Figure n Un hommage a été rendu, mercredi, jeudi et vendredi, à Kateb Yacine, écrivain, dramaturge et journaliste, lors de la 6e édition du Festival Strasbourg-Méditerranée (France). Entrant dans le cadre de la célébration du vingtième anniversaire de la disparition de Kateb Yacine (1989-2009), cet hommage avait pour but d'évoquer l'auteur à travers son œuvre, revisitée et commentée, d'où la question : «Que reste-t-il du legs katébien aussi bien littéraire que théâtral ?» A cette interrogation, Ahmed Cheniki, universitaire et critique d'art dramatique, répondra qu'il reste beaucoup de choses car, a-t-il souligné, «Kateb Yacine a touché à tous les genres et a influencé énormément de personnes que ce soit des hommes de théâtre ou des romanciers». Dans La répudiation et L'Insolation de Rachid Boudjedra, on retrouve les traces de Kateb Yacine, tout comme dans les textes de Saâdallah Ounous où l'empreinte est évidente. Rachid Mimouni et Tahar Djaout se revendiquent eux aussi de l'héritage katébien», a-t-il poursuivi. Et de reprendre : «Kateb Yacine a influencé les écrivains de sa génération : même le Marocain Driss Chraibi a dit dans ses entretiens qu'il était marqué par Kateb Yacine, pareil pour Tahar Benjelloun qui en parle aussi ; Layla Merouan, Salim Bachi ont dit que les influences de Kateb sont très importantes ; ils disent avoir un rapport très étroit avec son œuvre.» Même aujourd'hui, des écrivains comme Mustapha Benfodil sont influencés par l'imaginaire katébien. Ahmed Cheniki a, en outre, fait savoir que Kateb Yacine est présent également dans le travail théâtral. «On y retrouve des moments katébiens», a-t-il fait savoir. «Beaucoup de troupes ont repris – et reprennent jusqu'à présent – les textes de Kateb Yacine, la structure et parfois le discours », a-t-il souligné. Interrogé sur les raisons qui ont fait que Kateb Yacine a eu de l'emprise sur ses contemporains et même les jeunes auteurs, Ahmed Cheniki a dit : «Kateb Yacine avait une force et une culture extraordinaires qui lui permettaient justement de subvenir les formes, la langue et aussi de porter un discours sur l'histoire ; il y avait une position politique, on ne peut, en aucun cas, oublier ou ignorer ses positions politiques.» «C'est le contexte de l'époque qu'on va retrouver dans l'écriture de Kateb», relève-t-il. Et de préciser : «La littérature ne peut en aucun cas être détachée du réel». S'exprimant sur les enseignements qu'on peut dégager de l'œuvre de Kateb Yacine, Ahmed Cheniki dira : «L'engagement». Et d'expliquer : «Kateb Yacine a toujours été engagé : il a proposé dans ses textes un engagement citoyen et à travers ses écrits, notamment à travers le travail théâtral qu'il a entrepris, il a décidé d'aller vers un large public, s'adresser à lui et lui transmettre le message qu'il voulait.» «Le théâtre de Kateb Yacine est un théâtre politique : il se veut engagé. Kateb Yacine voulait aller, à travers ce théâtre, vers les gens, leur enseigner une manière de se tenir, de comprendre le monde et surtout la lutte que mènent certains peuples et citoyens», a-t-il déclaré. n Interrogé sur le travail de Kateb Yacine, Ahmed Cheniki a dit : «On ne peut comprendre l'œuvre dramatique et romanesque de Kateb Yacine sans justement interroger les textes publiés dans un certain nombre de journaux dans lesquels il a collaboré (Alger Républicain, Jeune Afrique, Algérie actualité…)». Et de poursuivre : «...parce que finalement tout ce que nous retrouverons par la suite dans ses écrits journalistiques, se retrouvera dans ses pièces et ses textes littéraires.» Kateb Yacine, en tant que journaliste, était polyvalent. Il avait touché à tous les genres, allant du reportage à la rubrique des chiens écrasés, en passant par les enquêtes, les chroniques et les billets… «Et c'est quelqu'un qui avait une connaissance extraordinaire des techniques d'écriture journalistique», a-t-il fait savoir. Et de reprendre : «Dans la chronique et le billet, il usait d'un style satirique. On retrouve tout cela dans ses pièces de théâtre.» «Il avait une intelligence telle qu'il savait ce qu'il disait et qu'il développait un discours théâtral qui correspondait à ses idées», a-t-il dit. Et de conclure : «On ne peut pas séparer l'écriture journalistique de l'écriture dramatique ou romanesque ou politique. »