Résumé de la 1re partie n Félix Petitpont, ayant découvert sa clôture cisaillée, se rend à la gendarmerie pour porter plainte contre X... Godefroy, en constatant que sa haie est bien grignotée, pique une crise de rage froide. Il devient tout rouge et son épouse comprend qu'il faut se garder d'aller lui réclamer de l'argent pour les courses. Devant le spectacle de sa haie mutilée, il décide de porter plainte auprès des gendarmes. Il en profite pour demander des dommages et intérêts de 1 400 francs. «On va bien voir ce qu'on va voir ! Qu'est-ce qu'il s'imagine ce marchand de bestiaux, qu'il pourrait laisser ses vaches venir brouter mes rosiers ?» Cependant, Félix Petitpont n'est pas né de la dernière pluie du bocage : «Olah ! Attention ! C'est bien joli de planter des thuyas mais M. Godefroy a fait ça n'importe comment ! Bon, je n'ai rien dit parce que je ne suis pas du genre procédurier mais à présent qu'on me cherche des noises, je ferai remarquer que M. Godefroy a planté ses thuyas sans réfléchir. Donc trop près de mes vaches. Si elles ont bouffé sa verdure, c'est tant pis ! En effet, M. Godefroy a planté ses thuyas sur... mon terrain !» Baudouin Godefroy ne s'attendait pas à ça : — J'exige une contre-expertise ! C'est de bonne guerre ! Les autorités de justice désignent un expert. Les gendarmes et le maire du village essayent de prêcher la conciliation : — Monsieur Godefroy, vous vous êtes trompé, ça peut arriver à tout le monde. Replantez vos thuyas un peu en retrait et tout s'arrangera. Après tout, des vaches en Normandie, c'est quand même normal ! Non ? Mais Godefroy n'est pas sensible au charme bovin. Il ne répond rien : il a sa petite idée. Et c'est ainsi qu'une nuit, piétinant dans la boue du pâturage, il cisaille la clôture de Petitpont, comme si cela pouvait arranger les choses. L'expert se nomme Sébastien Beloncle, il est âgé de 70 ans, et dès son arrivée tout le monde est impressionné par ce personnage qui semble sorti d'un autre siècle. L'homme s'exprime avec recherche et calme. L'incarnation de la justice et de l'impartialité. Son élégance discrète fait un peu tache au village où l'on n'a pas vu un homme aussi important depuis belle lurette. Sébastien Beloncle est président de la Compagnie des experts judiciaires près de la cour d'appel. Un homme comme on aimerait en avoir beaucoup en France. M. Sébastien Beloncle fait connaître par écrit, au bout d'un an, ses conclusions. Elles sont simples : M. Baudouin Godefroy a commis une erreur irréfutable en plantant sa haie de thuyas sur le terrain de Félix Petitpont. Point final. Godefroy doit déplanter ce qui reste de ses thuyas, sous peine d'astreinte. En prenant connaissance de ces conclusions, Baudouin Godefroy, qui ronge son frein depuis un an, explose. Son épouse lui dit : — Calme-toi, Baudouin, tu vas te faire mal ! Si l'expert a constaté une erreur, ce n'est pas la fin du monde. Tout le monde peut se tromper. — Ce Beloncle est un vendu. Bien sûr, il y a collusion entre lui et Petitpont. Tu penses, un boucher du village ! Il doit avoir tout le monde dans sa manche. Beloncle a du toucher un pot-de-vin. Ici, tout le monde se tient. Nous, nous ne sommes que des étrangers pour eux. C'est un peu trop facile. Ils vont voir comment je m'appelle ! Ah ! ils ne me connaissent pas encore ! Ils ne savent pas de quoi je suis capable ! — Mais tu as déjà démoli la clôture. Tu vois le résultat ! Déjà Baudouin Godefroy n'écoute plus les remontrances de son épouse. Il saute dans sa voiture et fonce vers le domicile de M. Beloncle. Celui-ci lui ouvre sa porte sans méfiance. Il est loin de s'attendre à un déluge d'injures et de menaces. (à suivre...)