l'application Uber, intervenue le 24 novembre dernier, permet au géant du transport individuel de collecter encore plus de données sur ses clients, rapporte le site du quotidien d'information gratuit français 20minutes.fr qui s'est intéressé comme la grande majorité des médias internationaux qui ont relevé cet intérêt d'Uber pour « la position géographique de ses utilisateurs une fois que leur trajet est terminé », soulignant également que, chose nouvelle, « la géolocalisation reste possible pendant les cinq minutes qui suivent la fin de la course ». Dans un papier mis en ligne le 3 décembre dernier, sous le titre « Qu'est-ce que Uber sait de nous ? », le site de la radio française www.franceculture.fr explique ainsi cette « innovation » : « Vous prenez un véhicule Uber pour aller à un rendez-vous. Vous sortez de la voiture. Vous allez prendre un café, vous revenez sur vos pas pour faire une course, vous vous arrêtez devant le cinéma, pour regarder les affiches. Et bien tout ça désormais Uber le sait. » Il a été constaté également que depuis cette nouvelle mise à jour, des informations sur le positionnement géographique du client peuvent être captées et transmises même lorsque l'application fonctionne juste en arrière plan. « C'est-à-dire que, contrairement à ce qui se passait avant la mise à jour, l'échange de données peut avoir lieu même si la fenêtre du service Uber n'est pas visible et activée sur le terminal des utilisateurs, explique 20minutes.fr citant une source de presse française, en ajoutant que malgré la possibilité offerte aux clients de désactiver « la fonction de partage de données et en entrant manuellement les adresses de départ des trajets, cette nouvelle configuration inquiète les défenseurs du droit à la vie privée numérique. Ainsi, aux Etats-Unis, une plainte a été déposée contre la société par Electronic Privacy Information Center pour ‘‘pratique commerciale illégale et trompeuse'' ». Bien évidemment, la société Uber s'est expliquée sur ces « accusations » en déclarant agir dans le souci d'améliorer la qualité des services offerts, et ce par la voix d'un porte-parole qui a notamment déclaré à la presse spécialisée américaine qu'Uber est « en permanence à la recherche de nouvelles façons d'améliorer les trajets de nos passagers, en leur donnant une heure d'arrivée prévue plus précise ou encore en trouvant le point de prise en charge le plus pratique dans chaque rue ». Sur le Vieux continent, l'heure est en tout cas aux explications devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qui a entamé une procédure, suite à « une demande de décision préjudicielle présentée le 7 août 2015 par le tribunal de commerce n° 3 de Barcelone », relate le site www.itespresso.fr qui retient que « face à la justice européenne, Uber réaffirme être une plateforme électronique intermédiaire et non une société de transport ». La Cour européenne donne ainsi suite à une action engagée depuis 2014 par une association professionnelle de taxi espagnole qui a porté plainte « contre la société de droit espagnol Uber Systems Spain SL, accusée d'exercer dans l'illégalité avec UberPOP (depuis lors interdit dans le pays) et plus globalement de bénéficier d'avantages concurrentiels indus face aux exploitants de taxis, en matière de licences, d'assurances ou encore de sécurité », rapporte itespresso.fr. Le tribunal espagnol cherche ainsi à savoir sur quel registre de la législation européenne placer l'activité d'Uber pour pouvoir lui appliquer des sanctions pour les griefs retenus contre elle. Trois grandes questions devront être tranchées par les juges de la Cour européenne dont la plus importante servira à déterminer si l'activité pratiquée par Uber doit être « considérée comme une activité de transport, comme un service électronique d'intermédiaire ou comme un service propre à la société de l'information au sens de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaines des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux dits services de la société de l'information », lit-on dans le même papier. Même si Uber se défend d'être une société de transport, il est clair que la décision de la CJUE, qui interviendra, dans le meilleur des cas, durant l'année 2017, aura certainement un impact sur son exercice en Europe.L'implantation en France ne s'est pas faite sans bruit arec notamment les problèmes soulevés par la corporation des taxieurs qui se sont ligués contre ce genre de services jugé menaçants pour leur profession.L'association de protection des consommateurs UFC-Que Choisir a, de son côté, tiré la sonnette d'alarme dès 2015, en prenant position contre les conditions contractuelles de la société Uber. L'association relève d'abord que la création d'un compte Uber « emporte acceptation générale et absolue des documents contractuels par les futurs utilisateurs », souligne 20minutes.fr, avant de remarquer qu'il y a problème dans la mesure où, écrit-il, « aucun de ces documents ne figure dans l'e-mail de confirmation envoyé au consommateur. Du coup, Uber peut les modifier à son gré. » En plus de faire remarquer les possibilités de « pistage informatique » de ses clients UFC-Que Choisir dénonce également certaines dispositions dans les contrats proposés par Uber qui se réserve le droit, en cas d'inexécution des termes du contrat de limiter sa responsabilité à un montant ne dépassant pas les 500 euros. De plus, Uber s'exonère de sa responsabilité en cas « de dommages causés par des logiciels malveillants, des virus », relève 20minutes.fr qui voit là un problème « En cas de piratage ou d'une faille de sécurité de l'application, en quoi l'utilisateur est-il responsable ? Pas grand-chose en fait », constate-t-il.