Le Forum d'El Moudjahid a organisé hier une rencontre animée par des universitaires sur le rôle de la presse algérienne pendant la colonisation et au début de l'indépendance. Le thème a été abordé par les invités sous l'angle strict de l'histoire de l'apport de la presse algérienne dans la mobilisation des populations contre la colonisation, sa conscientisation autour de l'objectif d'indépendance. MM. Ihaddaden, Boumali et M. Belkhodja ont écarté les autres médias comme la radio ou la télévision pour se concentrer sur l'écrit, «car de 1954 à 1956, avec le Congrès de la Soummam, ce sont « essentiellement des tracts » qu'utilisera le FLN pour expliquer aux Algériens la nécessité de ce combat et faire barrage à la propagande coloniale», explique M. Hassen Boumali. A cet effet, à la veille du déclenchement de la Révolution, le groupe des Six historique avait chargé deux de ses militants, Didouche Mourad et Mohamed Boudiaf, de prendre attache avec Laïchaoui, pour la confection de la déclaration du 1er Novembre qui paraîtra en même temps que la brochure du 30 octobre. Selon un historien, même dans les prisons, il y avait «des expériences d'édition de brochures. Mais elles seront vite démantelées par l'administration». M. Zohir Ihaddaden estime que l'Algérie a connu sa première expérience médiatique avec «l'Estafette de Sidi Ferruch» introduit en 1830 avec l'invasion du pays par la France. Jusqu'en 1882, les colons diffusaient leur presse en français et en arabe, elle a été « l'occasion pour l'élite algérienne de contacter et de lancer avec l'aide des libéraux français le premier numéro de « l'Elu » qui paraissait à Constantine. La presse algérienne de l'époque était « politique, religieuse ou culturelle » puisque outre les associations religieuses avec et les zaouïas qui avaient leur propre bulletin, les partis tels le PPA, le MTLD avaient eux aussi leurs brochures. Mais faute de moyens, manque de locaux, d'imprimerie, la presse nationale n'a pu tenir le coup au moment où la presse coloniale montrait sa force. Elle avait alors de gros titres comme l'Echo d'Oran et l'Echo d'Alger, la Dépêche de Constantine. Le chercheur a toutefois soulevé un vent de mécontentement parmi certains invités lorsqu'il avoua que l'expérience d'Alger Républicain, dont la création remonte à 1937, « n'était pas à classer dans le répertoire de la presse nationaliste » au motif que ce titre fut l'émanation de « militants français de gauche non acquis à la cause ». Cela dit, M. Ihaddaden se réconciliera plus tard avec cette assistance lorsqu'il précisera que ce journal sera récupéré, au lendemain de l'indépendance, « par les Algériens dont le militant et moudjahid Abdelhamid Benzine.» Un autre journal des colons qui a survécu à 1962, la Dépêche d'Algérie, connaîtra un sort identique et continuera à paraître jusqu'en 63-64. Le Forum ne s'est pas arrêté là ; il s'est étalé sur la période post-indépendance avec la création des premiers numéros de journaux algériens à part entière comme le Peuple, Echaâb ou encore El Moudjahid en 1965. Ces journaux marqueront le paysage médiatique jusqu'en 1989 et le début de l'ouverture médiatique.